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Feuilleton du printemps – Épisode 8 : Le casse-tête des décharges

A heavy compactor/bulldozer reshape rubbish on a landfill site and gets mobbed by hungry birds

LE CASSE-TETE DES DECHARGES

On enfouit en décharge uniquement les déchets qu’on refuse de récupérer. C’est en contradiction complète avec l’économie circulaire. C’est une contribution cynique à l’épuisement des ressources planétaires. Comment en finir avec cet immense gaspillage ?

Les 3 sortes de décharges

Les décharges de classe 1 sont réservées aux déchets industriels les plus dangereux. Elles sont très rares. Dans tout le Midi de la France il n’y en a que deux : une à Bellegarde (département du Gard) et une autre à Graulhet (Tarn).

Les décharges de classe 2 dites aussi « installations de stockage de déchets non dangereux » ou ISDND sont destinées aux déchets ménagers et assimilés, qu’on appelle aussi déchets municipaux.

Les décharges de classe 3 accueillent les déchets « inertes ». On qualifie ainsi ceux qui ne fermentent pas, qui ne peuvent pas brûler et qui ne sont susceptibles d’aucune réaction chimique ou physique. Ils ne présentent donc aucun danger pour la santé ou pour l’environnement. Exemples : des vitres brisées, des débris de briques ou de tuiles, la terre extraite pour faire place aux fondations d’un édifice ou à une piscine…

La classe 1

Jusqu’à une époque récente les industriels vendaient leurs produits sans se soucier des déchets qui résultaient de la consommation desdits produits. A leurs yeux , ces déchets, c’était l’affaire des clients et pas des fabricants. Cette insouciance a pris fin avec l’instauration de la R.E.P. ou responsabilité élargie des producteurs . Rappelons que la R.E.P. oblige les producteurs à collecter et à traiter à leurs frais les déchets issus des produits qu’ils ont mis sur le marché. C’est une innovation majeure : Puisque ce sont les producteurs qui désormais sont en charge de ces déchets ils ont tout intérêt à ce que lesdits déchets soient recyclables et sans danger.

A été également introduite une fiscalité incitative, notamment la T.G.A.P. (taxe générale sur les activités polluantes) dont la vocation est de s’alourdir d’année en année jusqu’à devenir insupportable. La double pression de la REP et de la TGAP pousse les industriels à l’écoconception de leurs produits. On peut donc raisonnablement espérer que les dépôts en décharges de classe 1 se feront de plus en plus rares jusqu’à disparaître.

Classe 3

Les déchets inertes qui y sont entassés proviennent presque tous de l’industrie du bâtiment et des travaux publics : gravats des chantiers de démolition, terre résultant du creusement de puits, de piscines, de tranchées, etc

Ces déchets inertes pourraient être réutilisés. Au lieu de prélever du gravier dans le lit ou sur les rives d’un cours d’eau, l’industrie des carrières pourrait concasser les débris des chantiers de démolition. On a parfois besoin de terre pour édifier un remblai ou combler une cavité.

Pourquoi ne pas prélever cette terre dans une décharge d’inertes ?

Un grand pas vers l’économie circulaire sera accompli lorsque les décharges de classe 3 seront devenues des dépôts temporaires, transitoires destinés à une réutilisation.

Classe 2

Les décharges de déchets ménagers et assimilés sont celles qui posent les problèmes les plus nombreux et les plus difficiles.

Les déchets ultimes

On ne doit enfouir dans ces décharges que des déchets « ultimes ». Ils sont légalement définis comme suit : « déchets qui ne sont plus susceptibles d’être traités dans les conditions techniques et économiques du moment , notamment par extraction de la part valorisable ou par réduction de leur caractère polluant ou dangereux ».

Malgré cette définition les ISDND reçoivent souvent des résidus recyclables. C’est pourquoi à Béziers la clôture de la décharge a souvent été fracturée pendant la nuit par des voleurs à la recherche de ferraille, d’aluminium, de cuivre et d’autres métaux qu’ils avaient repérés quand il faisait jour.

Systématiques sont aussi les dépôts d’ordures fermentescibles pourtant faciles à valoriser par compostage. Enfouis sous terre et donc privés d’ oxygène ces dépôts en fermentant produisent de grandes quantités de biogaz dont la puanteur caractéristique (cadavérique et excrémentielle) suffit à prouver que des fermentescibles ont été illégalement enfouis. Dans l’Hérault (et ailleurs) la préfecture n’a pas seulement fermé les yeux sur cette illégalité : elle a même autorisé un industriel à bâtir à l’intérieur de la décharge de Béziers une installation qui transforme le biogaz en chaleur et en électricité. Autoriser l’exploitation d’un dépôt illégal  c’est un comble…

Les dépôts dangereux

Bien entendu dans une ISDND (installation de stockage de déchets non dangereux) les résidus dangereux sont logiquement interdits . Les arrêtés préfectoraux autorisant les ISDND comportent une longue liste des dépôts prohibés : explosibles, corrosifs, comburants, inflammables, etc. Sont évidemment interdits les déchets médicaux à risques infectieux . Interdites aussi les « substances chimiques » (sic) sans autre précision. Il est vrai que s’il fallait énumérer tous les produits chimiques dangereux la liste serait interminable. J’ai gardé le plus savoureux pour la fin. Sont explicitement interdits « les déchets contenant plus de 50 mg/ kg de PCB » . Traduisez PCB par polychlorobiphényles. Ils font partie des polluants organiques persistants. Le gardien d’ISDND assis dans sa guérite à l’entrée de la décharge a-t-il la compétence et les moyens techniques pour évaluer si tel camion-benne transportant des tonnes d’ordures contient moins de 50 mg/kg de PCB ou un autre toxique dans une petite partie de son chargement ?

Les seuls résidus dangereux qui ne peuvent entrer dans une ISDND sont les matières radioactives car un appareil placé à l’entrée de la décharge lance l’alerte s’il détecte de la radioactivité.

Incohérences

Très paradoxalement les installations de stockage de déchets non dangereux font officiellement partie des I.C.P.E. ou installations classées pour la protection de l’environnement c-à-d les installations dangereuses . Elles sont soumises à enquête publique et doivent être autorisées par la préfecture. L’arrêté préfectoral d’autorisation énumère la longue liste des précautions que l’exploitant doit prendre pour ne pas nuire à l’environnement.

Ainsi pour éviter de polluer les nappes d’eau souterraines, le soubassement géologique d’une ISDND doit comporter une couche d’argile (matière peu perméable) d’au moins 5 mètres d’épaisseur. Cette couche doit être surmontée par au moins un mètre de matière (naturelle ou artificielle) encore plus imperméable. Cette double barrière passive est complétée par une barrière active : un fine couche de matière plastique totalement imperméable doit tapisser le fond de la décharge .

Ce n’est pas tout : la pluie tombée sur l’ISDND lessive les déchets et, polluée par ce contact, s’accumule en fond de décharge. Ce liquide pollué, appelé lixiviat, doit être continuellement extrait de la décharge, stocké dans un bassin et traité avant déversement dans le milieu naturel.

Malheureusement ces précautions ne sont pas toujours suffisantes. Le biogaz généré par l’enterrement des fermentescibles n’est pas seulement malodorant explosif et toxique. Il est aussi inflammable et provoque souvent des incendies susceptibles d’endommager la matière plastique qui tapisse le fond de la décharge. Vérifier après un incendie si ce tapis est intact et le réparer éventuellement n’est pas une mince affaire. A la suite d’un feu, l’ISDND de Vendres près de Béziers a été fermée pendant 18 mois pour vérification et travaux.

Gestion des lixiviats

Que faire des lixiviats ? Le plus simple, le moins onéreux et le plus inoffensif pour l’environnement est de laisser les lixiviats s’évaporer dans leur bassin sous l’ardeur du soleil. Surtout dans le sud de l’hexagone les calculs des services météorologiques nous apprennent que la quantité d’eau qui s’évapore du sol est supérieure à la pluviométrie. Mais les élus (conseillés par qui?) préfèrent presque toujours pour les lixiviats des traitements industriels complexes et onéreux. Les lixiviats de Béziers sont envoyés par camions-citernes à des centaines de km vers des installations industrielles. Leurs performances sont douteuses car ce sont le plus souvent des stations d’épuration des eaux d’égout . Ces STEP sont efficaces contre les polluants organiques mais inopérantes contre les innombrables polluants minéraux. Pour les lixiviats comme pour les autres déchets nous constatons que les techniques artisanales (en l’occurrence évaporation dans un bassin) sont à tous égards préférables aux techniques industrielles.

Conclusion

Pour les défenseurs de l’environnement la tâche, à défaut d’être facile, est du moins simple et claire : Il faut exiger le respect rigoureux des lois et de la réglementation relatives à la gestion des déchets. Si le droit en vigueur était respecté, les ISDND n’accueilleraient ni recyclables (qu’il vaut mieux recycler) ni toxiques (qu’il faut collecter séparément pour traitement approprié) ni fermentescibles (qui doivent être compostés) ni quoi que ce soit qui puisse polluer l’environnement. Les ISDND deviendraient donc de fait des décharges de classe 3 pour résidus inertes.

Pour le comité biterrois du MNLE

Robert CLAVIJO

Vers de grands débats sur l’énergie

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Christian Chasseau, secrétaire national du MNLE – Réseau Humanité&Nature présente les débats sur l’énergie qui se  débuteront à la Fête de l’Humanité.

 

Feuilleton du printemps – Épisode 7 : Vers une économie circulaire ?

VERS UNE ECONOMIE CIRCULAIRE ?

Depuis quelques années le concept d’économie circulaire fait partie du droit français. De quoi s’agit-il ?

Limites des ressources naturelles

Qu’il s’agisse d’énergies ou de matières premières, aucune ressource naturelle n’est inépuisable. L’énergie du soleil paraît éternelle. Pourtant même le soleil, ce réacteur thermonucléaire, quand il n’aura plus d’hydrogène à transformer en hélium, cessera de nous envoyer lumière et chaleur.
Même si nous réduisons le rythme actuel de notre consommation, nous aurons bientôt épuisé les gisements d’énergies fossiles contenus dans l’écorce terrestre : pétrole, gaz naturel et charbon. Il y a quelque 300 millions d’années a pris fin la période géologique dite « carbonifère ». Elle porte ce nom parce que dans les conditions climato-biologiques très particulières qui existaient alors, les arbres morts, au lieu d’être, comme actuellement, décomposés par des microbes, se sont lentement transformés en houille. Quand nous aurons brûlé toute la houille de l’écorce terrestre, il ne faut pas espérer que dame nature, pour nous complaire, produira de nouveau des houillères.
Les gisements de métaux n’existent qu’en quantité très limitée. Or ils sont très demandés. L’industrie actuelle est très vorace notamment en « terres rares », appellation curieuse car il s’agit d’une quinzaine de métaux mais elle dit bien leur rareté. Inutile de préciser que, si nous savons extraire des métaux du sol, nous sommes totalement incapables de créer du fer, du cuivre, de l’or ou des « terres rares » pour remplacer les gisements épuisés.

La société « de consommation »

En peu de temps les sociétés industrielles ont multiplié production et consommation ce qui leur a valu naguère d’être étiquetées « sociétés de consommation ». L’american way of life » ou mode vie des USA (le plus gaspilleur qui soit) est malheureusement devenu l’exemple à suivre non seulement dans les pays dits « riches » mais aussi dans tout le tiers monde. Or il est évident que les ressources planétaires, déjà fortement entamées, ne permettent pas à toute l’humanité de consommer autant que les USA.
Circonstance aggravante : la population mondiale, au lieu de diminuer, explose. Depuis 1960 le nombre des êtres humains a été multiplié par 3. C’est 3 fois plus de consommateurs.
Vous vous demandez peut-être quel est le lien entre ce que vous venez de lire et la gestion des déchets, sujet de notre feuilleton printanier. Réponse : Pour éviter l’épuisement des ressources planétaires il est évident qu’il faut récupérer, réutiliser, recycler la totalité de nos déchets car tout déchet non récupéré, tout déchet incinéré est une ressource perdue pour la génération actuelle et pour les générations futures. Or nous sommes loin, très loin de tout récupérer…

L’époque du tout jetable

En arpentant les rues de votre ville vous rencontrez partout, négligemment abandonnés sur les trottoirs, les déchets les plus divers : mégots (pourtant toxiques), masques antiviraux (peut-être infectés), canettes de boissons et bouteilles d’eau en plastique. Les auteurs de ces abandons n’ont manifestement aucun souci de récupération et de recyclage.
Plus grave : des commerces de toute taille depuis des épiceries jusqu’à des hypermarchés s’obstinent à proposer à leurs clients des sacs en plastique peu ou pas recyclables. Certains consommateurs accordent leur préférence aux boutiques et aux rayons où tout se vend en vrac. A défaut de boutiques vrac, ils tendent aux commerçants le récipient réutilisable dans lequel ils demandent que soient placés le fromage ou les végétaux qu’ils achètent. Mais ces écocitoyens sont encore très minoritaires.
Quand une entreprise organise une fête avec buffet, elle utilise le plus souvent des gobelets et de la vaisselle jetables, généralement en plastique non recyclable. La plupart des convives ne sont guère préoccupés par le devenir de ces ustensiles.
Laboratoires pharmaceutiques, hôpitaux et cliniques devraient donner l’exemple d’une consommation responsable. Il n’en est rien. Dans mon enfance les seringues, après chaque injection, étaient désinfectées dans un bain d’alcool à 90° et réutilisées. Actuellement les seringues, y compris les aiguilles d’acier éminemment faciles à stériliser et à réemployer, sont à usage unique. Tout ce matériel est brûlé avec les médicaments non utilisés même s’ils n’ont pas atteint la date de péremption et pourraient servir dans un dispensaire.

De l’économie linéaire à l’économie circulaire

La pratique du tout jetable est aussi appelée « économie linéaire ». On peut la résumer en 4 étapes :
1- On extrait de la planète énergie et matières premières.
2- Avec ces ressources on fabrique des marchandises.
3 – Les marchandise sont distribuées et consommées.
4 – Après consommation, les déchets, au lieu d’être récupérés, sont jetés dans la nature ou incinérés ou enfouis en décharge.
Ces 4 étapes forment une ligne droite. L’économie circulaire consiste à transformer cette ligne droite en un cercle grâce à la réutilisation des déchets. Exemple : une bouteille en verre, une canette en acier ou en aluminium, après que leur contenu a été consommé, peuvent être recyclées des milliers de fois sans aucune perte de matière ou de qualité. A la limite une économie circulaire parfaite fonctionnerait en circuit fermé. On cesserait d’opérer des prélèvements sur les ressources naturelles vu que les déchets fourniraient toute l’énergie et toutes les matières premières nécessaires à un nouveau cycle de production/consommation.
Malheureusement une économie totalement circulaire est un idéal impossible à atteindre.

Les limites de l’économie circulaire

Recycler des canettes métalliques ou des bouteilles en verre exige d’abord leur transport jusqu’à une usine. Celle-ci fait fondre à haute température le métal ou le verre pour fabriquer des récipients neufs. Transport et fusion consomment une énergie qui ne servira qu’une seule fois, contrairement au métal et au verre indéfiniment recyclables.
D’autre part une lame de scie ou de couteau est soumise à des frictions . A chaque utilisation et à chaque affûtage la lame perd une partie de son acier sous la forme d’une très fine poussière métallique. Cette poussière n’est ni récupérée ni récupérable. Elle se disperse et se perd dans l’environnement. Une perte identique a lieu pour tous les métaux soumis à des frictions : rails de chemin de fer, roues de véhicules, cylindres et pistons de moteurs, roulements à billes , etc. C’est pourquoi l’économie dite « circulaire » ne peut fonctionner en circuit fermé. A chaque cycle, il faut introduire dans le cercle de nouveaux prélèvements sur les ressources naturelles (énergie et/ou matières premières).
Une économie totalement circulaire est donc un idéal impossible à atteindre mais vers lequel il faut tendre au maximum.

Concrètement quelle conduite tenir ?

La conduite à tenir pour favoriser une économie circulaire se déduit logiquement de tout ce qui précède :
1- Réduire le nombre des consommateurs en étendant à toute l’humanité le contrôle des naissances.
2- Renoncer à consommer des ressources non renouvelables. Dans le cas contraire lesdites ressources seront un jour épuisées et il faudra bien alors nous en passer. Autant nous en passer dès maintenant et laisser à nos descendants une planète pas totalement appauvrie.
3- Laisser aux ressources renouvelables que nous consommons le temps de se renouveler. Il faut des siècles pour qu’un gland tombé sur le sol devienne un chêne adulte.
4- Allonger la durée de vie des biens d’équipement. Donc en finir avec l’obsolescence programmée. Réparer systématiquement les téléphones, les ordinateurs, l’électroménager au lieu de jeter à la moindre panne pour acheter du neuf. Multiplier les vide-grenier pour donner une seconde vie aux biens qui ont cessé de plaire. Multiplier les recycleries dites aussi ressourceries ou parcs à ressources.
5- Au lieu d’acheter une tondeuse à gazon ou une perceuse électrique que vous n’utiliserez que quelques heures par an, mieux vaut louer ces appareils, quand vous en avez besoin. Le même appareil servira ainsi à beaucoup de familles. C’est l’intérêt du consommateur et de l’environnement mais il faudra imposer cet usage aux industriels dont le chiffre d’affaires reculera.
Cette pratique est déjà intégrée dans le droit français sous le nom d’économie de la fonctionnalité.
5- A l’emballage jetable préférer l’emballage recyclable et au recyclage préférer la consigne de l’emballage.
6 – Développer et multiplier les filières R.E.P. Les industriels sont en effet les mieux placés et les plus compétents pour récupérer, réemployer, réutiliser ou recycler les déchets issus des biens qu’ils ont mis sur le marché.
7- Réinjecter dans la production la totalité de nos déchets, ce qui exclut incinération et enfouissement en décharge.
8- Réduire la publicité, qui nous incite à consommer au-delà de nos besoins et qui nous suggère que consommer toujours plus serait source de bonheur.

Nous avons du pain sur la planche. Haut les coeurs !
Pour le comité biterrois du MNLE Robert Clavijo

Feuilleton du printemps – Épisode 6 : Techniques artisanales ou industrielles 

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TECHNIQUES ARTISANALES OU INDUSTRIELLES ?

A chaque étape de la gestion des déchets les collectivités territoriales en charge de ce service public ont à choisir entre techniques industrielles et techniques artisanales. Comment faire un choix éclairé ?

L’étape de la collecte

La collecte des déchets ménagers peut se faire de 3 façons :

1- Apport volontaire des ménages dans des bornes de tri sélectif. Elles comprennent au moins 2 conteneurs : un pour le verre et un pour les autres emballages, le papier et le carton. Dans d’autres collectivités, les bornes comprennent 3 ou 4 conteneurs ce qui permet un tri plus fin.
C’est la collecte techniquement la plus artisanale et financièrement la moins coûteuse.

2- Collecte en porte à porte effectuée par les camions-bennes d’ébouage.

3- Jamais en panne d’imagination quand il s’agit de nous vider les poches, des industriels comme VEOLIA ont inventé une collecte souterraine par aspiration ou par soufflerie dite collecte « pneumatique ». Ce système exige un réseau de tuyaux souterrains qui s’ajoute au réseau d’égout, au réseau d’adduction d’eau potable, au réseau de tuyaux de gaz, etc. Les ménages jettent leurs déchets dans les « périscopes » (ouvertures du réseau pneumatique) . Après quoi une soufflerie/aspiration chasse ou aspire à grande vitesse (70 km/heure) les déchets qui aboutissent dans un récepteur central en périphérie de la ville. Des camions chargent alors les déchets et les transportent dans une usine de tri et de traitement.

En 2011 VEOLIA comptait plus de 700 installations pneumatiques dans le monde et même quelques-unes en France : Saint-Ouen, Romainville, Vitry-sur-Seine , le quartier des Batignolles à Paris, etc.

Avantages du système pneumatique : il supprime les bacs poubelles, les ordures parfois répandues sur les trottoirs ainsi que les camions-bennes d’ébouage bruyants et malodorants.

Inconvénients du système pneumatique : il réduit à peu de chose le tri manuel (pourtant décisif) par les habitants ; il coûte très cher en investissement (réseau souterrain) et en énergie (soufflerie ou aspiration 24 h sur 24 et 7 jours sur 7). La riche et très bourgeoise principauté de Monaco a opté pour le pneumatique mais Grenoble, après une expérience, y a renoncé en 2012. L’ADEME ne recommande pas le pneumatique, à la fois très coûteux, énergivore et incompatible avec un tri correct des déchets . Par exemple le système pneumatique n’accepte pas le verre qui doit donc être collecté autrement…

L’étape du compostage

Les élus ont le choix entre 3 filières pour le traitement des déchets fermentescibles :

1- la meilleure solution à tous égards est le compostage domestique : Il supprime les transports et les dépenses énergétiques qu’exige tout transport. Ceux qui ont un jardin n’ont même pas besoin de composteur, qui est indispensable uniquement pour ceux qui vivent en appartement. Dans ce dernier cas l’achat d’un composteur est superflu. N’importe quel récipient peut servir comme composteur : grand pot de fleurs, vieux seau, caisse en bois….

2- Certains ménages, pour des raisons diverses, ne peuvent ou ne veulent pas pratiquer le compostage domestique. Pour ces personnes les élus sont légalement tenus d’organiser une collecte séparée des fermentescibles. Dans ce cas, le plus simple et le plus judicieux est de déposer les déchets collectés sur une plate-forme de compostage. Ils y fermentent en gros tas qu’on retourne de temps à autre pour oxygénation et qu’on arrose en période de sécheresse pour éviter la déshydratation. Au bout de quelques mois le compost est mûr et peut être vendu pour épandage sur les sols cultivés. La vente de ce compost produit artisanalement sans aucune nuisance couvre en grande partie les frais de transport et de compostage.

3- Bien entendu divers industriels préconisent des usines techniquement complexes et financièrement très coûteuses pour traiter les fermentescibles. C’est ainsi qu’à Béziers a été autrefois construite une usine de tri-compostage  dite UVOM (Unité de valorisation des ordures ménagères) Il a fallu démolir l’UVOM en raison de ses très mauvaises performances et une autre usine, dénommée VALORBI, a été construite. La chambre régionale des comptes, dans son rapport définitif de mars 2019, observe que VALORBI, construite sur l’emplacement de l’UVOM, a des performances encore plus mauvaises que l’UVOM. Bravo !

Pendant des années d’autres industriels ont séduit de nombreux élus en leur vantant la torche à plasma, une invention de la NASA étatsunienne. Moyennant une chaleur de plusieurs milliers de degrés la torche à plasma était réputée transformer tous les déchets organiques en un gaz énergétique commercialisable comme combustible. Mais ce système a montré ses impasses. Rejeté par l’administration préfectorale elle-même, Il est tombé dans l’oubli.

A Montpellier les élus, séduits par une autre publicité industrielle, ont construit à grands frais une usine dite de « méthanisation ». On appelle ainsi les usines productrices de biogaz, un gaz à la fois puant, explosif et toxique, appelé autrefois grisou dans les mines de houille. L’usine de Montpellier, appelée Amétyst, est tristement célèbre pour ses nombreux déboires : insupportables nuisances pour le voisinage (puanteur et nuages de mouches), incendies dont un a détruit une grande partie de l’usine, accidents divers, une intoxication à l’ammoniac qui a nécessité l’hospitalisation de plusieurs salariés, etc. Nullement dissuadé par les résultats désastreux des usines de méthanisation françaises et étrangères, le SICTOM (syndicat intercommunal) de Pézenas-Agde a résolu de construire à son tour une usine de méthanisation. Devant le coût pharaonique de ce projet, le SICTOM cherche des partenaires susceptibles de cofinancer le chantier. Il essaie d’entraîner l’agglo Béziers-Méditerranée dans cette aventure.

Comment trier les déchets ?

Le premier tri est celui que font les ménages en jetant leurs résidus dans diverses poubelles ou dans divers conteneurs . Ce tri domestique est indispensable pour éviter que se mélangent inextricablement toxiques, fermentescibles et autres résidus. La qualité de ce tri domestique conditionne le succès de toutes les filières de valorisation en aval.

Après quoi les collectivités doivent choisir, (notamment pour papiers, cartons et emballages divers) entre une chaîne de tri manuel et une chaîne de tri industrielle où le travail est effectué par des machines.

Dans l’UVOM d’abord puis dans VALORBI les élus biterrois ont choisi le machinisme : des cribles sélectionnent les déchets en fonction de leur taille ; un aimant prélève les métaux ferreux ; un courant de Foucault capte les objets en aluminium . Sur une surface inclinée on laisse tomber les déchets pour séparer les corps durs qui rebondissent et les corps mous qui s’écrasent. Dernière innovation : le tri optique . Il est effectué par des automates capables de distinguer plusieurs catégories d’objets en fonction de leur structure moléculaire . On peut ainsi séparer 2 ou 3 familles de matières plastiques. Mais au total VALORBI ne peut effectuer qu’un tri grossier qui laisse beaucoup de débris indésirables dans la fraction destinée au compostage. D’où un compost médiocre, toxique et souvent invendable.

Dans une chaîne de tri manuel un tapis roulant transporte les déchets et passe entre 2 haies de salariés. L’un attrape au passage et entasse près de lui les papiers et cartons. Un autre prélève les emballages en verre, un autre les emballages métalliques, etc. Le tri manuel est préférable à tous égards. En effet il crée des emplois pour travailleurs non qualifiés, c-à-d la catégorie de salariés les plus frappés par le chômage. Il coûte beaucoup moins cher en investissements que le tri industriel. Enfin les performances du tri manuel sont nettement supérieures. En effet seul le regard d’un être humain est capable de distinguer du papier-carton recyclable et du papier-carton sulfurisé, paraffiné ou plastifié et donc non recyclable, une boîte de conserve vide et une boîte contenant des résidus organiques qu’il faut extraire, un débris de bouteille en verre et un fragment de vitre , un inoffensif flacon de détergent et un flacon de médicament dangereux, etc. Bref le tri manuel est beaucoup plus fin, beaucoup plus efficace que le tri industriel.

C’est pourtant le tri industriel qui est presque toujours préféré par nos élus… et par la préfecture. Pourquoi cette préférence totalement irrationnelle ?

Les encombrants

On appelle « encombrants » les déchets ménagers trop volumineux pour entrer dans une poubelle. Un canapé, un lave-linge, un téléviseur mis au rebut sont des encombrants.

Certains encombrants sont déposés par leurs propriétaires en déchetterie. D’ autres sont abandonnés sur les trottoirs. Dans les 2 cas, c’est la collectivité territoriale qui les prend en charge. D’autres encombrants sont confiés aux filières R.E.P. (responsabilité élargie des producteurs) c-à-d aux industriels qui ont fabriqué ces objets. Dans tous les cas qui précèdent, qu’il s’agisse de meubles ou d’électroménager, les biens mis au rebut ne sont jamais réparés pour vivre entre d’autres mains une deuxième vie. Au mieux ( filières REP) ils sont détoxiqués puis démolis pour devenir simples matières premières.

Ainsi près de Béziers l’installation industrielle privée appelée « Valorsys » reçoit beaucoup d’ encombrants ménagers. Quand ils contiennent des composants toxiques ils ne sont jamais détoxiqués. Certains sont encore en bon état (lits d’enfants, landaus, trottinettes, chevaux à bascule, meubles démodés, etc) et pourraient vivre une seconde vie. Ils sont pourtant systématiquement détruits. Les débris métalliques sont vendus pour recyclage à des entreprises métallurgiques. Le bois des meubles, après broyage, est bien peu réutilisable vu que, faute de tri, ce broyat mêle inextricablement du bois sain et du bois empoisonné par des traitements contre les insectes xylophages.

Si vous voulez vous défaire d’un meuble ou d’un appareil électroménager, le mieux est de le vendre (vide-grenier, brocante) ou de le donner (à des amis ou à des associations telles qu’Emmaüs, Secours populaire, etc). Il manque souvent une recyclerie-ressourcerie qui pourrait recevoir, trier, réparer et remettre sur le marché les encombrants qui actuellement sont déposés en déchetterie, abandonnés sur les trottoirs ou envoyés à Valorsys. Dans ce cas aussi la filière artisanale, financièrement moins coûteuse, créatrice d’emplois locaux, économe en transports et en ressources naturelles est de loin préférable aux filières industrielles.

Conclusion

Les techniques industrielles sont en train de se discréditer, notamment dans 2 secteurs : la pêche et l’agriculture. Il est désormais reconnu que la pêche industrielle (bateaux usines, filets immenses, etc) épuise les ressources océaniques et que seule la pêche artisanale est à la fois durable et créatrice d’emplois. L’agriculture industrielle (pesticides, OGM, destruction de la biodiversité agricole au profit des variétés les plus productives, élevages concentrationnaires en batterie et hors sol, aliments ultra-transformés, etc) est elle aussi discréditée au profit de l’agriculture artisanale dite aussi paysanne ou familiale. En revanche, dans la gestion des déchets, l’industrie reste encore prestigieuse alors que, pour les déchets aussi, les techniques artisanales sont à tous égards préférables.

D’autres considérations sont aussi à retenir :

La loi N° 75-633 du 15 juillet 1975 relative à la gestion des déchets (modifiée par la loi N° 92-646 du 13 juillet 1992) se donne 4 objectifs. Le 2ème est « d’organiser le transport des déchets et de le limiter en distance et en volume ». Ainsi dès 1975 la loi exigeait que les déchets voyagent le moins possible. Cette exigence est aujourd’hui renforcée par le souci de protéger le climat en réduisant le camionnage producteur de CO2 et donc en réduisant les transports de déchets. Or les installations industrielles, parce qu’elles coûtent très cher, ne peuvent être rentabilisées que par un vaste secteur de collecte. Ainsi pour amortir les dizaines de millions d’euros investis dans l’UVOM-VALORBI, l’agglo biterroise traite dans cette usine les ordures de plus de 50 communes qui vont du littoral méditerranéen jusqu’aux confins du Tarn. Seules les techniques artisanales, parce que bon marché, respectent le principe de proximité, le champion étant le compostage domestique qui ne coûte rien et supprime totalement les transports.

Ajoutons que les grands regroupements de communes conduisent à privatiser les services publics. En effet gérer les déchets d’ une petite commune rurale autonome est facile. Mais dans un vaste regroupement supracommunal comme le SICTOM de Pézenas -Agde (environ 60 communes) ou la métropole de Montpellier la gestion des déchets devient pour les élus une charge écrasante et ils sont enclins à s’en débarrasser en confiant cette lourde corvée à une entreprise privée moyennant une délégation de service public. De leur côté les industriels, peu intéressés par les ordures d’une petite commune isolée, sont au contraire alléchés par le juteux marché que constituent les poubelles d’une vaste collectivité. C’est pourquoi dans une grosse collectivité tout concourt à la privatisation des services publics locaux et tout concourt aux grandes installations industrielles.

Robert CLAVIJO

Comité biterrois du MNLE

(Mouvement national de lutte pour l’environnement)

Photo d’usine de tri mécanobiologique

Feuilleton du printemps – Episode 5 : L’incinération des déchets

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L’INCINERATION DES DECHETS
UNE PRATIQUE A EVITER

L’incinération, très répandue en France, présente des inconvénients nombreux et graves :
                            a- Elle contribue au réchauffement climatique.
Pendant l’incinération le carbone des déchets se combine à l’oxygène de l’air pour donner du C02. Brûler des ordures ménagères riches en carbone (matières plastiques, papier et carton, résidus de cuisine, de repas et de jardin) , c’est produire de grandes quantités de C02, principal gaz à effet de serre. Un méfait envers le climat.
                            b- Elle porte gravement atteinte à notre santé .
A partir d’ordures peu ou pas toxiques, l’incinération génère d’innombrables polluants qui contaminent l’air, le sol et les eaux. En effet au cours de la combustion, des molécules se décomposent pour former d’autres molécules, différentes des premières. Les ordures ménagères contiennent des substances de toute sorte et leur recombinaison au hasard dans un incinérateur donne naissance à des composés chimiques très divers. Beaucoup d’entre eux sont très toxiques, comme les organochlorés et, parmi eux, furanes et dioxines. Les dioxines sont de redoutables dérégulateurs hormonaux. Très solubles dans les matières grasses (viande, lait, etc.), chimiquement très stables et nocives même à très faible dose, elles s’accumulent dans la chaîne alimentaire au sommet de laquelle se trouve l’homme.
Sur les milliers de molécules recensées dans les fumées d’incinérateurs, quelques-unes seulement sont soumises à des limitations et à des contrôles réglementaires.
Prétendre que seuls les vieux incinérateurs sont polluants est une contrevérité. Les usines modernes se contentent, pour toute dépollution, de filtrer les poussières et les dioxines, de désacidifier les fumées, de désodoriser les rejets gazeux et de traiter les oxydes d’azote. Cela n’empêche pas l’émission de nombreuses molécules toxiques dans l’environnement . Certes à la température de 850 degrés pendant 2 secondes exigée par la réglementation la plupart des gaz toxiques sont décomposés en gaz inoffensifs mais comment empêcher que se reforment des molécules nocives très variées pendant la phase de refroidissement et de condensation des gaz APRES le traitement et HORS de l’usine?
De plus l’incinération fabrique des poussières. Les plus fines (dimension inférieure à 2,5 microns) sont particulièrement dangereuses : elles passent à travers les filtres de l’usine d’incinération puis franchissent la barrière pulmonaire. Elles sont à l’origine de maladies respiratoires et s’introduisent dans le sang générant à terme diverses maladies et des cancers. Ces particules ultrafines ne sont pas contrôlées aujourd’hui.
Parce que les déchets ménagers contiennent tout et n’importe quoi, leur combustion équivaut à brûler une matière inconnue. On déclenche ainsi des réactions chimiques inattendues et incontrôlables. Par effet cocktail les pires polluants peuvent se former et s’échapper de l’usine.
Le professeur Charles Sultan, spécialiste d’endocrinologie au CHU de Montpellier, estime qu’il est suicidaire de vivre à proximité d’un incinérateur. Pas moins.
Voici comment s’exprime le professeur Dominique Belpomme, cancérologue mondialement connu : Autour des incinérateurs « une surveillance épidémiologique montre chez les habitants des pathologies cardiovasculaires accrues liées aux particules fines, aux vapeurs de soufre et d’azote. Le taux de cancers augmente largement. Il y a des malformations cardiaques chez les enfants. On note aussi une chute de la fertilité des couples dans les vingt kilomètres avec une baisse de la natalité » (Midi libre du 18 juin 2015, édition de Lunel).
L’association pour la recherche thérapeutique anticancéreuse écrit que l’incinération « est une méthode de traitement des déchets unanimement condamnée par les autorités scientifiques internationales… Il faut se représenter tout incinérateur comme un brûlot géant émettant de très nombreuses poussières, en particulier des particules fines extrêmement toxiques et de plus, véhiculant des milliers de substances chimiques…L’utilisation de filtres ne constitue aucune protection efficace contre les milliers de substances CMR (cancérigènes, mutagènes et reprotoxiques) qu’émettent les incinérateurs ».
                           c- Elle contribue à l’épuisement des ressources naturelles
Les concepts de développement durable et d’économie circulaire exigent tous deux le recyclage intégral de tous nos déchets et excluent l’incinération qui transforme des matières premières souvent précieuses en cendre et en fumées définitivement inutilisables.
                           d- Elle multiplie la quantité des déchets.
Sans oxygène on ne peut rien brûler . En effet toute combustion est une réaction chimique au cours de laquelle les combustibles se combinent avec de l’oxygène pour former des oxydes. Dans un four d’incinérateur le carbone devient oxyde de carbone (C02) le soufre devient oxyde de soufre (SO2) l’azote devient oxyde d’azote (NOx) etc. Certaines matières, rebelles à l’oxydation par le feu (ferraille, cailloux, verre) sortent de l’incinérateur sans avoir été altérées.
Pour trouver l’oxygène dont il a besoin l’incinérateur est contraint de consommer une grande quantité d’air. L’atmosphère en effet ne contient que 21 % d’oxygène. Le reste est presque uniquement de l’azote. Pour incinérer c-à-d pour oxyder entièrement une tonne de déchets il faut donc utiliser environ 5 tonnes d’air. En réalité on en consomme davantage car l’azote atmosphérique, au lieu de se tenir en dehors de la combustion, s’oxyde plus ou moins lui aussi, diminuant de ce fait l’oxygène disponible pour les déchets qu’on veut incinérer. Cette oxydation de l’azote atmosphérique s’observe facilement. Ainsi l’essence des moteurs d’autos et de camions est un hydrocarbure qui ne contient pas d’azote. Pourtant les gaz d’échappement de ces véhicules contiennent du dioxyde d’azote (NO2). C’est pourquoi les incinérateurs d’ordures ménagères pour brûler une tonne d’ordures consomment environ 6 tonnes d’air Cet air se pollue au cours de la combustion et devient fumée toxique. Puisqu’une tonne de déchets devient 6 tonnes de fumée, on conclura que l’incinération, loin de réduire la quantité des déchets, la multiplie par 6. Mais ce n’est pas tout.
La réglementation exige que la fumée, en raison de sa toxicité, soit traitée avant évacuation par une cheminée. Pour ce traitement on utilise divers réactifs. L’incinérateur de Béziers utilise bicarbonate, charbon actif et ammoniac. Tous ces réactifs incorporent les polluants qu’ils retirent des fumées et deviennent ainsi eux aussi déchets toxiques. Au total pour brûler une tonne de déchets un incinérateur produit environ 7 tonnes de déchets (cendres, fumée et réactifs). Or le premier objectif de toutes les lois relatives aux déchets est de réduire la production de déchets. Puisque l’incinération accroît la quantité et la toxicité des déchets elle devrait être interdite. Elle le sera un jour mais le lobby industriel a jusqu’ici réussi à empêcher cette interdiction.
                                         e- Elle viole la directive-cadre européenne N° 2008/98/C.E.
Rappelons que cette directive classe les divers traitements de déchets par ordre de préférence. Elle préconise la prévention, le réemploi et le recyclage. Elle déconseille incinération et mise en décharge. Une T.G.A.P. (taxe générale sur les activités polluantes) est prélevée par l’Etat sur incinérateurs et décharges. L’Etat reconnaît ainsi officiellement que ces 2 pratiques sont polluantes. La fonction de la T.G.A.P. est de s’alourdir au fil des ans jusqu’à devenir financièrement insupportable afin d’abolir progressivement ces 2 mauvaises pratiques.

                                        Pour le comité biterrois du MNLE Robert CLAVIJO

Energie, « transition » énergétique, service public

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Energie, « transition » énergétique, service public

Par Jean Claude Boual

1) L’énergie n’est pas une production industrielle spécifique. Elle est à la base du développement économique passé et actuel. La société industrielle est née et s’est développée à partir de l’utilisation de sources d’énergie de plus en plus performantes (énergie humaine, animale, naturelle (vent et hydraulique), charbon, pétrole, gaz, nucléaire). Sa production relève d’une industrie bien spécifique dont dépendent toutes les formes d’activités humaines et toutes les productions industrielles, agricoles ou de services. Les investissements y sont extrêmement lourds, tant pour la production que pour la distribution.

Sa production et son utilisation conditionnent en grande partie le fonctionnement des sociétés futures, c’est pourquoi les débats la concernant ne peuvent être de même nature que pour d’autres productions (automobile, alimentation ou vêtements par exemple). Or pratiquement toujours les débats sur l’énergie sont de même nature que ceux pour ces autres productions, ce qui explique le débat de caractère religieux pour ou contre le nucléaire ou les renouvelables ou renouvelables contre nucléaire.

2) La question de l’énergie touche à l’indépendance nationale et à la continuité de la vie en société. C’est pourquoi l’État doit assurer la continuité de l’approvisionnement de toutes les sources d’énergie (réserves stratégiques pour ce qui est stockable, continuité du service confié à EDF (fournisseur de dernier recours pour l’électricité).

3) L’utilisation depuis 200 ans des énergies fossiles (charbon, pétrole, gaz) est à l’origine des dérèglements climatiques que nous connaissons aujourd’hui. Les travaux scientifiques du GIEC notamment l’ont largement établi et pratiquement personne ne le conteste aujourd’hui, d’où les politiques dites « de sortie des énergies fossiles » d’ici 2050 et de décarbonation de l’industrie et de neutralité carbone à cet horizon. Toutefois en 2050, l’humanité utilisera encore au moins 40 % d’énergie fossile dans sa consommation totale d’énergie, et il est probable qu’elle ne pourra pas s’en passer encore avant longtemps, même si les objectifs fixés lors de la COP-21 sont atteints ce qui est fort peu probable vu la trajectoire actuelle. La « transition » demande des investissements très importants (20 à 25 milliards/an pour la seule électricité par exemple, et bien plus si l’on raisonne de manière holistique)

4) Toutes les projections sérieuses prévoient une augmentation de la consommation d’énergie dans les décennies à venir (au niveau national, européen comme mondial). Dans ces conditions les injonctions de sobriété énergétique, d’économie d’énergie et même d’efficacité énergétique ne sont le plus souvent que des affirmations sans réel contenu, pour faire croire que des solutions simples existent et que « nous savons faire », elles cachent souvent la recherche d’une justification du maintien d’une position sociale avantageuse. Même si ici ou là des progrès sont constatés, ces affirmations relèvent plus de la pensée magique que de la réalité.

5) Les lois de la physique ne peuvent être ignorées dans les choix que nous avons à faire. Les deux premières lois de la thermodynamique nous apprennent que nous ne pouvons créer de l’énergie, mais seulement la transformer et que toute utilisation se fait avec des pertes et des détériorations (entropie) qui implique des renouvellements périodiques et inévitables des installations, que la dite « économie circulaire » ne résout pas. Bien entendu des progrès technologiques sont toujours possibles et réalisés, mais les lois fondamentales demeurent et il faut (ou il faudrait) en tenir compte dans les débats et les choix à effectuer.

Pour l’électricité dont l’usage est appelé à se développer, elle ne se stocke pas ou dans des conditions faibles et coûteuses (en matériaux et en capitaux) qui subsisteront, qu’elle se transporte avec des pertes en ligne qui augmentent avec la distance et qu’il faut la produire à partir d’une énergie primaire. Ce sont peut-être des banalités mais peu en tirent les conséquences industrielles, économiques, sociales et écologiques qui en découlent et font dans les débats comme si tout cela n’existait pas.

6) De cela découlent des technologies différentes selon les sources primaires d’énergie, tout n’est pas possible dans les savoirs et savoirs faire actuels. La « désindustrialisation » qui résulte de choix politiques a entraîné des pertes importantes de savoirs et savoir-faire industriels. Aujourd’hui il manque plusieurs milliers d’ingénieurs, techniciens et chercheurs dans le domaine énergétique. La formation et l’embauche de ces personnels ne peuvent être absentes des débats et dispositions à prendre dans une politique énergétique nationale. Il en est de même de l’organisation des filières industrielles et notamment la sous-traitance dans l’entretien et la relocalisation d’usines sur le territoire national.

7) La géographie joue aussi un rôle déterminant dans les choix qui peuvent être faits, le pétrole n’est pas présent partout dans le monde (aucune source ne l’est dans les mêmes conditions, ni l’eau, ni le vent, ni le soleil). Les choix doivent forcément tenir compte de ces conditions, ce qui est possible ici ne l’est pas forcément ailleurs, c’est particulièrement vrai pour les renouvelables (solaire, éoliennes, hydraulique…). Les comparaisons souvent hâtives entre pays doivent donc être nuancées.

8) Dans ces conditions il n’y a pas de solution miracle, tout est affaire de choix politiques, donc de rapport de force aussi, avec des intérêts contradictoires. Croire qu’il suffit d’annoncer des catastrophes si telle ou telle solution n’est pas mise en œuvre relève d’une démarche dogmatique sans consistance. Sur ce point nous souffrons d’un handicap aujourd’hui difficile à surmonter, l’écologie politique comme associative s’est bâtie sur l’opposition religieuse au nucléaire, ce qui empêche un débat rationnel non seulement sur le nucléaire mais sur toutes les sources d’énergie et les implications sociales, économiques, écologiques. Je précise que je ne suis pas un fanatique du nucléaire, mais dans les conditions actuelles à tous les niveaux (national, européen, mondial) nous ne pouvons l’écarter par un simple « je suis contre le nucléaire ». Je parle du nucléaire civil, pas militaire, même si les deux sont souvent liés, ce qui pose aussi la question de leur découplage.

C’est pourquoi les choix après débats doivent s’effectuer sur des bases aussi rationnelles et dépassionnées que possible.

9) Le « mix énergétique » est de la responsabilité des pays. L’Union européenne organise le marché de l’énergie. Cependant les réseaux nationaux sont interconnectés et les échanges entre eux (entre pays) sont nombreux dans le cadre du marché européen (j’y reviendrai dans un point suivant), mais le seraient en tout état de cause pour faire face à des aléas (sous production temporaire, catastrophes naturelles…) ; les directives européennes « organisent » le marché des énergies, les objectifs et le rythme de décarbonation sont fixés à ce niveau. En fait tout cela pèse aussi sur le mix énergétique.

Et, c’est ce marché pour l’électricité notamment qui pose problème, encore plus avec la transition énergétique nécessaire.

Il ressort de ce qui est dit ci-dessus :

1) qu’il n’y a pas de solution miracle aux questions énergétiques auxquelles nos sociétés dites « développées » ont à faire face dans le cadre de la décarbonation de nos économies. Toutes les sources de « renouvelables » ont leurs inconvénients et leurs limites (éolien terrestre ou maritime, solaire, méthanisation, hydraulique, biomasse, hydrogène), il en est de même pour le nucléaire. Toutes rencontrent des oppositions dès lors qu’il s’agit de les implanter sur un lieu donné. Toutes ont leurs lobbyistes qui tous prétendent que la solution qu’ils préconisent est la meilleure, voire la seule possible, et veulent développer prioritairement leur industrie. On peut établir la liste des inconvénients et limites de chacune de ces sources, mais ça ne permettra pas de dégager une ou deux solutions applicables partout, les choix ne dépendent pas que d’une hiérarchisation arbitraire de ces limites et inconvénients (chacun voit midi à sa porte) ;

2) que l’organisation sociale future dépend en grande partie des choix énergétiques et politiques qui y sont liés. La décarbonation ne peut être séparée des questions sociales et des systèmes de production des biens et services, chaque mesure, chaque disposition doit intégrer toutes ces dimensions ; il est illusoire de mettre en œuvre une mesure (fiscale par exemple) et de « compenser» avec des « aides » pour une partie de la population. Cette forme d’assistanat ne fonctionne pas (cf. les gilets jaunes, ou le chèque énergie pour compenser pour les familles en difficulté en raison de l’explosion des prix de l’énergie). Dans les débats actuels, et dans les scénarios qui ont été présentés à la fin de l’année dernière (Négawatt, RTE, ADEME), aucun ne traite de ces questions, aucun n’a une vue holistique de la question, il en est de même pour les partis politiques et les organisations de la société civile, ce qui donne un débat sans débats, avec des positions arrêtées et dogmatiques.

3) la « sobriété énergétique » et la « sobriété en général » est un vrai sujet dans la mesure où elle est présentée comme la solution la plus efficiente (« les seuls KW/H qui ne polluent pas sont ceux que nous n’utilisons pas »), ce n’est pas faux mais un peu court. Les solutions préconisées pour arriver à la diminution des rejets de CO2 (deux tonnes/personne en 2050 alors que chacun de nous en rejette aujourd’hui 11 tonnes en France) qui consiste à établir des « quotas » individuels avec un marché carbone ou carbone/matière, sorte de deuxième monnaie, ne peut que faire supporter cette diminution (inatteignable sans doute) par les plus pauvres par des moyens coercitifs et totalitaires pour une austérité comme nous n’en avons pas encore connue. L’expression « sobriété » énergétique ou écologique, heureuse ou acceptée etc. n’est que le substitut acceptable d’austérité.

Or il y a des illusions (des utopies) problématiques qui se font jour, l’étude « boboïste » d’Alternatiba,  « Vision pour l’Île de France demain » proposée par un groupe de travail d’Alternatiba Paris est tout à fait éclairante de la « naïveté politique » de beaucoup de jeunes pourtant très mobilisés sur les questions écologiques.

Bruno Latour et Nikolaj Schultz, préconisent la création d’une « nouvelle classe écologique » regroupant quasiment tout le monde et transcendant les classes sociales, en s’appuyant sur Marx et le matérialisme, théorisant leur proposition et appelant à un effort intellectuel du type de celui fait par les socialistes ou les libéraux les siècles passés (effort qui est effectivement indispensable).

Service Public

L’option service public parait la seule sérieuse dans ces conditions, encore faut-il s’entendre sur ce que nous attendons par là car il ne suffit pas d’affirmer que nous sommes pour « un grand service public de l’énergie » ou un « service public de l’électricité ou du gaz «  pour être compris et mobiliser. Il ne suffit pas non plus d’affirmer que « le marché de l’électricité ne marche pas » encore faut-il le démontrer et pour cela en connaître les ressorts et son « organisation », ou sa « désorganisation ». Il ne suffit pas d’affirmer qu’il faut sortir l’électricité du marché, il faut préciser le chemin emprunté, avec qui notamment dans le cadre européen. Il n’y aura renouveau du service public que sur des bases théoriques solides.

Le service public de 1945 a été complètement désarticulé et détruit par la libéralisation et la privatisation partielle de l’électricité et la libéralisation puis la privatisation du gaz suite à l’Acte Unique des Communautés européennes (aujourd’hui Union Européenne), tous les gouvernements français de droite comme de gauche ayant participé avec gourmandise à ce processus. Rêver à le reconstruire est une utopie stérile.

Pour reconstruire un (ou des) service public dans l’énergie, à mon sens plusieurs conditions sont à réunir :

i) comprendre comment fonctionne le marché de l’énergie en sachant que le marché de chaque source est différent. Le pétrole, le gaz, le charbon se stockent, l’électricité ne se stocke pas et le réseau doit être en permanence équilibré, pour l’organisation du marché c’est fondamental, il faut démontrer les effets de cette différence ; il faut sortir des dogmes économistes qui considèrent (aussi bien les orthodoxes que les hétérodoxes), à l’instar de Milton Friedman que « … du point de vue économique : vous devez séparer l’économie du point de vue physique des choses », c’est la démarche exactement inverse de toute démarche écologiste, mais c’est celle qui domine en économie et dans les gouvernements, mais aussi dans toutes les organisations et réseaux qui se réclament de l’écologie sans exception1 ;

ii) il faut définir le périmètre à donner au service public– « service public de l’énergie », « service public de l’électricité », « service public du gaz », ce n’est pas la même chose et en tout cas la même organisation et gestion, aussi bien pour les usagers que pour le personnel ;

iii) il n’est pas possible aujourd’hui de définir un nouveau service public de l’énergie, l’électricité, le gaz ou le pétrole sans connaître les directives et politiques de l’Union européenne en la matière et travailler et débattre de la stratégie à adopter notamment vis-à-vis de la concurrence. Aujourd’hui les grandes entreprises françaises de l’énergie (EDF, Engie, Total….) sont toutes des multinationales avec une activité à l’international et dans les autres pays de l’UE. Peut-on imaginer une entreprise de service public en monopole sur son territoire national et faisant la concurrence dans les autres pays de l’UE ? Peut-on imaginer un service public européen dans ce secteur, à quelles conditions politiques et de rapport de force, quel type d’organisation ?

iv) la nationalisation est toujours possible, mais à l’expérience est-ce bien la solution, que pourrait être une socialisation (cf. la sécurité sociale d’origine), quel rôle pour les communs dont il est beaucoup question en ces temps ? L’articulation service public/commun est encore dans les limbes y compris au plan universitaire et théorique ;

v) les technologies ont évolué, renouvelables (éolien, solaire, biomasse, méthanisation, nucléaire), ce n’est pas sans conséquences sur l’organisation et la « gouvernance » du service public ;

vi) quel rapport de force, quel échelon territorial ? Les choix impacteront inexorablement la conception du service public ; enfin, comment mener la bataille pour avec le maximum de « citoyens » et pas seulement contre (Hercule), ne pas réduire le débat à renouvelables versus nucléaire. Si l’Écologie politique (les Verts) ne décolle pas c’est peut-être aussi parce que les gens ont le sentiment qu’on les enfume.

1Seuls quelques rares économistes, plus que marginalisés, ont rompu avec cette doctrine en intégrant les questions de limites et de thermodynamique.

Énergie : l’hydrogène en question

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L’HYDROGÈNE EN QUESTION : RÉPONSES DE JEAN GAY

AUX INTERROGATIONS DE CHRISTIAN CHASSEAU

Christian CHASSEAU :

Parmi les nombreuses questions concernant les énergies du futur, nombreux sont les acteurs misant sur l’hydrogène.

Outre les industries actuelles qui en ont besoin, et qui doivent « verdir » leur production, les gaziers veulent en introduire dans les réseaux de gaz, les électriciens souhaitent en faire un vecteur de stockage pour faire face à l’impossibilité de piloter la production électrique des éoliennes et des capteurs solaires photovoltaïques, les transporteurs (rail ou route, naval et même aérien) souhaitent aussi développer les piles à combustibles….

S’il se dit que l’hydrogène existe en quantité quasi infinie dans la nature, il est rarement isolé et il n’est pas simple de le « cueillir » auprès des sources connues. Aussi faut-il le fabriquer. La façon la plus vertueuse étant l’électrolyse de l’eau, se posent diverses questions que je ressens ainsi :

QUESTION 1 : l’eau étant une denrée appelée à devenir rare dans certaines contrées, peut-on décemment penser que l’on peut s’en servir pour fabriquer de l’hydrogène ?

Réponse de Jean GAY :

  • 1 kg d’hydrogène a besoin de 16 kgs d’oxygène pour bruler et de 9 litres d’eau pour être produit par électrolyse qui décompose l’eau en Hydrogène et oxygène avec un rendement de 60%)

Conclusion du calcul :

Pour alimenter en H2 par électrolyse dans un format maximal de l’ensemble du parc véhicule transport, diesels navires et avions , ce calcul du format maximal indique qu’il faudrait consommer pour l’électrolyse 126 millions de m3 d’eau .

D’autres formats dans d’autres hypothèses évoluent entre de 100 à 215 millions de m3 d’eau

En comparatif des 5,5 milliards de mètres cubes d’eau par an que la France consomme : ça parait possible

Explication calcul

Pour fixer les idées :

Prenons le format MAXIMALISTE des besoins en eau pour l’électrolyse de la production d’hydrogène qui concernerait l’ensemble des véhicule léger lourds autocar (46 millions) et pour l’ensemble des diésels avions navires ;

Il faut 52 millions de tonnes d’hydrocarbure carburants. /an pour la France entre « essence gaz oil fuel léger fuel lourd navire et diesel carburéacteur avion ».

Sur cette base maximaliste, pour tout carburant « hydrogène » ;

Avec 9 litres d’eau pour 1 kg d’hydrogène par électrolyse et 3000 litres d’hydrogène correspondant à 1 litre d’hydrocarbure :

Il faut 3 millions de litres d’H2 pour 1 m3 de carburant hydrocarbure

Soit 52 millions de m3 carburant* 3 millions de litres d’H2 =156 mille milliards de litre d’H2 par an.

Sur la base que 1 litre d’H2 pèse 0,090 grammes, les 156 mille milliards de litres d’H2 pèsent 14 milliards de Kgs

Comme 1kg d’H2 a besoin de 9 litres d’eau pour être fabriqué par électrolyse, le format maximaliste des besoins en eau pour alimenter en H2 l’ensembles des véhicules légers lourds diesel navires et avion se situerait autour de :

14milliards de kgs *9 litres d’eau =126 millions de m3 d’eau

NB Le signe * est le signe multiplicatif

QUESTION 2 : Peut-on électrolyser l’eau de mer, qui, elle, ne devrait pas manquer avec le rehaussement des niveaux ? Quelles conséquences pour les électrolyseurs, et que faire des résidus ?

Réponse de Jean GAY :

Cette question n’est pas homogène avec le faisceau de réalités communes aux électrolyseurs eau douce et eau de mer, aux quantités d’électricité « verte nécessaire at aux recherches industrielles pour l’électrolyse haute température.

Les technique d’électrolyseur d’eau de mer sont connues et peuvent être mise en œuvre en neutralisant les effets corrosifs du sel avec des anodes, cathodes et membranes spécifiques dès l’électrolyseurs comportant des adjonctions de substances : graphite, oxydes de manganèse, chlorure d’ammoniums, zinc, Chrome, sulfure de Nickel…. Etc….

Rappel Explications

Ce pourrait être une bonne alternative mais pour l’instant, ce processus n’est que peu utilisé.

Le sel doit impérativement être retiré de l’eau avant l’électrolyse, sans quoi les ions chlorure se transformeraient en chlore gazeux toxique, nocifs à la fois pour les équipements et l’environnement.

En outre, la désalinisation est plutôt envisagée et mise en œuvre dans certains pays du golfe

Mais c’est un processus coûteux. Par conséquent, l’eau de mer n’a pour l’instant pas suscité beaucoup d’engouement en matière de production d’hydrogène.

Cependant des chercheurs de l’Université d’État de Pennsylvanie souhaitent explorer cette voie : ils ont réussi à produire de l’hydrogène à partir d’eau de mer.

Afin de se débarrasser du sel, l’équipe a substituées aux membranes échangeuses d’ions typiques des électrolyseurs de très fines membranes semi-perméables héritées du système d’osmose inverse. Ces membranes s’intercalent entre les deux électrodes immergées ; près de l’anode, les molécules d’eau se divisent et libèrent des ions hydrogènes (protons) ; puis ces derniers s’acheminent vers la cathode en traversant la membrane et se combinent aux électrons pour former du dihydrogène.

Un faisceau de réalités communes « eau de mer » et « eau douce » pour l’électrolyse

  • Recyclage, production et souveraineté industrielle

C’est la question des résidus et de leur recyclage après utilisation des matériaux..

Les cathodes et les anodes sont constituées d’un combiné avec les terres et métaux rares (iridium sélénium titane etc.) et des composant comme aluminium, zinc, manganèse, potassium, graphite, dont le recyclage est une obligation quel que soit le type d’électrolyse et dont la production en tant que ressource minière doit être remise en œuvre malgré l’opposition de certains mouvances politiques plus ou moins opposé à la souveraineté de la France dans ce domaine industriel et faisant partie de la sociologie « bobocaviard »

Procéder au recyclage comme à la fabrication des matériaux supports des anodes et électrodes demandent des usines de traitements aux performances industrielles pointues, avec du personnel formé et qui exigent de l’électricité décarbonée pour fonctionner.

  • Quelle quantité d’électricité pour l’électrolyse et la fabrication d’hydrogène ?

Il faut autour de 60 kWh d’électricité pour produire 1 kg d’H2 qui a un pouvoir calorifique (PC) de 33 kWh thermique et produire in finé autour de 13,4 kWh d’électricité finale ( 6 à 18Kwh électrique selon les sources)utile par la pile à combustible avec un rendement global de 25% en recombinant l’eau H2O.

Au global (Electrolyse + PAC), 1 kg hydrogène, fabriqué avec 50 à 60 kWh (selon les sources et la technologie d’electrolyse) d’électricité décarbonée par électrolyse classique (rendement de 50% à 70% selon les techniques) produit au final, avec une PAC (rendement 25%à 50% selon les techniques), entre 6 et 18 KWh électriques utilisables sur les machines et en mobilités (voitures trains) et 3litres d’eau

Il y a un problème d’échelle pour avoir suffisamment d’électricité décarbonnée pour produire l’H2 vert que ce soit avec l’électronucléaire ou les Eoliennes et le photovoltaïque

Avec l’option nucléaire : il faut augmenter de 50% les capacités électronucléaire en les passant de 400 à 700 à750 Térawattheures (milliards de kwh)

Toujours en restant dans le format / hypothèse maximaliste de faire fonctionner à l’hydrogène les 46 millions de véhicules diésels et avions, il faut avoir à disposition 156 mille milliards de litre d’H2 par an soit 14 milliards de kgs d’H2ce qui nécessiterait près de 840 Térawattheures (milliards de Kwh) soit le double de la production actuelle d’électricité par toutes les centrales électriques -avec l’augmentation de 50% de la puissance électronucléaire .

Avec l’option éolienne et photovoltaïque ;

OPTION EOLIENNE : détérioration absolue de l’espace de vie France et aléas du stockage de cette électricité

Selon les calculs que jean Marc Jancovici (polytechnicien et ingénieur expert auprès du gouvernement, publiés sur son site, la production à pleine puissance avoisine pour les éoliennes les 2000 heures par an seulement. Dans ce cas de figure, une éolienne d’1MW aura produit en 365 jours 2 GWh (2000 x 1 MW). En arrondissant par excès à 500 TWh nos besoins en électricité, JM Jancovici considère qu’il faudrait couvrir environ 25 000 km² d’éoliennes dans des zones correctement ventées. D’autres sources (Transitions Energétiques) avancent 30.000 Km2

Cette surface devrait être « arithmétiquement » tripler pour tenir compte du taux de rendement et de fonctionnement de 30% des éoliennes en raison de leur intermittences avec une incertitude pour le stockage de cette production d’électricité devenue supérieure aux besoins à un moment donné, et susceptible d’être remise sur le réseau plus tard

Or les 500.000 km carrés de l’Hexagone présentent 20 % de cette surface protégée des éoliennes avec les distanciations nécessaires (fleuves- aérodromes civils et militaires -besoins de la défense nationale- parcs naturels – montagnes massifs alpins et pyrénéens, zones et parcs protégées -littorales maritimes- Zones urbaines et périurbaines) soit 100.000 kms carrés

Dans ce triplement, les 75000 à 90000 kms carrés d’éoliennes impacteraient alors les 400.000 km2 de territoires restant à vivre soit 18 à 22 % de l’espace territorial à vivre ce qui ne sera pas accepté par les populations ni les élus pour les impératifs économiques et de tourisme en supplément des dégâts occasionnés par le raccordement de ces parcs éoliens au réseau Très Haute Tension d’EDF

OPTION PANNEAUX PHOTOVOLTAIQUES

Une certaine convergence se fait à partir de ce qu’a dit l’économiste Julia Cage le 5 mars 2013 sur le chiffre de 3000 km2 de panneaux nécessaires pour remplacer les 400Twh d’électronucléaire équivalent au département des Bouches du Rhône ;

Mais cette surface se triple pour tenir compte de l’intermittence des Panneaux Photovoltaïques au rendement de 30% ce qui nécessite près de 9.000 km2 de panneaux avec une acceptation incertaine des populations : ce qui représente 3 fois le département du Rhône et dans une incertitude de stocker cette électricité supplémentaire et une industrie à créer pour recycler ces panneaux en fin de vie.

QUESTION 3 : Quelle quantité d’hydrogène peut-on raisonnablement produire à partir des seules sources solaires et éoliennes ? lorsqu’elles produisent au-delà des besoins de consommation directs (possibilités de stockage du genre en « heures creuses » bien que les surproductions de ces domaines de production ne soient pas corrélées justement aux heures creuses des abonnements)

Réponse de Jean GAY :

Cette question concerne en fait la question du stockage et du transport de l’hydrogène et l’électricité renouvelable produite ou non avec l’hydrogène et intègre la façon d’organiser le mix énergétique le plus décarboné possible

Quelles que soient les qualités de l’Hydrogène en tant que combustible et matière première sans gaz à effet de serre il supporte 3 défauts :

  1. Il n’existe pas à l’état naturel comme le Charbon le gaz naturel ou le pétrole : il faut le fabriquer soit par vaporeformage des hydrocarbures sous sa forme carbonée soit par électrolyse sous sa forme décarbonée à condition que cette électricité soit le plus décarbonée possible comme le nucléaire ou les énergies renouvelables.
  2. Dans sa qualité même qui fait de l’H2 le vecteur énergétique qui dispose de la plus grande densité massique en énergie (par kilo il contient 2,2 fois plus d’énergie que le gaz naturel, 2,75 fois plus que l’essence et 3 fois plus que le pétrole), il a un défaut considérable :

C’est le gaz le plus léger avec une très faible densité,

Ce qui et massifie son utilisation.

1 litre d’essence (9kwh thermique) correspond à 3000 litres d’H2 à pression atmosphérique, à 7 litres d’H2 sous 700 bars dans un réservoir de voiture, à 4 litres d’H2 liquide à – 250 °C

En comparatif dans les modes de mobilités thermiques

Pour une voiture moyenne il faut 7 litres d’essence pour 100 kms, ce qui est équivalent à 2kg d’H2 et 49 litres d’H2 gaz dans un réservoir de 700 bars

Avec l’essence : parcourir 600 kms sans refaire le plein, il faut un réservoir d’essence de 42 litres pesant 40 kg plein.

  1. Et ce qui complique son stockage étant très perméable à tous les contenants classiques qui deviennent poreux et le rend dangereux avec son degré d’inflammabilité

Comme tout combustible, l’hydrogène peut s’enflammer ou exploser en cas de fuite. Mais comme il s’agit de la plus petite des molécules gazeuses, les risques de fuites sont plus importants qu’avec n’importe quel autre gaz.

Ce qui entraine 2 effets contradictoires :

  • Risque d’inflammabilité : lorsqu’une nappe d’hydrogène se forme, le risque d’inflammabilité est nettement plus élevé que pour une nappe d’essence ou de gaz. L’énergie requise pour l’enflammer est environ 10 fois plus faible que pour le gaz naturel.
  • Risque de formation d’une nappe explosive : l’hydrogène se disperse plus rapidement que les carburants traditionnels. Il se dilue 4 fois plus vite dans l’air que le gaz naturel et 12 fois plus vite que les vapeurs d’essence. Cette volatilité est un facteur protecteur limitant la formation de nappes d’hydrogène.

Les limites de l’Hydrogène

La production d’Hydrogène par électrolyseur avec l’électricité renouvelable (éolienne et panneaux photovoltaïque) a 2 limites

1ère limite

L’acceptabilité dans la saturation de l’espace territorial en éolienne et panneaux : voir la question N°2

2ème limite : les techniques de stockage et de transport sont en questionnement pour leur maturité

Son stockage lorsque l’équilibre se fait entre consommation/ production d’hydrogène non pilotable (soit en tant que carburant soit en tant que producteur d’électricité ) et que les éoliennes et les panneaux continuent à produire de l’électricité également non pilotable et non permanente ( existence soleil et vent)

Pour l’entreposer, le transporter et le distribuer, il faut soit le liquéfier à une température extrêmement basse (- 253 °C), soit le comprimer à très haute pression (700 bars). Ces opérations sont très énergivores : sa liquéfaction, par exemple, consomme 10 à 13 kWh d’électricité par kg.

Ce qui impose des structures matérielle extrêmement lourdes et couteuses : un réservoir d’hydrogène gaz à 700 bars, équivalent à une réservoir d’essence de 42 litres, pèse 250 kgs .

Les techniques de séquestration de l’hydrogène dans les structures géologiques sécurisées sont en cours d’études sur le site d’Etrez qui est un stockage de gaz naturel en cavités salines. Il est situé au nord-ouest de Bourg-en-Bresse et s’étend sur 5 communes de l’Ain.

A noter

Les stockages souterrains détenus par Engie en France -filiale d’Engie ex Gdf après privatisation, représentent 10 milliards de m3 (répartis entre 14 sites de stockage souterrain dont 9 en nappes aquifères, 4 en cavités salines et un en gisement déplété). A titre indicatif, la consommation annuelle de gaz naturel atteint 42 milliards de m3 en 2013.8

La justification de ces stockages de gaz naturel a été d’équilibrer les approvisionnements / importations de gaz au meilleurs prix de Russie du Nigéria et maintenant des USA avec les fluctuation de consommation entre le 15 Aout et la pointe hiver (rapport de 1 à 10 en débit horaire). Ils permettent de stocker en Eté les quantités de gaz qui seront nécvéssaire en Hiver

La libéralisation par la loi du Marché de la commercialisation du gaz naturel a rendu difficile d’obliger les nouveaux « entrants » gaziers à investir pour remplir les stockages de gaz ce qui tend à ne plus sécuriser la sécurité de distribution du gaz en France. Cette disposition a été malheureusement appuyée par des associations et organismes de défense des consommateurs comme « que choisir » sous le prétexte de constituer des niches d’accès au gaz naturel à de meilleurs prix .

L’H2 peut être mélangé au gaz naturel dans les réseaux gaz naturel haute pression (70 bars) à hauteur de 10 % sans modifier les système d’utilisation de ce gaz mélangée .

A hauteur de 15 à 20 %, le mélange s’appelle Hythane : c’est un nouveau gaz pour le quel tous les systèmes utilisateurs doivent être adaptés.

QUESTION 4 : Quelle quantité d’énergie électrique « verte » est nécessaire pour réaliser ces électrolyses ?

Réponse de Jean GAY : Voir question 2 et 3

Cela dépend des besoins en Hydrogène soit en utilisation directes (réductions chimique dans la sidérurgie et l’industrie, carburant dans l’industrie et la mobilité)

Et les limites sont :

  • Soit la saturation dans l’acceptation des surfaces d’éoliennes et de panneaux photovoltaïques sur les territoires
  • Soit la limite des capacités de production d’électricité décarbonée « électro gaz naturel » et « électron nucléaire » pilotable pour sécuriser les besoins d’électricité en France -situation qui n’est pas du tout garantie pour l’hiver 2022 et dans la période janvier février et mars, dans la conjonction avec 5 sites électronucléaires en arrêt et un anticyclone généralisée su l’Europe .

QUESTION 5 : Où installer ces électrolyseurs, et quels impacts fonciers et en terme d’emploi ?

Réponse de Jean GAY :

La réponse est contenue dans les questions précédentes :

  1. Dans une station-service « hydrogène » sous 700 bars pour véhicule (plusieurs existent à Paris), on ne peut pas l’alimenter comme on alimente une station gaz oil ou essence pour les raisons que TOUTE la quantité d’hydrogène transportés servirait à la consommation au camion qui transporte l’hydrogène sur 300 ou 400 kms …..

L’électrolyseur doit être in situ de la station.

SMT AG

Première station hydrogène connectée à un électrolyseur
dédiée aux transports en commun en France

Un projet précurseur de mobilité zéro émission pour les transports lourds en France. Le Syndicat mixte des transports Artois-Gohelle (SMT AG) lance la première ligne de bus 100 % hydrogène et sa station dédiée, précurseurs de la révolution « mobilité zéro émission », qui se généralise en France, en Europe et à l’échelle mondiale.

QUESTION 6 : Une partie des questions ci-dessus dépend du développement des énergies dites nouvelles et renouvelables. Quel potentiel de développement est attendu aux horizons 2030 puis 2050 ? (je remarque par exemple que de nombreux projets d’éolien sont contestés, de même que, de plus en plus, les projets de centrales photovoltaïques au sol le sont, ce qui me paraît d’ailleurs normal). Je suppose que, dans tous les cas, nous serons loin de pouvoir subvenir aux besoins.

Réponse de Jean GAY :

Les réponses sont à analyser dans le document de référence ci-dessous accessible sur Internet et qui va piloter tout le dispositif « énergie transition énergétique » de la France jusqu’en 2050

DOCUMENTS DE REFERENCE : ACTUALISATION PDH – RE

1° Réactualisation équilibre consommation production RTE EDF Hiver 2022

2° le fondamental Futurs EnergétiquesLes principales étapes de ce processus comprennent :

e sLes principales étapes de ce processus comprennent :

                  • A partir de mi-2019 : Le lancement du processus de concertation organisé en neuf groupes de travail thématiques a réuni plus d’une centaine d’organismes et institutions.
                  • le 27 janvier 2021 : la publication du rapport conjoint entre RTE et l’Agence internationale de l’énergie, intitulé « Conditions et prérequis en matière de faisabilité technique pour un système électrique avec une forte proportion d’énergies renouvelables à l’horizon 2050 ». Le rapport définit les conditions techniques à remplir et liste des priorités pour la suite du programme d’étude.
                  • de janvier à juin 2021 : l’ouverture de la consultation publique sur les futurs scénarios, qui comprend une première description des scénarios et de leurs principales variantes, la description de la grille d’analyse qui leur sera appliquée et les hypothèses principales qui seront utilisées dans l’étude. 4 000 réponses provenant d’institutions, de collectifs ou de particuliers ont été récoltées.
                  • Le 8 juin 2021 : la publication du rapport d’étape de l’étude sur l’évolution du système électrique intitulée « Futurs énergétiques 2050 ». Cette première phase de l’étude a été achevée au premier trimestre 2021. Elle a permis de déterminer les principaux scénarios à étudier selon quatre axes d’analyses : technique, économique, environnemental et d’impact sur les modes de vie.
                  • 25 octobre 2021 : Publication des principaux résultats de l’étude « Futurs énergétiques 2050 ».
                  • 1er trimestre 2022 : En complément des principaux résultats, des analyses approfondies sont prévues au premier trimestre 2022.  Elles permettront d’approfondir certains éléments, notamment les croisements entre scénarios de consommation et de production, et de restituer toutes les variantes et analyses de sensibilité. 

 Neutralité carbone en 2050 : des scénarios contrastés à l’étude

Cette consultation a conduit à la stabilisation des scénarios de production et de consommation électriques permettant l’atteinte de la neutralité carbone à l’horizon 2050. Ces scénarios présentent des traits communs : la diminution de la consommation finale d’énergie, l’augmentation de la part d’électricité, une forte croissance des énergies renouvelables dans la production d’électricité. Ils décrivent en revanche des évolutions contrastées pour la filière électronucléaire ainsi que pour la part, à terme, des énergies renouvelables (EnR) dans le mix électrique.

 Les enseignements de l’étude 

L’étude « Futurs énergétiques 2050 » analyse les évolutions de la consommation et compare les six scénarios de systèmes électriques qui garantissent la sécurité d’approvisionnement, pour que la France dispose d’une électricité bas-carbone en 2050.
Atteindre la neutralité carbone implique une transformation de l’économie et des modes de vie, et une restructuration du système permettant à l’électricité de remplacer les énergies fossiles comme principale énergie du pays.

Sur la consommation

1) Agir sur la consommation grâce à l’efficacité énergétique, voire la sobriété est indispensable pour atteindre les objectifs climatiques ;

2) La consommation d’énergie va baisser mais celle d’électricité va augmenter pour se substituer aux énergies fossiles ;

3) Accélérer la réindustrialisation du pays, en électrifiant les procédés, augmente la consommation d’électricité mais réduit l’empreinte carbone de la France ;

Sur la transformation du mix électrique

4) Atteindre la neutralité carbone est impossible sans un développement significatif des énergies renouvelables ;

5) Se passer de nouveaux réacteurs nucléaires implique des rythmes de développement des énergies renouvelables plus rapides que ceux des pays européens les plus dynamiques ;

Sur l’économie

6) Construire de nouveaux réacteurs nucléaires est pertinent du point de vue économique, a fortiori quand cela permet de conserver un parc d’une quarantaine de GW en 2050 (nucléaire existant et nouveau nucléaire) ;

7) Les énergies renouvelables électriques sont devenues des solutions compétitives. Cela est d’autant plus marqué dans le cas de grands parcs solaires et éoliens à terre et en mer ;

8) Les moyens de pilotage dont le système a besoin pour garantir la sécurité d’approvisionnement sont très différents selon les scénarios. Il y a un intérêt économique à accroître le pilotage de la consommation, à développer des interconnexions et du stockage hydraulique, ainsi qu’à installer des batteries pour accompagner le solaire. Au-delà, le besoin de construire de nouvelles centrales thermiques assises sur des stocks de gaz décarbonés (dont l’hydrogène) est important si la relance du nucléaire est minimale et il devient massif – donc coûteux – si l’on tend vers 100% renouvelables ;

9) Dans tous les scénarios, les réseaux électriques doivent être rapidement redimensionnés pour rendre possible la transition énergétique ;

Sur la technologie

10) Créer un « système hydrogène bas-carbone » performant est un atout pour décarboner certains secteurs difficiles à électrifier, et une nécessité dans les scénarios à très fort développement en renouvelables pour stocker l’énergie ;

11) Les scénarios à très hautes parts d’énergies renouvelables, ou celui nécessitant la prolongation des réacteurs nucléaires existants au-delà de 60 ans, impliquent des paris technologiques lourds pour être au rendez-vous de la neutralité carbone en 2050 ; 

12) La transformation du système électrique doit intégrer dès à présent les conséquences probables du changement climatique, notamment sur les ressources en eau, les vagues de chaleur ou les régimes de vent ;

Sur l’espace et l’environnement 

13) Le développement des énergies renouvelables soulève un enjeu d’occupation de l’espace et de limitation des usages. Il peut s’intensifier sans exercer de pression excessive sur l’artificialisation des sols, mais doit se poursuivre dans chaque territoire en s’attachant à la préservation du cadre de vie ;

14) Même en intégrant le bilan carbone complet des infrastructures sur l’ensemble de
leur cycle de vie, l’électricité en France restera très largement décarbonée et contribuera fortement à l’atteinte de la neutralité carbone en se substituant aux énergies fossiles ;

15) L’économie de la transition énergétique peut générer des tensions sur l’approvisionnement en ressources minérales, particulièrement pour certains métaux, qu’il sera nécessaire d’anticiper ;

16) Pour 2050, le système électrique de la neutralité carbone peut être atteint à un coût maîtrisable pour la France ;

17) Pour 2030 : développer les énergies renouvelables matures le plus rapidement possible et prolonger les réacteurs nucléaires existants dans une logique de maximisation de la production bas-carbone augmente les chances d’atteindre la cible du nouveau paquet européen « -55% net » ;

18) Quel que soit le scénario choisi, il y a urgence à se mobiliser.

 

Photo Comment fonctionne une station hydrogène Christian Chasseau

Énergie : Hydrogène et hydrogène natif

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HYDROGÈNE ET HYDROGÈNE NATIF :

L’ÉTAT DE LA QUESTION

Compilation et Synthèse

André Prone, Géologue expert

le 24 janvier 2022

Comme vous pourrez l’observer, en quelques années, concernant l’hydrogène natif (autre appellation de l’hydrogène naturel), on est passé d’une situation anecdotique à celle d’une recherche opérationnelle et voire à son exploitation. Jusqu’à présent, non seulement la ressource était très mal cernée, mais on pensait qu’elle nécessiterait des conditions de valorisation couteuses en énergie et en investissement. Or il se trouve que certains gisements d’hydrogène natifs, bien que n’étant pas purs à 100%, sont très souvent associés à de l’hélium ce qui réduit singulièrement les coûts de valorisation et laisse penser à un bilan carbone positif. Nous en sommes un peu à la première étape de l’utilisation du pétrole vers 1850 qui s’est faite avant que l’on ait une connaissance concrète des gisements disponibles ; et dont nous n’avons toujours pas fait, d’ailleurs, le tour en plus de 150 ans d’exploitation pétrolière. Si l’on prend l’exemple du gisement d’hydrogène du Mali, en très peu de temps, on est passé du pilote expérimental à l’alimentation en électricité d’une petite ville, puis à une production nationale, pour en arriver à la perspective d’alimenter d’autres pays d’Afrique. Il faut dire que l’hydrogène que contient ce gisement est pur à 97%. Par ailleurs, de nombreuses équipes de recherche (parfois de plus d’une centaine de chercheurs) aussi bien en France que dans d’autres pays européens, mais aussi aux USA, en Australie, en Russie, en Chine, etc., sont opérationnelles. Un congrès international sur l’hydrogène natif s’est tenu à Paris en 2021. Des investissements qui se chiffrent en milliards de dollars sont débloqués par la plupart des Etats. Des projets d’acheminement de l’hydrogène natif par pipeline en sont même au stade d’études avancées. Bref, nous sommes passé de l’atermoiement à la compétition capitalistique et géostratégique de haut niveau concernant ce type de ressource. Attention toutefois que l’emballement ne donne pas à croire que nous avons, à travers l’hydrogène, la possibilité de continuer à produire sans nous soucier des questions environnementales. Nous disposons déjà d’un premier rapport de notre camarade Jean Gay, sur l’hydrogène en général, et lorsque que la commission énergie du conseil scientifique du MNLE aura terminé son travail d’inventaire, nous reviendrons vers vous. En attendant, j’ai rassemblé dans cette note quelques éléments d’information qui devraient nous aider à mieux cerner cet important sujet.

I – COMPILATION ET MISE EN FORME : ETAT DE LA QUESTION

Aperçu général

Petit historique

Impératifs climatiques obligent, la recherche d’énergies alternatives aux carburants fossiles mobilise les chercheurs et les citoyens. Parmi les solutions en vogue se trouve l’hydrogène. L’une de ses premières applications fut son emploi, à partir de 1782, par les frères Montgolfier comme gaz de remplissage de ballons, puis par Jacques Charles qui fit de ce type de ballon -la montgolfière- un observatoire militaire décisif pendant la bataille de Fleurus contre l’armée autrichienne, en 1794.

Dès le début du 19ème siècle, l’hydrogène pénétra de nombreux secteurs industriels, comme la chimie, la pétrochimie et la fabrication des engrais … et même un peu plus tard, en 1874, dans la littérature avec Jules Verne qui fut très séduit par ses propriétés (L’Île mystérieuse). Dans le même temps, l’hydrogène commença à être utilisé dans le domaine énergétique pour l’éclairage public et les applications domestiques (le gaz de ville étant un mélange d’hydrogène et de monoxyde de carbone dans des proportions voisines de 50-50%) dans de nombreux pays, dont la France jusqu’en 1971, avant d’être progressivement remplacé par le gaz naturel.

Depuis, l’hydrogène est de plus en plus utilisé dans divers secteurs industriels, tant pour ses propriétés chimiques que pour ses performances énergétiques.

Mais l’hydrogène c’est quoi ?

C’est l’élément le plus abondant de l’Univers et le principal composant des étoiles et des planètes gazeuses. Ce gaz ne contient pas de carbone et ne pollue pas, il est aussi plus léger que l’air et inodore. Même si on peut le trouver à l’état naturel sur terre, il est généralement combiné avec d’autres atomes tels que l’oxygène dans l’eau (H2O) ou le carbone dans les hydrocarbures (CH4 par exemple). On peut l’extraire par reformage du gaz naturel, ou à partir de charbon et de pétrole. Il est également possible de le produire par électrolyse à partir d’eau et d’électricité et sans émission de CO2. L’hydrogène (H2) est ce qu’on appelle un vecteur énergétique. C’est-à-dire qu’il permet de transporter de l’énergie. Sa combustion permet de produire de la chaleur ou de l’électricité. L’hydrogène permet notamment de stocker les surplus de l’électricité produite par les énergies intermittentes. Il a donc un rôle pertinent à jouer dans la transition énergétique. Cependant son exploitation industrielle nécessite encore de nombreux investissements.

L’hydrogène pour quoi faire ?

Il peut être utilisé pour des applications stationnaires, à travers la production d’électricité et/ou de chaleur dans les bâtiments (principe de cogénération). L’hydrogène peut être utilisé pour faire fonctionner des chaudières ou pour alimenter en courant électrique des data centers par exemple. On l’utilise déjà pour des applications industrielles comme composé chimique, pour le raffinage de l’essence ou pour produire de l’ammoniac (une base des engrais), associé à de l’azote. L’hydrogène est aussi utilisé aujourd’hui pour des applications de mobilité, surtout pour des bus et des véhicules routiers (voitures particulières, utilitaires) et même des vélos. Plus avantageux que la batterie pour les véhicules lourds, il va arriver à bord des camions, des trains et même des bateaux 

L’hydrogène en chiffres

Aujourd’hui, un peu plus de 900 000 tonnes d’hydrogène sont produites et consommées chaque année en France, essentiellement pour deux applications industrielles : la chimie (production d’ammoniac) et le raffinage.

La production d’hydrogène à partir d’hydrocarbures génère environ 10 kg de CO2 par kg d’H2 produit. Ces procédés sont responsables de 1 à 2 % des émissions totales françaises de CO2.

Avec 1 kg d’hydrogène, on peut parcourir 100 km.

Le dihydrogène est une molécule de très petite dimension (37 x 10-12 mètres de « rayon »).

La mobilité hydrogène se développe et est affichée « verte ». Mais l’hydrogène, le dihydrogène en fait, H2, est fabriqué à 95 % en émettant du CO2 à partir d’hydrocarbures ou en les brûlant.

Certains procédés consistent à séparer le carbone de l’hydrogène dans les hydrocarbures (CH4 pour le gaz naturel) d’autres utilisent l’électrolyse pour séparer l’hydrogène de l’oxygène dans l’eau H20, mais avec de l’électricité encore souvent carbonée. À l’inverse, depuis quelques années, on s’intéresse à l’hydrogène « natif », ou « naturel » : celui qu’on trouve dans le sous-sol. Cette source d’hydrogène pourrait-elle être une alternative généralisable ?

L’hydrogène, une nouvelle ressource naturelle ?

Au Mali, un puits foré pour chercher de l’eau s’est avéré sec, mais a fortuitement rencontré de l’hydrogène qui a été mis en production par la compagnie Hydroma.

L’hydrogène natif, quasiment pur dans ce cas, est directement brûlé dans une turbine à gaz adaptée, et produit l’électricité pour un petit village. D’autres puits alentour ont été forés pour essayer de déterminer les réserves, au sens de l’oil & gas, et de changer d’échelle.

Ce succès a fait voler en éclat nombre d’a priori : beaucoup croyaient en effet qu’aucune accumulation naturelle d’H2 dans le sous-sol ne pouvait exister. Le puits initial produit depuis 4 ans sans baisse de pression, ce qui signifie qu’il se recharge en continu.

De plus, les mesures en surface du contenu des sols en H2 ne montrent pas de fuites. Celles-ci étaient plutôt attendues, car la molécule d’H2 est très petite et très réactive, et elle peut donc migrer facilement et se combiner avec d’autres espèces chimiques. Cette découverte au Mali montre qu’il y a des sources, mais aussi des réservoirs et des couvertures qui permettent une accumulation d’hydrogène dans le sous-sol.

D’où vient cet hydrogène ?

Sur Terre, on trouve l’hydrogène combiné à l’oxygène dans l’eau, au carbone dans tous les hydrocarbures et aussi sous forme libre : c’est cet H2 qui pourrait être notre carburant de base de demain. Mais où trouver de l’H2 vert en quantité ? Il y a différentes solutions techniques, l’électrolyse à partir d’électricité verte en est une, une gazéification de la biomasse favorisant l’H2 au détriment du biométhane en est une autre, la production de l’H2 natif pourrait s’avérer la plus efficace. Peuton lespérer à grande échelle ?

Une bonne partie des questions scientifiques liées à la production d’hydrogène naturel restent à éclaircir, mais beaucoup de données suggèrent que l’H2 natif vient des interactions entre l’eau et les roches. Les géologues appellent ça la diagénèse. Exemple de réaction, le fer ferreux (Fe2⁺) contenu dans des roches en contact avec de l’eau s’oxyde en fer ferrique (Fe3⁺), libérant l’H2. L’eau peut être celle de la mer, on observe ces réactions au niveau de toutes les dorsales médio-océaniques, ou celle de la pluie et c’est ce qu’on observe en Islande.

Ce type de réaction peut aussi se faire avec d’autres métaux comme le magnésium ; elle est rapide et efficace à haute température, vers 300 °C, mais est aussi possible à des températures plus basses d’une centaine de degrés. La cinétique de ces réactions fait l’objet de nombreuses recherches.

Autre source de dihydrogène naturel : la radiolyse, qui casse les molécules d’eau en hydrogène et oxygène, grâce à l’énergie de la radioactivité naturelle des roches.

Les estimations de la production d’H2 par ces deux sources, diagenèse et radiolyse, sont importantes, mais encore peu précises : selon les auteurs de quelques pour cent à la totalité de la consommation actuelle d’H₂, soit 70 millions de tonnes par an.

D’autres sources, comme la friction sur les plans de faille et l’activité de certaines bactéries en présence d’une autre source d’énergie, libèrent aussi de l’H2, mais, a priori, en quantités moindres. Ce qu’il est important de noter est que dans tous ces cas, il s’agit d’un flux d’hydrogène, c’est-à-dire une production continue, et non d’une ressource fossile, qui n’existerait qu’en stock fini à l’échelle humaine.

Une autre hypothèse est avancée par certains chercheurs, de grandes quantités de l’hydrogène primordial – celui présent à la formation du système solaire et de la Terre – auraient pu être préservées dans le manteau, voire dans le noyau terrestre. Dans cette hypothèse, l’H2 est un stock certes fossile mais quasi infini.

L’hydrogène existe donc sur et sous terre, son extraction directe commence à être sérieusement envisagée pour un H2 réellement vert et peu cher, y compris du côté industriel.

Par exemple, une compagnie d’exploration dédiée à l’hydrogène, NH₂E, a été créée aux USA et y a foré un premier puits au Kansas fin 2019. En France, la société 45-8 cherche de l’hélium et de l’H2 – l’hélium est un gaz stratégique, car c’est un gaz rare nécessaire à beaucoup d’industries électroniques, beaucoup plus cher que l’H2. Comme ils sont parfois liés dans le sous-sol, la production d’hélium apparaît comme une priorité.

Volcans sous-marins, fumerolles, chaînes de montagnes : où ces réactions se produisent-elles ?

Comme déjà expliqué, les roches émises par les volcans des rides médio-océaniques réagissent au contact de l’eau, libérant de l’hydrogène.

Ce type de volcan s’observe aussi là où les rides médio-océaniques affleurent à la surface de la Terre, soit parce qu’elles sont en train de se former comme aux Afars – le point triple entre les axes centraux de la mer Rouge, du Golfe d’Aden et du rift est-africain – soit parce qu’elles sont soulevées par des phénomènes plus profonds, par exemple en Islande. De fait, dans cette île, les fumerolles de l’axe central du rift contiennent toutes de l’hydrogène. Actuellement, seule la chaleur de ces fumerolles est récupérée dans les centrales électriques géothermiques, mais on pourrait envisager d’y coupler la récupération de l’hydrogène.

Dans les zones où se forment les montagnes, ces croûtes océaniques peuvent aussi arriver à proximité de la surface et s’oxyder, des émanations d’H2 ont été remarquées dans ce contexte géologique en Oman, aux Philippines, en Nouvelle-Calédonie et même dans les Pyrénées.

D’autres émanations de surface sont observées en Russie (aux alentours de Moscou), aux USA (Caroline du Sud, Kansas), mais aussi au Brésil et dans beaucoup d’autres endroits, toujours dans les régions où le socle est très ancien et riche en métaux : la source pourrait être relativement similaire, oxydation d’un matériel riche en fer et libération de l’hydrogène.

Combien d’hydrogène pourrait-on trouver dans le sous-sol ?

Certains voudraient connaître les réserves prouvées avant de se lancer dans une aventure d’exploration de l’H2. La question paraît loufoque aux géologues, car on ne connaît toujours pas les réserves d’hydrocarbures après plus de cent ans de forage et de travaux intensifs.

Il y a très peu de puits dédiés à l’exploration de l’hydrogène naturel, donc on ne sait pas, mais il y a des émanations de surface. Que nous indiquent-elles sur la probabilité que l’H2 natif représente à moyen terme une part importante de l’H2 consommé ?

En Russie, aux États-Unis, au Brésil, au Canada, en Australie, en Namibie, de légères dépressions plutôt circulaires sont bien visibles sur des photos aériennes : ce sont les « ronds de sorcières ». Souvent la végétation y meurt et si on y va avec un détecteur de gaz, on note que de l’hydrogène s’en échappe.

Pour tirer des conclusions sur la possibilité d’une production de cet hydrogène, il faut évidemment connaître le flux et non juste la concentration, ce que permettent de nouveaux capteurs. Prétendre que l’on comprend précisément le système serait un mensonge, mais les données convergent vers une production continue (sur des années) dans des quantités importantes. Les fuites que nous mesurons sont entre 50 et 1900 kg par km2 et par jour, à comparer avec les 5 kg nécessaires au réservoir d’une voiture à hydrogène.

Sur un bassin entier, il y pourrait donc y avoir des productions en millions de tonnes par an. En additionnant les bassins, les dorsales et les zones géothermales, les chiffres sont encore plus grands, mais toujours incertains puisque les premières données sont seulement en train d’être acquises.

Nous savons donc désormais que de l’hydrogène est produit tous les jours en quantité « industrielle » par l’interaction eau/roche. Une partie s’échappe et nous la mesurons dans les gaz des sols des ronds de sorcières. L’autre partie doit s’accumuler dans des réservoirs, comme l’eau ou les hydrocarbures – c’est la partie trouvée au Mali.

Il reste à déterminer les endroits les plus prospectifs et, selon le contexte, soit le séparer des autres gaz présents dans les flux géothermaux qui arrivent jusqu’à la surface, soit forer.

Pour des raisons économiques, « le plus prospectif » va s’entendre en termes de réserves, c’est-à-dire de quantité d’H2, mais aussi de coût de production : un puits à 110 m de profondeur comme celui en service au Mali est peu onéreux et on fore aussi très facilement, mais avec un peu plus d’argent, sur plusieurs km dans l’industrie géothermale – il faut aussi penser en termes de proximité du consommateur.

Les divers gisements

L’hydrogène (H2) est une molécule extrêmement mobile qui, si elle n’est pas consommée par des réactions chimiques, s’échappe dans nos océans et notre atmosphère. L’hydrogène n’est pas donc pas supposé s’accumuler dans la croûte terrestre et il n’existe d’ailleurs aucun réservoir connu à ce jour. Ce paradigme est remis en question par la découverte de grandes quantités d’hydrogène piégé dans des roches argileuses situées à 400 m de profondeur à proximité d’un grand gisement d’uranium au Canada.

L’hydrogène peut être produit par différents processus réactionnels dans la croûte terrestre. Les plus connus sont l’altération hydrothermale des roches ultramafiques [1], la radiolyse [2] de l’eau, l’activité de certaines bactéries, ou encore le dégazage mantellique. Cet hydrogène natif peut ensuite réagir avec des éléments oxydés – minéralisés ou dissous dans les fluides géologiques – ou bien diffuser vers la surface et s’échapper dans nos océans ou dans notre atmosphère. Ainsi, on pensait jusqu’à présent que la grande mobilité de l’hydrogène combinée à sa forte réactivité à haute température, comme à basse température en présence de bactéries, ne lui permettait pas de s’accumuler dans le sous-sol de notre planète.

A) Vue schématique en 3D du gisement d’uranium de Cigar Lake (Athabasca, Canada) et des différentes lithologies sus- et sous-jacentes. B) Vue en 3D de la zonation des teneurs en hydrogène (H2) dans et autour du gisement. C) en bleu : photo d’un échantillon de roche (quelques centimètre) issu d’un des forages carotté sur lequel a été réalisés les mesures de désorption de l’hydrogène par chauffage ; en rouge, image prise au microscope à balayage électronique montrant la texture, à l’échelle de quelques microns, des minéraux argileux présents dans les roches entourant le gisement sur lesquelles l’hydrogène est adsorbé.

La découverte des ingénieurs d’Orano (ex Areva) et des chercheurs des laboratoires Géoressources et de l’Institut des Sciences de la Terre (ISTerre/OSUG, CNRS / IRD / IFSTTAR / Université Grenoble Alpes / Université Savoie Mont Blanc), démontre que l’hydrogène peut être piégé dans les roches argileuses par adsorption. Des teneurs en hydrogène pouvant atteindre 500 ppm (0,250 mol/kg de roche) ont été mesurées dans les roches argileuses situées dans et autour du gisement d’uranium de Cigar Lake (Athabasca, Canada) à 400 mètres de profondeur. A titre de comparaison, de telles concentrations en hydrogène sont équivalentes, sinon supérieures, à celles mesurées pour le méthane dans des réservoirs non conventionnels d’hydrocarbures exploités par fracturation hydraulique.

Ces fortes teneurs en hydrogène peuvent poser des problèmes de sécurité lors de l’exploitation et le traitement du minerai et ont d’ailleurs motivées ces travaux de recherche. Cet hydrogène, d’origine radiolytique dans le cas présent, est adsorbé à la surface des minéraux argileux, principalement les illites et les chlorites, présents dans le halo d’altération entourant le gisement. Il peut être libéré par chauffage entre 80 et 300°C, ou par dissolution du substrat. Au total, près de 500 tonnes d’hydrogène sont piégées au voisinage immédiat du gisement (2 km de long, 100 m de large et 20 m de haut). Entre 5 et 20 % de l’hydrogène produit par radiolyse sur une durée de 1.4 milliard d’année est resté adsorbé dans les roches

Qualités de l’hydrogène:

  • Le plus énergétique des combustibles par unité de masse (2,2 fois celle du gaz naturel)

  • ni toxique, ni polluant,

  • le plus léger des gaz, ce qui est un facteur déterminant pour la sûreté et la sécurité d’une installation (vitesse de diffusion quatre fois celle du gaz naturel),

  • ses limites de détonation dans l’air couvrent un domaine étroit ce qui est un élément positif de sécurité dans un volume ouvert, puisque couplé à une grande vitesse de diffusion, les conditions de concentration pour une détonation sont très difficiles, voire quasi-impossibles, à obtenir.

  • il est très abondant sur terre sous forme atomique (associé à l’oxygène et au carbone le plus souvent) mais très rare sous forme moléculaire H2, il faut donc le fabriquer,

  • sa densité énergétique volumique est faible (sept fois plus faible que celle du gaz naturel), ce qui pose des problèmes pour son stockage,

  • il est inodore et incolore, ce qui ne facilite pas sa détection naturelle,

  • il brûle avec une flamme invisible, ce qui est un facteur de risque supplémentaire,

  • enfin il a une mauvaise image, injustifiée, dans le public depuis notamment l’accident de l’Hindenburg en 1937 et la bombe H (Figure 2).

3.1. Production à partir d’eau

La récupération d’hydrogène à partir de la molécule (H2O) peut se faire de diverses manières (chaleur, thermochimie, bio photosynthèse ou autres) mais la plus courante et la plus séduisante actuellement est l’électrolyse. Cette opération s’effectue au sein d’une cellule à deux électrodes reliées à une source électrique et séparées par un électrolyte conducteur ionique. Plusieurs technologies ont été développées. Elles conduisent toutes au même résultat, c’est à dire la production d’hydrogène H2 et d’oxygène O2. Selon leur type, la nature de l’électrolyte diffère.

  • Électrolyte liquide alcalin, conducteur d’ion OH, qui fonctionne vers 70-80°C. Son rendement, pour les grosses unités, atteint 75%. C’est la technologie la plus ancienne et la plus répandue. Ses avantages sont la maturité de la technologie, et donc la fiabilité, et son coût. Son inconvénient est de ne pas bien supporter les variations importantes de l’alimentation électrique ce qui ne favorise pas son couplage à une source dite renouvelable, type éolien ou photovoltaïque, donc très variable dans le temps. À titre d’exemple, c’est la technologie utilisée dans les sous-marins nucléaires français pour fabriquer l’oxygène nécessaire à la vie à bord.

  • Électrolyte solide acide perfluoré, conducteur d’ion H+, qui fonctionne vers 70°C et qui est dite « électrolyse PEM », Proton Exchange Membrane. Cette technologie est plus récente et elle est directement dérivée du développement des piles à combustible de type PEM, dont elle profite. Son avantage est d’être tout solide, d’avoir de meilleurs rendements (on arrive à 85%) et de bien supporter les variations importantes d’alimentation électrique, ce qui la rend bien adaptée au couplage avec les énergies renouvelables. Son inconvénient est de nécessiter des catalyseurs précieux aux électrodes, ce qui renchérit son coût (Lire : Les piles à combustible).

  • Électrolyte solide acide céramique, conducteur d’ion O2-, qui fonctionne vers 800°C  et qui est dite EHT « Électrolyse Haute Température ». Cette technologie est la plus récente et elle profite des développements des piles à combustible de type SOFC. Elle est en cours de développement et ses performances attendues sont séduisantes pour les applications en régime continu, par exemple pour des sources de chaleur nucléaires, de génération IV, ou solaires à concentration, avec des espoirs de coût assez bas du fait de l’absence de catalyseur précieux aux électrodes. Les rendements attendus sont de l’ordre de 80%.

3.2. Production à partir de combustibles carbonés, fossiles ou biologiques

Le combustible le plus utilisé pour cette fonction est le gaz naturel CH4 que l’on fait réagir à haute température (850 à 950°C), sous pression (25 bars) et en présence d’un catalyseur, avec de l’eau dans deux réactions successives, appelées reformage à la vapeur d’eau, procédé le plus répandu[2] :

CH+ H2O → CO + 3 H2

CO + H2O → CO2 + H2

Le rendement (calculé sur le PCI) varie de 65 à 80% selon la taille du reformer. 

D’autres technologies sont en voie de maturation (Lire : La production d’hydrogène « vert » et Stockage d’énergies renouvelables sous forme d’hydrogène pour sites isolés).

En 2017, la consommation mondiale d’hydrogène a été de l’ordre de 660 milliards de Nm3/an, ou 60 Mt/an, dont 15% en Europe.

4. Transport, stockage et distribution

Il s’agit de trois maillons essentiels de la filière entre production et utilisations.

4.1. Transport

Une fois fabriqué, l’hydrogène doit être transporté jusqu’au au site de stockage et/ou d’utilisation. Les modes de transport possibles dépendent de la distance, de la géographie du trajet, de la nature du destinataire, occasionnel ou permanent, et des quantités à délivrer. Ils sont les suivants:

  • le transport maritime pour lequel on utilise la forme cryogénique, essentiellement pour des raisons d’encombrement : l’Australie, par exemple, a décidé, début 2014, d’exporter ainsi une partie de sa production ;

  • le transport routier, aussi bien pour la forme cryogénique que pour la forme gaz comprimé ; ce transport, le plus utilisé, se fait actuellement en bouteilles acier sous 200 bars mais la technologie en bouteilles composites, beaucoup plus légère, est en train d’être mise en place pour un transport sous 400 bars, ce qui augmente la capacité par camion et donc diminue sensiblement le prix de ce transport ;

  • le transport par gazoducs ; ce mode est ancien puisqu’il a été mis en œuvre, pour la première fois, en 1938 par les allemands dans la Ruhr pour alimenter des sites industriels. Aujourd’hui, le réseau de l’Europe de l’Ouest mesure 1 600 km ; il est exploité essentiellement par Air Liquide. D’autres réseaux du même type existent sur d’autres continents.

4.2. Stockage

Fig. 3 : De l’hydrogène stocké en galettes par McPhy Energy – Source : McPhy Energy

La technologie retenue pour le stockage dépend essentiellement de la masse de gaz considérée.

  • pour les masses importantes, typiquement plusieurs centaines de milliers de m3, la solution la plus réaliste, sur les plans technologique et économique, consiste à utiliser des cavités souterraines naturelles (dômes de sel) ; c’est la conclusion à laquelle est parvenu le projet européen HyUnder, en septembre 2014 ; des expérimentations ont déjà été effectuées, qui confirment la validité technique (étanchéité, corrosion) et économique de cette solution ;

  • pour les masses moyennes (50 à 500 kg), mises en œuvre dans une station-service ou chez un industriel, on utilise les containers en acier sous 100 à 200 bars; ce mode est très utilisé et est couvert par toutes les normes et réglementations voulues ; une autre solution est en cours de développement, essentiellement par la PME française McPhy Energy, qui met en œuvre l’absorption d’hydrogène par des hydrures métalliques ; un de ses avantages réside dans la faible pression de stockage, de l’ordre de 20 bars, facteur d’économie et de sécurité (Figure 3)

  • pour les petites masses, typiquement autour de 5 kg pour les véhicules à pile à combustible, la solution actuellement adoptée par tous les constructeurs automobiles est le réservoir composite[3] sous 700 bars ;

  • pour les toutes petites masses (typiquement pour des alimentations d’appareils nomades à pile à combustible), les technologies actuellement retenues sont la capsule contenant un sel, par exemple le borohydrure de sodium, qui produit de l’hydrogène en présence d’une source d’eau, ou une bouteille aérosol légère ; cette solution a été adoptée par la PME française PaxiTech.

4.3. Distribution

La distribution se résume essentiellement à la station-service pour véhicules à pile à combustible, c’est-à-dire à la fourniture d’hydrogène gazeux sous 350 ou 700 bars. La technologie est aujourd’hui bien maitrisée : fin 2013, plus de 180 stations (dont environ 80 publiques) sont opérationnelles dans le monde, fonctionnent en toute sécurité et permettent un plein d’hydrogène, 5 kg généralement, en moins de 5 minutes. L’hydrogène y est soit fabriqué sur place via une énergie renouvelable par électrolyse, ou via un reformer alimenté en gaz, naturel ou issu de la biomasse, soit amené par camion, sous forme pressurisée ou liquide. Début 2018, 20 stations, dont la moitié sont publiques, ont été ouvertes en France. Ce nombre devrait doubler d’ici 2020. Les deux réalisateurs français de stations sont Total et Air Liquide, qui en ont installées quelques dizaines dans le monde.

Le couple nucléaire-hydrogène aux États-Unis, une romance en devenir

Le Department of Energy (DOE) a publié le 12 novembre 2020 son Hydrogen Program Plan (HPP) présentant la nouvelle stratégie américaine fédérale sur l’hydrogène.

Articulée autour de nombreux programmes de recherche et développement, elle vise à atteindre des cibles précises en matière de coûts de production, d’acheminement et d’utilisation, plutôt qu’une planification stricte en matière de capacité d’électrolyseurs installée.

Il est estimé dans l’HPP que l’émergence d’une économie de l’hydrogène pourrait constituer dès 2030 aux États-Unis un secteur d’une valeur de 140 milliards de dollars (G$) par an, employant 700 000 personnes. Ces estimations, probablement optimistes, appuient cependant les plans de la nouvelle administration Biden en matière d’énergie, avec notamment la promesse extrêmement ambitieuse de décarboner le système électrique américain à l’horizon 2035.

Le DOE s’intéresse depuis de nombreuses années à l’hydrogène comme vecteur énergétique décarboné et a dépensé dans ce secteur près de 4 G$ ces deux dernières décennies. Cependant, malgré des succès technologiques indéniables, 99 % de l’hydrogène produit aux États-Unis est encore issu de combustibles fossiles, avec 95 % par vaporeformage du méthane (steam reforming of methane – SMR) et 4 % par gazéification du charbon.

Afin de produire « proprement » de l’hydrogène de façon rentable, plusieurs voies technologiques sont explorées par les laboratoires nationaux et les industriels :

  • à partir de gaz et de charbon avec les méthodes actuelles mentionnées plus haut qui seraient couplées à un système de capture et de stockage du carbone (carbon capture and storage – CCS) ;

  • à partir d’électrolyseurs utilisant de l’électricité décarbonée (énergies renouvelables et nucléaire) ;

  • à partir de méthane par pyrolyse, une méthode encore peu explorée qui nécessite également de fortes quantités d’électricité décarbonée.

Cet éditorial porte sur les efforts en cours en matière de couplage des centrales nucléaires avec des capacités de production d’hydrogène, qui suscitent un intérêt économique, industriel et politique grandissant.

Des démonstrations à fort potentiel : le programme H2@Scale

C’est la clé de voûte de la stratégie fédérale pour déployer l’hydrogène de façon holistique dans un système énergétique toujours plus intégré. Il se décline en pratique par des partenariats public-privé de recherche concernant aussi bien la production, le stockage, l’acheminement et les applications de ce vecteur.

Pour le couple nucléaire-hydrogène, quatre initiatives majeures, menées conjointement par des électriciens et les laboratoires nationaux, ont émergé.

Exelon et Nel Hydrogen pour l’utilisation sur site

Le plus grand exploitant nucléaire américain, Exelon, a été sélectionné dès 2019 par le DOE pour recevoir 3,6 millions de $ (M$) afin d’installer un électrolyseur « classique » à membrane échangeuse de proton (proton exchange membrane – PEM) de 1 mégawatt électrique (MWe) développé par l’industriel norvégien Nel Hydrogen sur une de ses centrales équipées de réacteurs à eau bouillante (REB). Le projet, d’un coût total estimé de 7,2 M$, fera la démonstration d’un couplage complet nucléaire-hydrogène sur site dès 2023. En effet, l’hydrogène (H2) produit sera utilisé sur la centrale, la molécule étant nécessaire au contrôle de la chimie des REB. Exelon pourra ainsi vérifier ses estimations de réduction de coûts d’opération et maintenance (O&M) associées et éventuellement envisager une généralisation du concept sur ses 14 centrales équipées de tels réacteurs.

Energy Harbor pour les utilisations hors site

Energy Harbor, a également été retenue en 2019 par le DOE pour un projet d’installation d’électrolyseur PEM sur une de ses centrales, celle de David-Besse dans l’Ohio. Cette fois, l’objectif est d’évaluer les gains de compétitivité associés pour les exploitants sur un marché dit « dérégulé » de l’électricité, qui pourraient ainsi choisir de produire de l’hydrogène avec l’électricité générée par une centrale plutôt que de vendre à perte lors des périodes de forte production des sources renouvelables intermittentes. Le projet, dont le coût total est estimé à 11,2 M$ et qui ne concerne là aussi que 1 à 3 MWe de capacité, est mené conjointement avec l’Idaho National Laboratory (INL), le DOE apportant un financement de 9 M$ sur deux ans. L’hydrogène produit sera probablement utilisé par les flottes de bus de l’État et éventuellement pour de la production sidérurgique à faible émission de gaz à effet de serre.

Xcel pour la démonstration d’un électrolyseur haute-température

L’exploitant nucléaire du Minnesota Xcel installera quant à lui entre 2022 et 2023 un électrolyseur en phase vapeur, dit à « haute température » (high temperature steam electrolysis – HTSE) sur la centrale de Prairie Island. Une très faible partie de la vapeur du circuit secondaire d’un des deux réacteurs à eau pressurisée sera extraite entre les turbines haute et basse pression afin de préchauffer l’eau pure de l’électrolyseur d’une capacité avoisinant 1 MWe, permettant un gain de 33 % de rendement énergétique comparé à un électrolyseur PEM. L’hydrogène produit sera utilisé pour refroidir les génératrices sur le site ainsi qu’assurer le contrôle chimique du réacteur à eau bouillante de la centrale de Monticello, située à 150 kilomètres (km) de celle de Prairie Island. Ce projet, d’un coût total estimé à 10 M$, est financé à 80 % par le DOE.

Arizona Power System et la réversibilité des piles à combustible

Arizona Power System (APS) a de plus lancé une étude en collaboration avec le DOE pour évaluer l’intérêt d’installer des électrolyseurs de type PEM réversibles (piles à combustible) sur sa centrale de Palo Verde. La réversibilité permettrait d’utiliser l’hydrogène produit pour produire de l’électricité en période de pic de demande, la centrale produisant de l’hydrogène lorsque la consommation électrique est faible. Une telle infrastructure pourrait augmenter la profitabilité des réacteurs d’APS, qui évoluent dans une zone à fort ensoleillement où le photovoltaïque entraîne fréquemment des prix négatifs en journée.

Une montée en puissance et un potentiel élevé

Les projets de démonstration inclus dans le programme H2@Scale sont une première étape pour identifier les voies technologiques les plus prometteuses et développer les chaînes logistiques associées. Les capacités d’électrolyseurs restent cependant limitées et les exploitants songent déjà à des installations de grandes capacités, les premiers débouchés étant déjà identifiés.

Les réacteurs à eau bouillante

Il est d’ores et déjà apparent que pour les exploitants nucléaires des 31 réacteurs à eau bouillante opérationnels aux États-Unis, la production de l’hydrogène nécessaire au contrôle chimique de ceux-ci permettrait normalement de réduire très légèrement leurs coûts d’opération. En effet, un REB de 700 MWe consomme environ 200 tonnes d’hydrogène par an avec un coût associé d’environ 400 000 $/an, soit la production d’un électrolyseur de 1 MWe. L’électricien vendant 1/700e d’électricité en moins, le profit net de l’opération est cependant de l’ordre de 100 000 $/an. Un électrolyseur PEM de 1 MWe ayant d’ores et déjà un coût inférieur à 500 000 $, l’opération sera probablement rentabilisée en moins de cinq ans. Si les volumes impliqués sont marginaux, ce schéma est une porte d’entrée pour les exploitants, comme le montre d’ailleurs le programme H2@Scale.

Une production massive peu coûteuse

Le projet HTSE de Xcel ouvre la voie à des installations beaucoup plus importantes et à une forte rentabilité. En effet, cette initiative comprend également une étude de faisabilité détaillée, en cours de réalisation par l’INL, pour la mise en place de 100 à 200 MWe d’électrolyseurs à haute température sur les centrales de l’exploitant.

Une possibilité particulièrement attractive évaluée par l’INL et Xcel repose sur une augmentation de la puissance thermique des réacteurs afin de fournir en chaleur les électrolyseurs par une déviation du circuit secondaire avant les groupes turbomoteurs, tout en conservant les mêmes turbines et donc la même capacité de génération électrique. Un tel montage serait peu coûteux car il n’impose pas d’investissements matériels importants. En effet, on sait aujourd’hui que les îlots nucléaires de nombreux réacteurs pourraient soutenir une réactivité plus élevée, que les exploitants n’exploitent pas car une telle démarche impliquerait un changement coûteux de turbines et des rejets thermiques plus élevés soumis à régulation.

Si de telles options étaient validées par la Nuclear Regulatory Commission (NRC), plusieurs centrales pourraient produire des volumes élevés d’hydrogène propre à un coût faible, de l’ordre de 1,50 dollar par kilogramme ($/kg), similaire à celui attendu du vaporeformage du méthane à base de gaz naturel à 3 $/MMBTU (One Million British Thermal Units) avec un système CCS efficace. Même sans une envolée durable du prix du gaz naturel, l’introduction probable d’exigences en matière d’émissions liées à la production d’hydrogène assurerait aux exploitants nucléaires une source de revenus complémentaire.

Des usages potentiels nombreux

Les usages potentiels de grandes quantités d’hydrogène « propre » à bas prix sont nombreux, ne serait-ce que pour remplacer celles, issues des énergies fossiles, déjà utilisées actuellement. Xcel envisage par exemple de fournir les producteurs de fertilisants de l’État du Minnesota, qui consomment une quantité élevée d’ammoniac (NH3), dont la synthèse nécessite des volumes importants d’hydrogène. Si ces derniers étaient issus d’électrolyseurs alimentés en chaleur et électricité nucléaire, le bilan carbone du procédé serait bien plus soutenable, alors que la production de NH3 engendre actuellement 1 % des émissions de gaz à effet de serre au niveau mondial.

De surcroît, le NH3 étant beaucoup plus facile à stocker et transporter que l’H2, de nombreux acteurs commencent à l’envisager comme vecteur énergétique, notamment pour le transport maritime.

Si les usages industriels locaux d’hydrogène « propre » sont prometteurs, notamment pour décarboner la sidérurgie américaine principalement installée au sud des Grands-Lacs où les centrales nucléaires sont nombreuses, les électriciens réfléchissent également à l’employer comme solution de stockage.

C’est le cas par exemple d’Entergy, qui exploite 8 gigawatts (GW) de capacité nucléaire répartis sur quatre centrales autour du Mississipi et qui a annoncé un partenariat avec Mitsubishi pour modifier les turbines de ses centrales à gaz afin qu’elles puissent brûler un mélange composé à 70 % de gaz naturel et à 30 % de H2. Ce dernier proviendrait en partie d’électrolyseurs couplés aux réacteurs de l’électricien, le système agissant comme une solution flexible de stockage de l’électricité nucléaire pour répondre avec souplesse aux variations de la demande et de la production des sources renouvelables intermittentes.

Perspectives

Bien que les projets de couplage nucléaire-hydrogène du programme H2@Scale restent pour le moment des démonstrations techniques à l’échelle précommerciale, les exploitants américains envisagent de plus en plus une montée en puissance rapide des capacités installées.

La possibilité de produire de façon compétitive de l’hydrogène, comme tout autre usage rentable non électrogène de l’énergie issue des réacteurs, est d’autant plus critique pour le parc nucléaire installé américain que celui-ci fait parfois face à des marchés dits « dérégulés » de l’électricité dont les règles de fonctionnement ne lui sont pas favorables et qui menacent sa pérennité.

Dans ce cadre, l’électrolyse haute-température est une technologie clé pour l’industrie nucléaire du pays, qui, si elle profite d’économies d’échelle et de série suffisantes, pourrait permettre aux centrales nucléaires d’être les installations de production décarbonée d’hydrogène les plus compétitives du marché. Un potentiel qui concerne les réacteurs de forte puissance déjà construits, mais également les futurs petits réacteurs nucléaires modulaires, pour lesquels l’hydrogène est un argument de vente comme en témoigne la récente proposition de l’entreprise britannique Shearwater d’installer au Royaume-Uni une centrale NuScale et un parc éolien en mer couplés à des électrolyseurs. L’HTSE pourrait même gagner encore en compétitivité lorsqu’elle sera associée à des réacteurs avancés permettant un préchauffage à plus haute température, à 500 °C voire 750 °C.

L’hydrogène existe donc sur et sous terre, son extraction directe commence à être sérieusement envisagée pour un H2 réellement vert et peu cher, y compris du côté industriel. Par exemple, une compagnie d’exploration dédiée à l’hydrogène, NH₂E, a été créée aux USA et y a foré un premier puits au Kansas fin 2019.1 juil. 2020

A propos de H-NAT 2021

Le congrès H-Nat est la première occasion pour toutes les parties prenantes de se présenter ou de s’informer sur ce nouveau marché prometteur, de présenter leurs dernières découvertes en H2, leurs innovations, leurs produits et services, d’établir des partenariats, de nouer et de développer des relations commerciales, de lever des fonds, de constituer des équipes…
Le congrès H-Nat ouvre un nouveau terrain de jeu concurrentiel pour les acteurs de l’énergie conventionnelle. À leurs côtés, de nouvelles entreprises et de nouveaux entrepreneurs de divers secteurs manifestent également leur intérêt pour ce nouveau marché prometteur, avec des start-ups, des groupes de recherche, des suivis ou des partenariats universitaires déjà en place pour s’assurer de ne pas manquer l’opportunité H2.

L’hydrogène naturel sera-t-il l’énergie renouvelable et décarbonée de demain?

Après le premier congrès international sur l’hydrogène naturel en juin 2021 à Paris, Isabelle Moretti était invitée en novembre par l’Université de Glasgow puis au Sénat à Paris, avant de s’envoler pour la Colombie début décembre, pour présenter les avancées de la recherche dans ce domaine.

Colloque « L’hydrogène, vraie solution ou fausse piste ? » à Glasgow (Écosse)

En marge de la COP 26, l’Université de Glasgow organisait un colloque en ligne sur l’hydrogène le 10 novembre 2021, en partenariat avec la Fédération européenne des géologues et la Société géologique de Londres. Cet événement a réuni chercheurs et entrepreneurs pour discuter avec le grand public du rôle croissant de l’hydrogène dans la transition énergétique et environnementale. La première séance était consacrée au stockage à grande échelle de l’hydrogène dans le sous-sol, et la seconde à l’hydrogène naturel. Cette dernière était présidée par Isabelle Moretti.

L’hydrogène peut être fabriqué par l’homme à partir de méthane (hydrogène dit « gris »), mais c’est polluant, et à partir d’eau et d’électricité (hydrogène « vert »), mais cela coûte cher. Or on a découvert assez récemment que l’hydrogène était naturellement présent dans le sous-sol. On le qualifie d’hydrogène « blanc ». « Après des découvertes fortuites de plusieurs gisements, comme au Mali, aux États-Unis ou en Australie, l’exploration de l’hydrogène naturel suscite de nombreux espoirs », indique Isabelle Moretti. Ont ainsi témoigné lors de ce colloque des mineurs australiens et colombiens partageant leur expérience, mais également des investisseurs pour qui l’hydrogène naturel représente une valeur sûre pour l’avenir.

L’UPPA, via son Laboratoire des Fluides Complexes et leurs Réservoirs (LFCR) auquel appartient Isabelle Moretti, joue un rôle particulier dans la recherche sur la compréhension des phénomènes qui conduisent à la génération permanente d’hydrogène naturel. Ainsi, celle-ci se produit en grande partie par réduction de l’eau : « Les roches s’oxydent au contact avec l’eau (H2O), gardent l’oxygène (O) et libèrent l’hydrogène (H2). Cet hydrogène est donc renouvelable et économique. A condition de pouvoir l’exploiter. A l’heure actuelle les industriels sont donc friands d’informations à ce sujet. »

Selon Isabelle Moretti, il reste en effet une inconnue : le « quand », ou plutôt à quelle vitesse l’exploitation à grande échelle pourra se mettre en place. Il va falloir notamment adapter le droit minier dans les pays où l’hydrogène n’entre encore dans aucune catégorie permettant de demander un permis d’exploration ou de production.

Visionner la 2e séance du colloque de Glasgow sur l’hydrogène

Rencontre France/Islande au Sénat à Paris

Isabelle Moretti a ensuite participé à une rencontre sur les développements en France et en Islande dans le secteur de l’hydrogène vert, organisée par la CCI France International et le « Groupe interparlementaire d’amitié France – Europe du Nord » du Sénat.

L’Islande, pionnière dans l’utilisation d’énergies renouvelables, souhaite en effet devenir le leader mondial de l’hydrogène. Ce colloque rassemblant 200 personnes au Palais du Luxembourg s’est tenu en présence du président islandais G. Johannesson, des deux ambassadrices et des principaux acteurs professionnels du secteur (France Hydrogène, Engie, le CEA, Air Liquide, Airbus…).

A cette occasion, Isabelle Moretti a présenté les travaux de l’équipe du LFCR, en particulier ceux de Valentine Cambaudon, désormais en thèse en cotutelle UPPA-IFP Énergies Nouvelles, sur le contenu en hydrogène des centrales géothermiques islandaises, en collaboration avec l’université de Reykjavik. Les résultats montrent la possibilité d’une production d’hydrogène généré journellement en profondeur, avec la vapeur, par interaction eau/roche, et actuellement relâché dans l’atmosphère.

Il faudra donc surveiller de près les évolutions de ce secteur prometteur.

Grande-Bretagne : l’hydrogène pourrait satisfaire 50 % de la demande énergétique d’ici 2050

Le dernier rapport publié par le bureau d’étude Aurora Energy Research souligne que l’hydrogène pourrait fournir prés de la moitié du besoin énergétique de la Grande-Bretagne d’ici 2050.  Pour le gouvernement anglais, une véritable piste à explorer pour tenir ses engagements de neutralité carbone d’ici 2050.

 « Il est temps d’aller plus vite, plus loin, pour protéger l’environnement et nos enfants. Ce pays a été à la pointe de l’innovation mondiale pendant la révolution industrielle. Aujourd’hui, nous devons être à la pointe d’une croissance plus propre, plus verte. L’objectif de zéro émission nette d’ici 2050 est ambitieux, mais il est essentiel pour assurer la protection de la planète pour les générations futures.». Un des derniers actes de Theresa May, le 11 juin 2019, avait été de formuler un objectif d’élimination des émissions de carbone d’ici 2050 (programme Net Zero). Depuis, peu d’éléments concrets avaient émergés en ce sens. La nouvelle étude publiée par Aurora Energy Research semble relancer la dynamique.

Selon ce rapport, l’hydrogène bleu (produit à partir du gaz naturel après reformage pour en retirer le carbone) et l’hydrogène vert (produit en utilisant l’énergie pour électrolyser l’eau) devraient jouer un rôle important, en fournissant jusqu’à 480 TWh d’hydrogène, soit environ 45 % de la demande énergétique finale de la Grande-Bretagne d’ici 2050.
De multiples hypothèses sont envisagées. Si le déploiement est limité aux secteurs difficiles à électrifier, comme la production d’acier et de produits chimiques, l’approvisionnement en hydrogène vert utilisant une énergie à faible teneur en carbone peut répondre à une partie importante de la demande.  Cependant, une adoption généralisée pourrait signifier le déploiement de près de 14 millions de chaudières à hydrogène et une pénétration de plus de 75 % de l’hydrogène dans les véhicules utilitaires lourds. Cela passerait nécessairement par le déploiement massif de la technologie de l’hydrogène bleu pour assurer l’échelle d’approvisionnement requise.

Prés de 500 milliards d’euros d’investissements à prévoir

Tous les scénarios « Net Zero » exigent une croissance substantielle de la production d’électricité à faible teneur en carbone. L’hydrogène pourrait apporter de multiples avantages dont la relocalisation de la production d’énergie à hauteur de 3,3 milliards d’euros par an d’ici 2050, mais aussi une réduction des besoins de flexibilité du secteur de l’électricité pendant les mois d’hiver. Le changement d’échelle envisagé par l’étude permet, en parallèle, d’envisager une baisse drastique du prix de l’hydrogène.

D’un point de vue technique pour atteindre cet objectif de satisfaction de 50 % de la demande électrique via l’hydrogène, des investissements conséquents seraient à prévoir (plus de 495 milliards d’euros en valeur actuelle nette). En effet, si une partie du stockage de l’hydrogène peut être réalisé dans d’anciennes mines de sel, il sera nécessaire d’investir dans la construction de réservoirs supplémentaires pour garantir l’approvisionnement régulier. A cela s’ajoutent les nécessaires infrastructures de transport et distribution de l’hydrogène sur le territoire britannique.

La consommation mondiale d’hydrogène est de 60 millions de tonnes par an, soit un peu moins de 2 % de la consommation énergétique globale.

Le pouvoir énergétique de l’hydrogène est important : 1 kg d’hydrogène libère environ trois fois plus d’énergie qu’1 kg d’essence, mais à poids égal il occupe beaucoup plus de volume que tout autre gaz. Ainsi pour produire autant d’énergie qu’1 litre d’essence, il faut 4,6 litres d’hydrogène comprimé à 700 bars. L’hydrogène représente une alternative énergétique renouvelable intéressante en raison de son pouvoir calorifique trois fois supérieur à celui de l’essence et de sa combustion n’émettant que de la vapeur d’eau.

Retour sur l’hydrogène Natif : Où se trouvent les sites d’hydrogène naturel ?

D’abord un rappel historique : l’hydrogène naturel est connu depuis assez longtemps, il fut découvert par hasard en 1906 dans un petit champ de gaz (premier champ exploité en France pour du gaz-méthane CH4) à Vaux-en-Bugey, dans l’Ain en France, dont il constituait 5 % du volume. La plupart des gisements de gaz méthane contiennent peu d’hydrogène suite à sa forte diffusivité, mais dans des cas exceptionnels l’hydrogène peut être à plus forte concentration comme par exemple le champ géant d’Astrakhan, au Kazakhstan. De plus l’hydrogène est un gaz ultra-réactif qui s’associe facilement à d’autres composés tels le soufre, le carbone ou l’oxygène pour former de l’eau, et dans ce cas il ne peut s’accumuler en grande quantité.

L’hydrogène naturel a déjà une longue histoire car il est associé à des émantations de gaz en Turquie près de la ville d’Antalya sur le site de Chimaera à l’origine du mythe de la Pythie de Delphes aux VIIème et VIème siècles avant Jésus Christ.

Depuis qu’ils ont découvert de nombreux indices ou émanations d’hydrogène à la surface terrestre, les géologues ont compris que l’hydrogène naturel se rencontrait dans deux contextes géologiques majeurs et différents : (i) la croûte océanique, avec principalement les dorsales médio-océaniques [6] et (ii) la croûte continentale au niveau d’anciens orogènes ou zones de formation des chaînes de montagnes.

Le premier cas ou ‘hydrogène océanique’ a été découvert grâce à la succession des programmes d’exploration des fonds océaniques du début des années 1990. Des flux d’hydrogène ont ainsi été mis en évidence au niveau de sites hydrothermaux, à plusieurs km de profondeur le long des dorsales océaniques. Ces dorsales parcourent le fond des océans sur quelques 60 000 km et de nombreux sites de flux d’hydrogène étroitement liés aux processus de serpentinisation (voir ci-dessous) s’y rencontrent, particulièrement le long de la dorsale médio-atlantique près des Açores avec de nombreux sites hydrothermaux actifs dont les plus productifs sont ceux de Rainbow, Lost City, Logathchev et Ashade renfermant plus de 40% (parfois jusqu’à 80 %) d’hydrogène dans les émanations gazeuses. Les serpentinites dérivent de l’altération par hydratation de minéraux ferromagnésiens (en particulier l’olivine et les pyroxènes, qui sont des silicates de Mg et Fe)  de péridotites, roches ultrabasiques et de roches basiques provenant du manteau supérieur terrrestre [8]. Si ces minéraux sont stables dans les conditions de pression et température du manteau supérieur, ils deviennent en revanche thermodynamiquement instables en présence de fluides lors de leur exhumation vers la surface. Dans le détail, l’altération des péridodites mantelliques est à l’origine d’une minéralogie complexe menant à la formation d’hydrogène gazeux à partir de minéraux (notamment brucite et variétés de silice [9]) formés lors de stades intermédiaires. Le processus est abiotique et la quantité d’hydrogène produit au niveau des sites recensés a pu être quantifiée et varie de 12 à 100 mmol/kg de fluide. La production d’hydrogène sur les sites est maximale pour des températures de serpentinisation comprises entre 200 et 315 °C et persisterait plusieurs milliers d’années avant de s’arrêter.

De manière plus détaillée, il faut distinguer les dorsales océaniques lentes à faible vitesse d’expansion (Atlantique) des dorsales rapides (Pacifique. Les flux d’hydrogène sont plus élevés dans le cas des premières car l’activité magmatique y est moindre, par contre l’activité tectonique y est plus importante à l’origine de nombreuses failles transformantes favorisant le contact avec l’eau de mer. Ceci entraîne une altération plus prolongée des péridotites par la circulation hydrothermale qui se met en place à travers les failles suite à la source de chaleur magmatique profonde. Les flux d’hydrogène ont pu être quantifiés à l’échelle des sources (ou ‘events’) situés sur l’ensemble des dorsales et donnent un maximum de 4 à 5 milliards de mètres cubes par an, ce qui reste peu élevé en regard de la consommation mondiale d’environ 500 milliards de mètres cubes par an. Pour la dorsale médio-atlantique cela donne un flux d’hydrogène de l’ordre de 105 tonnes/an. La plupart des sources hydrothermales étant situées en milieu océanique profond (de 2 à 4 km) la rentabilité de cette ressource potentielle n’est pas à l’ordre du jour. Des sites appartenant à d’autres dorsales sont également connus mais peu intéressants à l’heure actuelle en regard de ceux de la dorsale médio-atlantique.

Le second cas ou ‘hydrogène continental’ est lié au milieu continental ou cratonique. Il suffit de ‘suivre’ géologiquement les ophiolites, représentant une portion de la lithosphère océanique (cf. le premier cas ci-dessus), qui ont été charriées sur un continent sous l’effet de la tectonique des plaques au niveau des zones de convergence. Les massifs ophiolitiques sont donc des lambeaux de plancher océanique ayant charrié des péridotites sur les continents dans des chaînes de montagnes, rien de plus ‘normal’ dans le cadre de la tectonique des plaques (les massifs sont donc intra-plaques c.à.d incorporés dans une plaque tectonique). Les ophiolites les plus connues sont celles d’Oman et des Philippines. L’eau provenant de l’altération des massifs d’ophiolites d’Oman sont à l’origine de structures circulaires et elliptiques ou ‘piscines bleues’ (ou ‘blue pools’) formant des vasques naturelles de quelques mètres à une centaine de mètres de diamètre, parfois en plein désert. Elles matérialisent les émanations d’hydrogène le long des chemins de fractures apparues au terme du charriage tectonique. De nombreux forages (parfois sur plus de 10 km de profondeur …) effectués un peu partout dans la croûte continentale à des fins scientifiques ou appliquées (Russie, Canada, USA, Suède, Afrique du Sud, Afrique de l’Ouest…) ont régulièrement révélé la présence d’hydrogène, associé à du méthane, du diazote et parfois à de l’hélium. Ce dernier gaz, lorsqu’il est abondant, provient de la désintégration radioactive de l’uranium et du thorium présents dans les granites de la croûte continentale à plusieurs centaines de mètres ou quelques kilomètres de profondeur. Cet hydrogène continental, est souvent en forte concentration, et en tenant compte de son coefficient de diffusion dans différentes portions de la croûte, un flux d’environ 7740 mètres cubes/jour pour une surface de 1 km2 a pu être calculé. Ce flux est faible par rapport à la productivité d’un champ de gaz non conventionnel (par exemple gaz de schiste). Cet hydrogène continental a donc été mis en évidence de manière fortuite grâce à ces forages effectués à d’autres fins (recherche d ‘eau ou d’hydrocarbures) et la recherche d’émanations d’hydrogène continental se poursuit actuellement à partir de la meilleure piste à disposition qui soit, à savoir celle des fameuses ‘piscines bleues’ ou structures circulaires bien visibles sur Google Earth. Notons également que lorsque l’hélium est fort abondant (0,3%), il peut lui-même être exploitable vu la forte demande sur le marché.

Voyons quelles sont les origines possibles de l’hydrogène naturel ?

Plusieurs hypothèses sont avancées et à l’heure actuelle la question n’est pas résolue. Pour les russes (fortement contestés) l’hydrogène proviendrait du dégazage inachevé de la planète, par contre pour de nombreux scientifiques il proviendrait de la transformation de la matière organique lors de l’enfouissement des séries géologiques, enfin il pourrait aussi provenir de l’hydrosphère suite à l’altération de roches particulières et hydrolyse de l’eau. Il n’est pas possible de discuter ici des détails de ces hypothèses qui ont également des conséquences sur les modes de prospection et les technologies à venir, mais c’est une quatrième hypothèse qui est finalement privilégiée par Prinzohofer & Deville (2015), tous deux géologues à l’Institut français du pétrole. Il s’agit de l’oxydation du fer ferreux des minéraux des roches ultrabasiques (par exemple l’olivine des péridotites) et dans une moindre proportion des roches basiques (basaltes et gabbros), réduisant l’eau en hydrogène. A nouveau il n’est pas question ici de détailler la minéralogie d’altération des péridotites qui comprend de nombreux minéraux secondaires liés en grande partie à des variations du pH, notons seulement que la production d’hydrogène peut se résumer in finecomme suit : Fe2+ + H2O = Fe3++1/2H2+OH-, avec Fe2+ présent dans les minéraux ferreux, indiquant que lorsque le fer s’oxyde, l’eau se réduit en hydrogène (voir glossaire).

Prinzohofer & Deville (2015) n’écartent pas non plus la contribution d’un autre réducteur naturel, à savoir la matière organique qu’elle soit vivante (bactéries et algues) ou fossilisée. Ici c’est donc la biomasse qui entre en jeu… et celle-ci pourrait être plus abondante en domaine continental (sous terre) qu’en domaine océanique. Dans le cas de production d’hydrogène par oxydation par les roches ultrabasiques, le pH augmente jusqu’à 11-12, dans le second cas (influence de bactéries anaérobes c.à.d se développant dans des milieux sans oxygène) le pH est compris entre 4 et 8. La température est plus élevée dans le premier cas (> 200 °C) et faible dans le second (< 120 °C, limite au-delà de laquelle aucune bactérie ne se développe). D’autres paramètres physico-chimiques (conditions de pression, chimie des fluides hydrothermaux, chimie des roches altérées, rapport eau/roche etc.) sont également à prendre en considération pour les rendements de production de l’hydrogène naturel. Des études expérimentales ont par exemple montré que cette production est maximale pour des températures supérieures à 200 °C [19], ce qui sont celles rencontrées lors de la circulation hydrothermale profonde.

Impossible d’établir un bilan précis des ‘réserves’ d’hydrogène naturel

Actuellement il n’est pas possible d’établir un bilan quantifié des différents mécanismes de production de l’hydrogène naturel. On peut tout simplement mesurer en surface des flux, comme rapporté ci-dessus. On voit également que si l’hydrogène naturel est surtout lié à la réduction de l’eau par le fer, il faudra chercher d’éventuels gisements dans des séries géologiques riches en fer ferreux (sidérite -FeCO3-… certains silicates dont bien évidemment les minéraux appartenant à la famille des olivines, etc.) à des profondeurs de quelques centaines de mètres ou de quelques milliers de mètres. Tout minéral contenant du fer ferreux (Fe2+) peut donc convenir pour la production d’hydrogène lors d’une réaction hydrothermale. Dans les dorsales océaniques et dans les ophiolites continentales, un mineral commun, l’olivine riche en fer ferreux, peut produire de l’hydrogène pendant la serpentinisation à partir de la sidérite formée au cours de cette altération. Prinzohofer & Deville (2015) rapportent que chaque kilogramme de sidérite peut produire en se décomposant 97 litres d’hydrogène. Une formation géologique de 10 mètres d’épaisseur avec 1% de sidérite en masse donnerait, suivant ces auteurs, 24 millions de mètres cubes d’hydrogène par kilomètre carré, ce qui est voisin de la productivité des hydrocarbures pour une surface équivalente. Et le taux de récupération est certainement plus favorable pour l’hydrogène que pour les hydrocarbures, car s’accumulant rapidement (à l’échelle humaine) les fuites ou ‘dysmigrations’ sont moins nombreuses que celles des hydrocarbures qui se sont accumulés sur des millions d’années. Le rendement ou quantité récupérable devrait donc être bien plus favorable pour l’hydrogène que pour les hydrocarbures.

Notons également que cet hydrogène produit en profondeur lors de la serpentinisation peut réagir avec le CO2 pour donner du méthane (CH4) et d’autres hydrocarbures. De même avec la transformation du fer ferreux en fer ferrique, de la magnétite (Fe3O4) est aussi formée et peut alors servir de guide de prospection en géophysique, la magnétique étant lourde elle peut donner des anomalies gravimétriques facilement détectables.

On peut donc conclure, que même si plusieurs hypothèses sont avancées pour la génération d’hydrogène, les mécanismes de production de l’hydrogène sont encore mal connus tant d’un point de vue qualitatif que quantitatif, ce qui nécessite plus d’études et également une grande prudence sur l’éventuelle récupération industrielle de ce gaz. L’hydrogène naturel, étant lié à la réduction de l’eau par oxydation de minéraux ferreux ou de matières organiques nécessite donc de hautes températures (premier cas) et l’absence d’oxygène (second cas), est donc généré à grande profondeur, ce qui rendra difficile sa récupération. En effet la réaction avec l’eau mettant en solution l’hydrogène qui se déplace avec une médiocre efficacité suite à son faible taux de diffusion à grande profondeur, nécessitera de pomper l’eau en surface pour assurer un dégazage efficace. La récupération de l’hydrogène en milieu continental semble plus favorable qu’en milieu océanique dans lequel les péridotites ou roches ultrabasiques sont très peu perméables et peu poreuses alors que le système est très fortement faillé et les roches plus poreuses en milieu continental suite au charriage tectonique. La fracturation hydraulique pourrait ainsi être une solution pour l‘hydrogène ‘océanique’. On voit donc qu’il reste encore de nombreuses questions ouvertes …

Que conclure sur les perspectives économiques de l’hydrogène naturel ?

Nous avons vu que les quantités d’hydrogène naturel apparaissent aujourd’hui limitées, faute d’une exploration soutenue et des difficultés technologiques de la récupération, qu’il s’agisse des sites continentaux ou océaniques. La géologie a maintenant établi des critères ou guides de prospection qui pourront être systématiquement développés en cas de perspectives économiques favorables. Des gisements sont déjà exploités aujourd’hui, citons le Mali avec la découverte en 1987, à 107 m de profondeur, lors de forages pour l’eau, d’une poche à hydrogène estimée à 1,5 milliard de mètres cubes donnant une production modeste [20], et également le Kansas, à plus de 1200 mètres de profondeur, dans les années 1980 [21].

En attendant ‘le futur’ qui établira comment récupérer ou valoriser l’hydrogène naturel (fracturations hydrauliques, puits d’injection dans des aquifères… électrolyse), l’hydrogène d’aujourd’hui fabriqué pour les engrais et la pétrochimie, représente un marché important correspondant à plus de 20% de la quantité de gaz naturel et à près de 100 milliards de dollars pour 2013 [4]. Notons qu’un gisement d’hydrogène naturel présente un avantage décisif sur les gisements de gaz, le système naturel de génération de l’hydrogène étant toujours en activité, le gisement se renouvelle suite à la circulation hydrothermale, au contraire des gisements d’hydrocarbures scellés depuis des millions d’années, qui sont abandonnés entre quelques années (gaz de schiste, non conventionnel) et quelques dizaines d’années (30 ans, ou plus, pétrole et gaz conventionnels). Le recul et le suivi ne sont suffisants aujourd’hui pour estimer la production ‘pérenne’, si tel est bien le cas, de l’hydrogène naturel.

En attendant, de l’électricité est aujourd’hui produite à partir de l’hydrogène au Mali par l’intermédiaire de piles à combustible et de nombreux projets de production de l’hydrogène à partir de matériaux géologiques (riches en fer ferreux que l’on ‘serpentinisera’) sont à l’étude, y compris à partir de déchets miniers ferreux. Ensuite se posera le problème du stockage de l’hydrogène produit…

Glossaire

Réactions d’oxydo-réduction ou réaction rédox : Il s’agit de réactions chimiques avec transferts d’électrons entre deux réactifs (atomes, ions, molécules) oxydants et réducteurs formant des couples oxydant-réducteur (aussi appelés couples rédox). Un oxydant est un atome qui au cours de la réaction chimique, prend ou à tendance à prendre un ou plusieurs électrons à un atome réducteur, qui lui cède ou à tendance à cèder un ou plusieurs électrons (au profit de l’atome oxydant).
Pour plus de détails se reporter par exemple à http://www.afblum.be/bioafb/redox/redox.htm ou https://fr.wikipedia.org/wiki/Réaction_d%27oxydoréduction

Comment rendre le carburant hydrogène plus écologique ?

16 octobre 2019, 21:43 CEST

Impératifs climatiques obligent, la recherche d’énergies alternatives aux carburants fossiles mobilise tant les chercheurs que les citoyens. Parmi les solutions en vogue, mais néanmoins souvent controversées, le moteur à hydrogène. Même les trottinettes s’y mettent ! Le fonctionnement est simple : soit l’énergie générée est de nature mécanique grâce à la combustion de l’hydrogène en étant raccordée à un réservoir (comme nos moteurs de voiture actuels) ; soit l’énergie générée est électrique, par oxydation de l’hydrogène dans une pile à combustible.

En général le mot combustion rime plutôt avec pollution… Et pourtant, l’hydrogène présente l’avantage majeur d’avoir une combustion non carbonée – pas d’émissions de monoxyde de carbone (CO) ni de dioxyde de carbone (CO2). Le seul produit issu de cette combustion est l’eau ! Autrement dit, la réaction chimique qui permet de libérer l’énergie, laquelle alimentera le moteur, ne produit aucun polluant ni gaz à effet de serre.

Produire de l’hydrogène

Néanmoins les moteurs à hydrogène restent au cœur du débat et de la controverse. En effet, si l’hydrogène en tant que tel ne pollue pas, obtenir de l’hydrogène n’est pas simple car il n’est pas disponible à l’état naturel. Il faut donc le produire et c’est là que ça se complique… Aujourd’hui les deux options majoritaires pour générer de l’hydrogène sont le vaporeformage (95 % de l’hydrogène est obtenu par cette méthode) et l’électrolyse.

Le vaporeformage est une réaction entre de la vapeur d’eau et un combustible fossile (pétrole, charbon, gaz naturel) au cours de laquelle la vapeur d’eau casse les molécules d’hydrocarbures pour libérer l’hydrogène. Contrairement à la combustion de l’hydrogène, cette réaction entraîne la production de CO2. Le procédé n’est donc pas une solution réellement pérenne : en effet, bien que des méthodes de stockage et de valorisation du CO2 ainsi émis sont de plus en plus communes, le vaporeformage alimente notre dépendance aux énergies fossiles et ne fait que reculer la question de l’épuisement des ressources.

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L’électrolyse de l’eau est une autre solution prometteuse dans le sens où l’électricité utilisée est elle-même propre (pas de dépendance aux énergies fossiles et pas de production de polluants ou gaz à effets de serre). Mais ce procédé reste très coûteux (environ quatre fois celui du vaporeformage). La facture est élevée en raison de la qualité de l’eau qui doit être très pure, opération qui est chère.

Un moteur à hydrogène serait donc finalement non polluant si in fine le processus de fabrication de l’hydrogène l’était aussi. Cependant, une troisième option de production d’hydrogène a attisé récemment l’intérêt des chercheurs : la gazéification de biomasse.

Valoriser la biomasse

La biomasse englobe tous les déchets d’origine végétale ou animale qui peuvent être réutilisés à des fins énergétiques. C’est un vrai joker pour l’environnement : en effet, la biomasse est renouvelable et son cycle de fixation du carbone est beaucoup plus court que ceux des énergies fossiles. En l’utilisant, on a aussi l’avantage de produire de l’hydrogène local tout en valorisant des déchets.

Pour produire de l’hydrogène, cette biomasse va subir un processus appelé par les spécialistes la pyrogazéification :il s’agit d’un traitement thermique suivi d’une réaction chimique avec de la vapeur d’eau, le tout à haute température. La biomasse va alors se transformer en ce qu’on appelle communément le « char », un charbon végétal, et libérer un mélange de gaz appelé le syngaz.

La centrale de Güssing convertit des copeaux de bois en syngaz pour les besoins de l’agglomération. Gerfriedc/WikipediaCC BY

Ce syngaz est composé de plusieurs espèces, dont de l’hydrogène mais aussi du CO, du CO2 et du sulfure d’hydrogène (H2S). Il est donc nécessaire de purifier ce syngaz afin d’isoler l’hydrogène des autres espèces gazeuses. Pour cela plusieurs étapes de purification et d’enrichissement en hydrogène du syngaz sont nécessaires.

Dans le cadre du projet VitrHydrogène, un procédé industriel est développé afin de produire ce syngaz à partir de biomasse locale. Ce procédé inclut la pyrogazéification et est couplé aux différentes étapes de purification et d’enrichissement.

Chaque gaz a ses propres caractéristiques et le procédé de purification pour chaque espèce gazeuse n’est pas le même. Pour l’H2S par exemple, il s’agit de remplacer l’atome de soufre par l’atome d’oxygène et donc de convertir l’H2S en vapeur d’eau (H2O).

Il existe diverses options pour la séparation du H2S : cela peut se faire par un lavage à l’eau, par adsorption chimique ou physique, par passage sur un tamis moléculaire ou encore par désulfuration biologique en utilisant des microorganismes. Une autre option, qui a déjà fait ses preuves pour la désulfuration à de très faibles concentrations, est la réaction sur lit d’oxydes métalliques.

Purifier les gaz

Ce procédé consiste à faire passer le gaz à travers un lit de particules d’oxydes ou d’hydroxydes métalliques. Le choix de l’oxyde se fait selon un compromis entre le coût du matériau et la probabilité de la réaction avec H2S à survenir. Pour mesurer ce dernier paramètre, on se réfère à ce que l’on appelle l’enthalpie libre de réaction. Cette valeur représente l’énergie libérée au cours de la réaction. Si cette valeur est négative, on parle alors de réaction spontanée ou plus précisément de réaction « thermodynamiquement » favorisée. Le lit d’oxydes métalliques étant poreux, le gaz circule entre les particules et diffuse également à l’intérieur des pores. Cette configuration permet un écoulement lent et un temps de contact plus long entre le gaz et les particules pour favoriser la réaction chimique.

Écoulement de gaz au sein d’un milieu poreux. V. Pozzobon, Author provided

Le soufre de H2S réagit avec l’oxyde métallique en remplaçant un atome d’oxygène. L’oxygène libéré se lie à l’hydrogène pour former une molécule d’eau.

En circulant au sein du lit, le soufre issu de H2S est donc retenu et le gaz en sortie purifié. Néanmoins, il faut s’assurer que le volume du lit soit suffisamment grand pour retenir tout le soufre présent dans le syngaz. En effet, une fois le lit saturé en soufre, l’H2S circulera alors sans être retenu par les particules : on parle alors du temps de percée.

Schéma de la réaction entre le lit d’oxydes métalliques et H₂S. P. Perré, Author provided

Nous travaillons donc sur l’optimisation de ce procédé afin d’obtenir un gaz en sortie dont la concentration en H2S est conforme aux normes de pureté imposées. Une fois le syngaz désulfuré, il doit encore passer plusieurs étapes de purification pour reconvertir la vapeur d’eau produite en hydrogène puis éliminer les traces de CO, et de CO2, ainsi qu’une étape d’enrichissement d’hydrogène pour avoir une pureté adéquate aux normes requises pour les piles à combustible actuelle.

En optimisant chaque étape de purification, il sera alors possible d’obtenir un hydrogène local, renouvelable, moins polluant et valorisant des déchets. Un tel hydrogène, performant d’un point de vue énergétique, pourrait également être utilisé pour d’autres usages, comme l’injection dans les réseaux de distribution de gaz naturel ou la production d’électricité.

Le transport d’hydrogène par pipeline a le vent en poupe

La EHB (European hydrogen backbone) se développe en Europe. Cette immense dorsale de l’hydrogène, qui servira à acheminer de futur carburant à travers toute l’Europe, peut finalement reposer en partie sur un réseau gazier qui sera reconverti.

La carte du réseau de canalisations.

L’initiative EHB prend de l’ampleur. Ces derniers jours, les responsables de cet immense projet ont confirmé qu’une douzaine de GRT (Gestionnaire de réseau de transport) ont rejoint l’aventure. Ces spécialistes du transport de gaz vont en effet mettre à disposition des pipelines qui ne serviront plus, pour les convertir au transport de l’hydrogène à travers l’Europe.

Vous le savez peut-être déjà, par sa forme chimique, l’hydrogène est un carburant complexe à stocker et transporter. Et pour relier les différents sites de production et les relier à des zones moins denses, l’EHB prévoit ainsi de mailler l’Europe avec un réseau de canalisations.

« 69 % des canalisations d’hydrogène proposées sont constituées d’infrastructures gazières existantes reconverties. Les 31 % restantes sont de nouvelles canalisations, requises afin de pouvoir raccorder les nouveaux consommateurs et sont situées dans des pays dont les réseaux gaziers existants sont de taille limitée, mais qui devraient néanmoins bénéficier de niveaux élevés d’approvisionnement et de demande d’hydrogène au cours des années à venir« , précise le communiqué d’Hydrogen Europe.

Ce réseau transfrontalier de transport d’hydrogène s’inscrit, selon les participants au projet, à la volonté de neutralité carbone de l’Europe et de la France d’ici 2050. Encore faudra-t-il, évidemment, que cet hydrogène soit produit sans produits fossiles, ou, au moins, que la captation CO2 ait véritablement franchi un cap d’ici là.

Hydrogène : le futur réseau européen se dessine

Filière 3e — 17 juin 2021 Réagir

GRTGaz et Teréga ont lancé, mardi 1er juin 2021, une consultation auprès des acteurs du secteur pour imaginer le futur réseau de l’hydrogène. Il s’agira de recueillir, via un questionnaire en ligne, la vision de chacun afin de définir les attentes concernant la production, la consommation et les besoins de stockage.

GRTGaz et Teréga ont lancé, mardi 1er juin 2021, une consultation auprès des acteurs du secteur pour imaginer le futur réseau de l’hydrogène. Il s’agira de recueillir, via un questionnaire en ligne, la vision de chacun afin de définir les attentes concernant la production, la consommation et les besoins de stockage.

GRTGaz et Teréga, tous deux gestionnaires du réseau de transport du gaz français, ont lancé une consultation nationale, le mardi 1er juin 2021, afin de tracer les contours du futur réseau européen d’hydrogène (caractéristiques techniques des futurs ouvrages de logistique). Cette consultation s’inscrit dans le prolongement de la dorsale hydrogène, un projet d’infrastructures de près de 40 000 kilomètres. Elle s’adresse à l’ensemble des acteurs de la filière (industriels, producteurs, expéditeurs, experts, futurs utilisateurs, etc.). Ceux-ci s’exprimeront, par le biais d’un questionnaire en ligne disponible jusqu’au 11 juillet prochain, leurs visions et attentes en matière de production, de consommation, de transport et de stockage de l’hydrogène vert. Cette ressource décarbonée est présentée, depuis quelques années, comme la parfaite candidate de la transition énergétique. Le gouvernement français lui a même consacré un plan à 7 milliards d’euros.

L’hydrogène va relever un double défi 

« La nécessité de se préoccuper des futures infrastructures de transport d’hydrogène apparaît partout en Europe. C’est un sujet majeur si l’Europe et la France veulent voir se développer une économie de l’hydrogène qui est indispensable pour réussir la neutralité carbone en 2050. La logistique européenne de l’hydrogène s’invente maintenant », a indiqué Thierry Trouvé, Directeur Général de GRTgaz et Président du groupe de travail Energie d’Hydrogen Europe. « Nous sommes convaincus que le déploiement de cette filière aux multiples avantages contribuera à relever un double défi : accélérer la transition énergétique et renforcer le tissu industriel français », a dit pour sa part Dominique Mockly, le président-directeur général de Teréga. Pour lui, l’hydrogène constitue un des maillons essentiels du mix énergétique décarboné de demain.

Une situation géographique favorable pour la France

Après la collecte des avis, GRTGaz et Teréga lanceront dans la foulée des échanges bilatéraux plus approfondis. Une fois ces résultats consolidés, les deux gestionnaires prévoient de restituer une première planification des infrastructures, vers fin 2021. Avec la construction de la dorsale hydrogène et du réseau national d’hydrogène, la France pourrait facilement transporter sa production d’hydrogène vert. Celle-ci s’élèvera à 220 térawatts-heure en 2050 (à 150 TWh, selon RTE –Réseau de transport d’électricité). L’Hexagone a des raisons de croire en un réseau dense performant d’autant qu’il bénéficie d’une situation géographique favorable. En effet, la France se retrouvera au cœur d’un écosystème vertueux avec des pays frontaliers très investis dans l’hydrogène. Il s’agit de l’Allemagne (qui a annoncé un financement de 9 milliards d’euros en juin 2020), la Belgique, la Suisse et l’Espagne.

Un pipeline depuis le Mali pour approvisionner l’Europe

Dans ce dernier pays, Teréga mise sur une percée de l’hydrogène vert issu de l’électricité d’origine solaire. Cette énergie pourrait venir en grande partie du Maroc ou du Mali, où la compagnie Hydroma mène une véritable révolution énergétique depuis 2012. Fondée par le milliardaire malien Aliou Boubacar Diallo, cette ambitieuse entreprise est pionnière dans l’exploitation de l’hydrogène naturel, un gaz totalement propre. Grâce à une unité pilote, elle a transformé pendant huit années l’hydrogène natif en électricité verte pour le village de Bourakébougou. En 2020, son PDG a annoncé une production à grande échelle dans les prochains mois.

Parallèlement, Aliou Diallo a lancé la construction de vastes champs de panneaux photovoltaïques dans une dizaine de pays du Sahel. A terme, Hydroma envisage d’approvisionner l’Europe via un futur pipeline de 4700 kilomètres. Cette infrastructure partira de Bourakébougou jusqu’aux portes de l’Europe (probablement l’Espagne). « Ce n’est pas un rêve, c’est une réalisation tout à fait faisable. L’Europe même est en train de construire 23.000 kilomètres de pipeline pour le transport de l’hydrogène », a déclaré le promoteur malien en octobre dernier. Il promet d’envoyer son hydrogène à un prix très compétitif.

Transport et de stockage

L’hydrogène représente-t-il la clé de la future grande transition énergétique ? C’est la conviction de la France, ainsi que d’autres pays qui ont choisi d’investir massivement dans cette filière. Un budget qui ne sera pas de trop pour résoudre les nombreux problèmes soulevés par ce vecteur énergétique. Parmi eux figure la question de son conditionnement, l’hydrogène ayant tendance à endommager les matériaux métalliques. À Mines Saint-Étienne, Frédéric Christien et ses équipes tentent d’y apporter des éléments de réponse.

 Au début du mois de septembre, le gouvernement français a annoncé un plan de soutien de 7 milliards d’euros, à horizon 2030, pour la filière hydrogène. Avec cet investissement, l’Hexagone rejoint la liste de plus en plus longue des nations misant sur cette stratégie : Japon, Corée du Sud, Pays-Bas…

Néanmoins, l’exploitation de ce composant induit des interrogations majeures, d’un bout à l’autre de la chaîne. Les chercheurs savent depuis longtemps que l’hydrogène peut endommager certains matériaux, à commencer par les métaux. « Il y a plus d’un siècle déjà, les scientifiques ont remarqué qu’en plongeant du métal dans de l’acide chlorhydrique [du chlore et de l’hydrogène], on observait non seulement un effet de corrosion, mais également une fragilisation du matériau, relate Frédéric Christien, chercheur à Mines Saint-ÉtienneLe sujet a alors donné lieu à de nombreuses études concernant l’impact de l’hydrogène sur les matériaux. Aujourd’hui, il existe d’ailleurs des normes encadrant l’utilisation de matériaux métalliques en présence d’hydrogène. Cependant, des questions reviennent de façon récurrente, car les matériaux évoluent régulièrement ».

Valoriser l’électricité produite mais non consommée

Depuis environ trois ans, les travaux menés par le chercheur de Mines Saint-Étienne s’inscrivent dans le contexte du « power-to-gas ». L’objectif de cette technologie : valoriser l’électricité surabondante plutôt que de la perdre, en la transformant en hydrogène gazeux, via le procédé d’électrolyse de l’eau.

À lire sur I’MTech : Quèsaco l’énergie hydrogène ?

« Le power-to-gas consiste alors à injecter l’hydrogène ainsi produit dans le réseau de gaz naturel, en faible proportion, afin de l’utiliser comme combustible », expose Frédéric Christien. Pour le particulier, cela ne change rien : il peut continuer à utiliser ses équipements au gaz comme d’habitude. En revanche, pour le transporteur, une telle modification n’est pas sans incidence. D’où la question posée aux spécialistes de la durabilité des matériaux : quel effet peut avoir l’hydrogène sur l’acier constituant la majeure partie du réseau de transport de gaz naturel ?

Déformation localisée

Les chercheurs de Mines Saint-Étienne, en collaboration avec le CEA de Grenoble, travaillent depuis trois ans sur un échantillon de tuyau afin d’étudier l’action du gaz sur le matériau. Il s’agit en l’occurrence d’un acier que l’on retrouve dans le réseau de gaz naturel.

Dans ce cas, les chercheurs ont mis en évidence un mécanisme d’endommagement, par « localisation de la déformation plastique ». Concrètement, ils ont étiré leur échantillon, de sorte à reproduire les sollicitations mécaniques survenant sur le terrain, dues notamment aux variations de pression et de température. D’ordinaire, une telle opération conduit à allonger le matériau de façon diffuse et homogène, jusqu’à un certain point. Au contraire, ici, sous l’effet de l’hydrogène, toute la déformation se concentre à un endroit, fragilisant de plus en plus la matière sur une même zone, jusqu’à la déchirure. En temps normal, une couche d’oxyde native du matériau empêche l’hydrogène de pénétrer à l’intérieur de la structure. Mais sous l’action de la sollicitation mécanique, le gaz peut alors profiter de la faille pour venir endommager l’édifice localement.

Il faut toutefois garder à l’esprit que ces résultats correspondent à des essais en laboratoire. « Nous sommes assez loin de la situation industrielle, qui demeure complexe, tempère Frédéric Christien. Il ne s’agit bien sûr pas de la même échelle. De plus, selon les endroits, les aciers ne sont pas tous les mêmes, certains ont des revêtements internes, d’autres non, idem pour les traitements thermiques… » Des études complémentaires seront donc nécessaires pour connaître plus précisément l’action de l’hydrogène sur l’ensemble du réseau de transport de gaz naturel.

Le casse-tête de la production

Les travaux académiques contribuent donc à une meilleure compréhension des effets de l’hydrogène sur les métaux dans certaines conditions. De là à pouvoir créer un matériau totalement insensible à ces actions ? « Il paraît aujourd’hui irréaliste de pouvoir trouver un tel matériau de rêve, affirme le chercheur de Mines Saint-Étienne. En revanche, en jouant sur les microstructures ou sur les traitements de surface, nous pouvons imaginer augmenter sensiblement la durabilité des métaux employés ».

Si la filière hydrogène a de grandes ambitions, elle doit donc d’abord répondre à quelques problématiques. La sécurité du transport et du stockage en est une, au même titre que les questions en cours sur l’optimisation des processus de production pour les rendre compétitifs. Sans un réseau robuste et sûr, il sera difficile pour l’hydrogène de s’imposer comme le mode énergétique du futur qu’il ambitionne d’être.

Aliou Diallo, premier et seul producteur au monde d’hydrogène naturel

Alors que la plupart des industriels se ruent sur l’hydrogène vert, un entrepreneur malien a fait le choix de miser sur l’hydrogène naturel depuis plusieurs années. Son nom c’est Aliou Boubacar Diallo, PDG d’Hydroma, une compagnie d’exploration et d’exploitation de gaz naturel.

Depuis quelques mois, les gouvernements et les industriels manifestent un vif intérêt pour l’hydrogène vert. Ils considèrent cette ressource comme la candidate idéale pour la transition énergétique. L’Etat français, notamment, a mis sur la table 7 milliards d’euros en septembre 2020 pour en démocratiser l’usage. Trois mois plus tôt, l’Allemagne annonçait un investissement de 9 milliards d’euros pour en devenir le numéro Un mondial. Les acteurs comme Total et Engie lancent, pour leur part, de nombreux projets afin de réaliser leur propre transition. Cette ruée vers l’hydrogène vert sonne le glas de l’hydrogène gris, source de grande pollution. Elle se fait surtout aux dépens de l’hydrogène naturel, qui est pourtant totalement vertueux. En effet, ce gaz est abondant, renouvelable et moins. De plus, sa production ne génère que de l’eau, là où celle de l’hydrogène vert demande la consommation de beaucoup d’électricité.

Aliou Diallo, pionnier de l’hydrogène naturel

Au Mali, l’entrepreneur Aliou Boubacar Diallo a fait le pari de l’hydrogène naturel en 2010. À cette époque, la communauté scientifique niait encore l’existence de cette ressource sur les continents et l’industrie s’en détournait. Il a fallu la publication des travaux d’Alain Prinzhofer et Éric Derville pour actualiser les connaissances. Ces deux géophysiciens français ont démontré l’existence d’immenses réservoirs d’hydrogène naturel dans de nombreux pays. Parmi eux, la Russie, les Etats Unis, le Canada, le Brésil et le Mali. Mais, Aliou Boubacar Diallo a été le premier et reste le seul entrepreneur à s’intéresser à l’hydrogène natif. Sa société d’exploration et d’exploitation de gaz naturel, transforme cette ressource en électricité propre pour le village de Bourakébougou.

Grâce aux travaux d’Hydroma, Aliou Diallo est régulièrement invité à participer à des évènements dans le secteur de l’énergie en Europe. Les gouvernements portent une attention particulière à sa révolution énergétique silencieuse. En octobre 2020, Aliou Diallo était ainsi en Allemagne, où il a eu des réunions avec de hauts responsables des ministères chargés de chapeauter le programme de l’hydrogène blanc (nom donné à l’hydrogène naturel dans ce pays). Cette année, le promoteur malien a lancé une production à grande échelle afin de satisfaire la demande nationale dans un premier temps. Il compte ensuite exporter l’excèdent (près de 95%) en Afrique et en Europe.

Un pipeline pour approvisionner l’Europe en hydrogène naturel

Dans ses petits papiers, le milliardaire a prévu la construction d’un pipeline pour approvisionner ces deux continents. « Nous avons programmé de faire un pipeline pour transporter l’hydrogène naturel du Mali au Sénégal, à la Mauritanie, au Maroc, jusqu’à la porte de l’Europe. Donc ça fait 4700 kilomètres. Ce n’est pas un rêve, c’est une réalisation tout à fait faisable. L’Europe même est en train de construire 23.000 kilomètres de pipeline pour le transport de l’hydrogène », a récemment confié Aliou Diallo.

L’homme d’affaires continue parallèlement de financer les forages dans le cercle de Kati au Mali. Depuis 2012, Hydroma a fait plus de 6000 mètres de forage en partenariat avec des sociétés canadienne, australienne et européenne. « Nous avons fait des forages shallows, des forages deep, des forages ultra deep dans le cadre de l’hydrogène. Nous sommes allés jusqu’à plus de 2000 mètres », précise Aliou Diallo. Le dirigeant africain a en outre lancé des prospections en Australie et au Canada, où se trouve le siège de sa société.

De l’hydrogène, oui, mais de l’hydrogène naturel

L’intégration de l’hydrogène comme source d’énergie dans la transition énergétique pose le problème de sa production à partir des énergies fossiles. En revanche, l’hydrogène naturel n’a pas cet inconvénient comme le montrent plusieurs exemples. Par Alain Prinzhofer, professeur affilié à l’Institut de physique du globe de Paris et à l’université de Paris VII, directeur scientifique de GEO4U.

L’hydrogène vient d’être intégré à la transition énergétique. Et c’est tant mieux. Car l’élément le plus abondant de l’univers sous sa forme gazeuse est multi-tâches. Il permet de produire électricité et chaleur sans rien n’émettre d’autre que de l’eau. Du chargeur de téléphone au moteur électrique de voiture, de la locomotive du train express régional, le couple hydrogène-pile à combustible s’adapte à tous les contextes technologiques.

Ce n’est pas tout. Aux heures creuses, l’électricité en surplus peut être utilisée pour produire de l’hydrogène, stockable. Ce gaz peut être réutilisé pour générer de l’électricité, au moment le plus opportun. De quoi répondre aux contraintes pour les gestionnaires des réseaux d’électricité que pose le développement des sources de production d’électricité intermittentes (éolien, photovoltaïque).

L’hydrogène enfin peut être directement injecté dans les réseaux de transport ou de distribution du gaz de ville pour en alléger le bilan carbone. Deux expérimentations démarreront prochainement à Dunkerque et à Fos-sur-Mer.

Reste un problème irrésolu. La quasi-totalité de l’hydrogène est produite à partir d’énergies carbonées, dans les usines d’ammoniac et les raffineries de pétrole. Cette brique essentielle à la décarbonation de notre société souffre d’une terrible addiction aux … énergies fossiles. Synthétiser une tonne d’hydrogène relargue 13 tonnes de gaz carbonique. Est-on condamné à renforcer l’effet de serre au nom de la lutte contre le changement climatique ?

Une solution sous nos pieds ?

La solution existe sous… nos pieds. Dans les années 1970, des scientifiques américains ont mis en évidence des exsudations sous-marines d’hydrogène naturel au milieu des océans. Trop profonds, ces fruits de la transformation de l’eau en hydrogène resteront longtemps inaccessibles à l’homme. Ce n’est pas le cas partout.

Dès 2010, des chercheurs de l’Institut Français du Pétrole et des Energies Nouvelles (IFPEN) ont confirmé l’existence d’importantes émanations terrestres en Russie. Une très vaste région, courant de Moscou au Kazakhstan, s’avère riche en structures géologiques circulaires d’où s’échappent d’importants flux d’hydrogène naturel. Ces études ont évalué à plusieurs dizaines de milliers de mètres-cube le débit quotidien d’une seule de ces dépressions : de quoi faire le plein en hydrogène d’environ 500 taxis Hype ! Sur tous les continents, semblables structures ont été trouvées et sont associées à des émanations d’hydrogène.

L’exemple malien

Dernier exemple en date : le Mali. Au milieu de la décennie 1980, des prospecteurs d’eau ont découvert par hasard un important champ contenant 98% d’hydrogène. Inaugurée en 2011, une installation pilote fournit au village voisin de l’électricité grâce à cet hydrogène. 18 puits récemment forés par la compagnie Petroma — tous avec des indices d’hydrogène ! — ont permis d’établir une cartographie précise du sous-sol du village de Bourakebougou. Cinq réservoirs superposés et peu profonds (de 100 à 1.700m) s’étendent sur 20 kilomètres de large.

A priori, le coût d’exploitation de cet hydrogène sera bien moindre que sa fabrication par les énergies fossiles, et a fortiori encore bien plus faible encore que le coût de l’électrolyse, encore très dispendieuse. De nombreux indices scientifiques et techniques semblent indiquer que l’hydrogène exploité à Bourakebougou s’est formé il y a peu de temps. Nous serions donc en présence d’une énergie non polluante et renouvelable ! Une hypothèse qui reste à vérifier.

Manque de volonté politique

Cette première mondiale fera-t-elle date ? Le manque de volonté politique et de crédits de recherches laisse craindre que non. Nous avons à notre portée des sources d’énergie probablement renouvelable, potentiellement très riches dont le coût d’exploitation apparaît des plus faibles au regard des prix du marché.

Certes, l’hydrogène naturel reste mystérieux. La communauté scientifique peine à expliquer avec certitude son mode de génération. Mais après tout, n’avons-nous pas commencé à exploiter l’or noir, vers 1850, quatre-vingts ans avant d’en comprendre l’histoire géologique ?

Faute d’inventaire, nous ignorons quelle part de cet hydrogène — souvent diffus — est exploitable. Les modes d’exploitation performants doivent aussi être mis au point. Moins pur que son équivalent manufacturé, l’hydrogène naturel devra être raffiné pour être consommé. à moins que de nouvelles technologies, à l’instar des piles à combustible à oxyde solide ou des piles microbiennes ne connaissent un développement rapide.

En une question comme en cent, quelle peut être la part de l’hydrogène naturel dans la transition écologique que nous appelons, tous, de nos vœux ?

L’hydrogène est-il écologique ? Est-il une solution pour résoudre la crise climatique ? Tentons de comprendre les perspectives des technologies hydrogène en matière de transition écologique.

Ces dernière années, on parle de plus en plus de l’hydrogène comme solution à la crise écologique. Récemment, l’Europe a même élaboré sa « stratégie hydrogène ». Le but, développer les techniques de production d’hydrogène pour « décarboner » l’Europe. En France, on veut aussi miser sur l’hydrogène : le pays vient même de commander ses premiers trains à hydrogène.

L’hydrogène est présenté comme une solution pour la mobilité et le transport aérien, pour l’industrie, mais aussi pour le chauffage domestique. Bref, l’hydrogène semble devoir être au coeur de la stratégie de transition écologique des prochaines décennies. En théorie, l’hydrogène a de quoi séduire : lors de son utilisation, il n’émet ni polluant, ni gaz à effet de serre, que de l’eau. Mais qu’en est-il vraiment ?

L’hydrogène est-il vraiment écologique ? Quels sont ses impacts écologiques, à la production, à l’usage ? Quels sont les défis posés par les technologies hydrogènes ? Que permettront-elles de faire vraiment ? Tentons de comprendre.

L’hydrogène : comment ça marche ?

Lorsqu’on parle d’hydrogène dans le contexte de la transition écologique et énergétique, on parle en fait de dihydrogène. Il s’agit d’une molécule composée de deux atomes d’hydrogène (H2) que l’on trouve à l’état gazeux. L’hydrogène peut être utilisé comme carburant, ou plus fréquemment, indirectement via une pile à combustible : on stocke l’hydrogène dans une pile à combustible qui permet de produire de l’électricité à la demande.

L’hydrogène a plusieurs avantages. Lorsque l’on utilise de l’hydrogène, sa combustion ne produit que de l’eau. C’est d’ailleurs pour cela qu’il s’appelle l’hydrogène (hydro, eau – gène, produit). L’hydrogène est aussi l’élément le plus abondant de l’univers. Il a donc l’avantage, contrairement aux énergies fossiles, d’être disponible en grandes quantités : on ne risque pas, à court terme, d’en manquer.

Toutefois, il faut comprendre que l’hydrogène n’est pas une ressource facilement accessible. Même s’il y en a beaucoup sur terre, il est toujours mélangé à d’autres éléments chimiques. Par exemple, on trouve de l’hydrogène dans l’eau, mais couplé à des atomes d’oxygène : c’est H2O – H2 dihydrogène, O oxygène. On trouve aussi de l’hydrogène dans les combustibles fossiles, par exemple dans le gaz naturel, mais il est alors couplé à des atomes de carbone. Dans le méthane par exemple, il est sous forme de CH4. On ne trouve pas en revanche de l’hydrogène « seul ».

Pour avoir de l’hydrogène, il faut donc le produire, en le séparant des autres molécules. Et c’est là que les choses se compliquent.

Tous les hydrogènes ne sont pas verts

Il existe deux méthodes principales actuellement pour produire de l’hydrogène. La plus commune, utilisée pour produire plus de 90% de l’hydrogène mondial, c’est le reformage d’hydrocarbures. En gros, on place des hydrocarbures dans des conditions précises de température et de pression et d’humidité qui permettent de séparer les atomes de carbone de l’hydrogène. La seconde méthode, c’est l’électrolyse de l’eau : on utilise un courant électrique pour séparer l’hydrogène de l’oxygène de l’eau. Dans tous les cas, ces procédés demandent de grandes quantités d’énergie.

Selon la méthode que l’on utilise, la production d’hydrogène n’est pas nécessairement « verte ». Quand l’hydrogène est produit à partir d’hydrocarbures, cela pose plusieurs problèmes écologiques. D’abord, il faut extraire ces hydrocarbures, ces énergies fossiles, ce qui génère des dégradations environnementales et des émissions de CO2. Ensuite, il faut utiliser de grandes quantités d’énergie pour provoquer les réactions nécessaires à la production d’hydrogène (vaporeformage, oxydation…). Ces procédés produisent du CO2 par réaction chimique, qu’il faut pouvoir capter et stocker si on veut éviter qu’il ne se retrouve dans l’atmosphère. Pas franchement « durable ». D’après l’Agence de la Transition Écologique (ADEME), produire 1 kg d’hydrogène par reformage émet autour 12 kg de CO2.

En général, lorsqu’on parle d’hydrogène dans le cadre de la transition écologique, on fait plutôt référence à l’hydrogène produit par électrolyse de l’eau, qu’on appelle « hydrogène vert ». Mais là encore, ce n’est pas simple. Certes, il ne faut « que » de l’eau et de l’électricité. Mais le procédé n’est « durable » que si l’électricité utilisée est elle-même « durable ». Produire de l’hydrogène avec de l’électricité provenant de centrales à charbon revient à émettre beaucoup de CO2 et de polluants. Il faut donc que l’électricité utilisée ait été elle-même produite via des sources bas carbone comme les énergies renouvelables ou le nucléaire. Toujours selon l’ADEME, la production d’1 kg d’hydrogène avec le mix électrique français, plutôt bas carbone grâce au nucléaire et aux énergies renouvelable, émet environ 2.7 kg de CO2. Soit 4.5 fois moins que par reformage.

Reste la question de l’eau. L’eau est une ressources relativement abondante sur Terre, mais elle n’est pas abondante partout et tout le temps. Si l’on utilise de grandes quantités d’eau pour produire de l’hydrogène, c’est autant d’eau que l’on ne peut pas utiliser localement pour d’autres usages. Il faut donc être malgré tout attentif à cette ressource. Certains chercheurs parlent d’ailleurs depuis quelques années de l’électrolyse de l’eau de mer pour produire de l’hydrogène.

Si l’on dispose d’une électricité bas carbone et de ressources en eau utilisables de façon durable, la production d’hydrogène par électrolyse de l’eau peut être prometteuse du point de vue écologique.

Écologie et hydrogène : une question de rendements ?

Néanmoins, un autre problème se pose : celui du rendement. À ce stade, il faut comprendre que l’hydrogène n’est pas une énergie comme les autres. Comme on l’a vu, il y a plusieurs façons d’utiliser l’hydrogène. On peut l’utiliser comme carburant dans un moteur à combustion. Mais la plupart du temps, l’hydrogène n’est pas utilisé comme une énergie ou un carburant à proprement parler, que l’on utiliserait directement pour alimenter un moteur ou un équipement. Il est plutôt utilisé comme un « vecteur énergétique », c’est-à-dire un élément que l’on stocke dans une pile pour le transformer en énergie (en électricité) à la demande.

Pour utiliser de l’hydrogène dans une voiture par exemple, il faut donc produire l’hydrogène, comme on vient de le voir, puis le compresser ou le liquéfier, le transporter, puis le stocker dans une pile à combustible, qui enfin transformera cet hydrogène en électricité pour alimenter le moteur. Or à chaque étape de ces transformations énergétiques, de la production au stockage jusqu’à l’utilisation, une partie de l’énergie est perdue. Ce sont les principes de la thermodynamique.

Ainsi, lorsque l’on produit de l’hydrogène, près d’un quart de l’électricité utilisée pour la production est perdu, sous forme de chaleur notamment : on n’a qu’un rendement de à 75% environ. Il faut ensuite stocker cet hydrogène : comprimé, ou sous forme liquide. Là encore, cela engendre des pertes énergétiques. Pour l’hydrogène liquide, il faut le conserver à très basse température : encore des dépenses d’énergie.

Ensuite, lorsque l’on retransforme cet hydrogène en électricité, ou que l’on fait brûler cet hydrogène dans un moteur à combustion, on perd à nouveau une partie de l’énergie. Par exemple, selon l’ADEME, le rendement global d’une voiture à pile à combustible à hydrogène, de la production jusqu’au moteur, est d’environ 25%. Cela signifie que si l’on met une quantité 100 d’énergie au départ, on ne disposera que d’une quantité 25 d’énergie à la fin, pour faire avancer le véhicule. D’autres estimations tournent autour de 30, voire 38% au mieux.

Le rendement de l’hydrogène n’est donc pas très bon. C’est un facteur très important à prendre en compte pour évaluer son impact environnemental. En effet, cela signifie, grosso-modo, qu’il faut prévoir de produire quatre fois plus d’énergie que celle que l’on prévoit de consommer sous forme d’hydrogène. De ce fait, même si l’électricité utilisée au départ est relativement « bas carbone », le bilan écologique final peut être médiocre. Grosso modo, avec le mix électrique français (autour de 50 g de CO2/kWh), on obtiendra de l’hydrogène utilisable à une intensité carbone d’approximativement 110 g de CO2/kWh... Plus de deux fois pire donc, sans même compter les pertes de rendement liées à l’usage de l’hydrogène. Bien sûr, avec l’amélioration des procédés techniques, le rendement pourrait s’améliorer, mais il sera toujours plus faible que dans le cas d’une utilisation directe de l’électricité.

Cela dit, l’hydrogène, s’il est issu de productions plutôt durables (à partir d’énergies bas carbone et de ressources utilisées de façon soutenable), a tout de même un impact écologique vraisemblablement plus positif que les énergies fossiles, en tout cas, en termes d’émissions de CO2 : 110 g de CO2/kWh pour l’hydrogène contre un peu moins de 300 g de CO2/kWh pour de l’essence. En théorie, il est donc préférable, si c’est possible, d’utiliser de l’hydrogène pour remplacer les énergies fossiles.

Une solution pas toujours adaptée

Les questions qui se posent sont donc les suivantes : peut-on réellement remplacer l’usage des énergies fossiles par l’utilisation de l’hydrogène vert, si oui, comment, et qu’est-ce que cela implique ?

Répondre à ces questions n’est pas évident. D’abord parce qu’il n’y a pas de réponse unique. Remplacer les énergies fossiles par de l’hydrogène dans la mobilité quotidienne (les voitures) ne représente pas le même défi que d’utiliser de l’hydrogène dans les avions. Utiliser l’hydrogène comme alternative aux énergies fossiles dans l’industrie lourde n’implique pas les mêmes enjeux que de l’utiliser pour alimenter des chaudières domestiques.

Ensuite, les technologies évoluent : certaines applications impensables il y a 10 ou 20 ans commencent à émerger, les coûts qui sont aujourd’hui très élevés pour certaines technologies pourraient baisser, ou pas. Il n’est pas toujours simple de prévoir et d’anticiper ces évolutions.

Enfin, l’impact écologique d’une technologie à base d’hydrogène est parfois difficile à mesurer. Si une solution émet moins de CO2 mais qu’elle dégrade plus fortement la biodiversité, est-elle vraiment plus écologique ? Difficile d’arbitrer.

Toutefois, certaines caractéristiques de la production d’hydrogène font de ce vecteur énergétique une solution vraisemblablement plus adaptée à certains usages qu’à d’autres sur le plan écologique. Parmi ces caractéristiques, son rendement, encore lui, mais aussi sa densité énergétique.

On l’a vu, le rendement de l’hydrogène est faible, il est donc parfois moins intéressant que d’autres sources d’énergies dont le rendement est meilleur, pour un même usage. Pour le transport quotidien en voiture par exemple, l’électricité affiche un rendement plus intéressant que celui de l’hydrogène. Quitte à disposer d’une électricité bas carbone, autant l’utiliser directement pour rouler plutôt que de la transformer en hydrogène (avec des pertes) pour la retransformer en électricité (encore avec des pertes) dans une voiture à pile à combustible. D’autant que la mobilité quotidienne ne nécessite pas de très grandes quantités d’énergie : on fait rarement plus d’une centaine de kilomètre en une journée, et dans ce cas de figure, la batterie suffit. Les études indiquent d’ailleurs que la voiture électrique est plus écologique que la voiture à hydrogène, à distance parcourue égale.

Même chose pour le chauffage : les études montrent qu’il est plus intéressant d’utiliser directement l’électricité pour alimenter une pompe à chaleur, que de transformer l’électricité en hydrogène pour alimenter des chaudières ou des piles à combustible pour le chauffage. Trop de pertes énergétiques engendrent un impact écologique final pas si positif.

Mais dans certains cas, utiliser de l’électricité n’est pas possible, ou très complexe. C’est le cas quand on a besoin de grandes quantités d’énergie d’un coup et que l’on cherche une source d’énergie très dense, comme dans l’aviation ou le transport routier longue distance. Faire voler un avion avec une batterie électrique classique est difficile car une batterie suffisamment puissante pour faire voler un avion serait très lourde et encombrante, ce qui est à priori difficilement conciliable avec l’aviation où l’on cherche à optimiser le poids des appareils.

Avec l’hydrogène ce problème se pose moins, car c’est est un vecteur énergétique assez dense. Cela signifie qu’une quantité donnée d’hydrogène produit de grandes quantités d’énergie. C’est la raison pour laquelle l’industrie spatiale utilise depuis longtemps l’hydrogène liquide comme carburant. En embarquant « un peu » d’hydrogène dans une fusée ou un avion, on a à disposition de grandes quantités d’énergie utilisable sous forme de carburant (voire sous forme d’électricité). C’est pourquoi l’hydrogène est souvent présenté comme une solution d’avenir pour un avion plus durable, même si, dans les faits, il reste encore beaucoup de barrières techniques à lever pour que l’avion à hydrogène soit viable : stockage, taille et poids des réservoirs, production et transport de l’hydrogène, entre autre.

De la même façon, certains procédés industriels lourds, qui utilisent actuellement les énergies fossiles pourraient théoriquement utiliser à la place de l’hydrogène. C’est le cas des procédés de réduction nécessaires à la production d’acier pour lesquelles une énergie dense est nécessaire. Mais là encore, les barrières techniques sont innombrables.

Encore une fois, l’impact environnemental de tous ces procédés dépend à la fois des méthodes de production, de stockage et d’usage de l’hydrogène, et du rendement final de ces méthodes. En tout état de cause, cet impact n’est jamais nul. Il est toujours au moins supérieur d’un ordre de grandeur à l’impact des énergies bas carbone utilisées pour produire l’hydrogène, qui lui même n’est jamais nul.

Les défis de l’économie hydrogène

Lorsque l’on parle de l’avion à hydrogène « vert », de la voiture à hydrogène « durable » et même des procédés industriels à base d’hydrogène « zéro émission », il s’agit en fait d’abus de langage. Car aucune de ces technologies n’est « verte » ou « zéro émission ». Toutes ont des impacts environnementaux, plus ou moins prononcés en fonction de l’efficacité énergétique, des rendements, et des sources d’énergie utilisées.

Déployer l’hydrogène pour remplacer les énergies fossiles ne signifie donc pas passer à zéro impact environnemental. Cela déplace les impacts, les diminue aussi parfois, mais ne les annule pas. Ainsi, pour déployer à grande échelle l’usage de l’hydrogène, il faudrait disposer de très grandes quantités d’énergie bas carbone. Cela signifie donc construire une quantité immense d’infrastructures de production comme des éoliennes, des panneaux solaires et des centrales nucléaires.

Compte tenu des faibles rendements de l’hydrogène, la rhétorique consistant à dire que l’on pourra utiliser les « surplus » de la production électrique renouvelable pour produire de l’hydrogène vert ne tient pas. Les surplus nécessaires à la production de l’hydrogène seraient absolument considérables. Il faudrait surdimensionner ces infrastructures, pour générer suffisamment de surplus : assez pour subvenir à nos besoins électriques pré-existants (qui augmentent) et pour produire tout cet hydrogène. Par exemple, selon les estimations de chercheurs indépendants l’Atecopol de Toulouse, il faudrait l’équivalent de la production de 16 réacteurs nucléaires (un tiers du parc français) pour alimenter en hydrogène les avions circulant par Roissy.

En plus de ces sources de production, il faudrait construire en masse les électrolyseurs, les infrastructures de stockage de l’hydrogène, et bien-sûr, des piles à combustible. Autant de choses à construire qui, elles aussi, polluent.

Pour construire tout cela, il faudrait des matériaux, des ressources. Ressources qu’il faudrait extraire. Cet « extractivisme » aura nécessairement des conséquences sur l’environnement, en termes de destruction des paysages, d’impact sur la biodiversité, de pollution des eaux et des sols. Certaines études estiment ainsi que la transition vers les énergies renouvelables, certes bénéfique pour le climat, pourrait aggraver la crise de la biodiversité. On diminue donc le problème climatique, mais au prix d’une atteinte plus forte à la biodiversité. Avec l’hydrogène, les besoins en énergie bas carbone étant décuplés, ce problème est lui aussi décuplé.

Hydrogène : cinquante nuances de vert et de gris

L’hydrogène « vert » est donc plutôt vert de gris, parfois même gris tout court. Il ne faut donc pas s’attendre à pouvoir demain, grâce à l’hydrogène, faire tout ce qu’on fait aujourd’hui grâce aux énergies fossiles, mais sans impact environnemental, en version 100% écolo. Ce discours là est un mythe. Et il convient de déconstruire ce mythe au plus vite pour ne pas s’engouffrer tête baissée dans une technologie qui, si elle a des avantages, est loin d’être une solution miracle.

Le discours ambiant sur l’hydrogène tend à laisser croire qu’il nous permettra de faire l’économie de la réflexion sur nos modes de production et de consommation. Pas besoin de prendre moins l’avion, de moins rouler en voiture puisque nous aurons demain l’avion à hydrogène et la voiture à hydrogène.

Pourtant, les données montrent que ce n’est pas vrai. Même « à hydrogène » l’avion et la voiture, tels qu’ils sont utilisés aujourd’hui, resteront des catastrophes environnementales majeures. Même à hydrogène, notre économie continuera de générer d’immenses pollutions, incompatibles avec les objectifs de l’Accord de Paris et avec les limites planétaires.

Vers un déploiement raisonné et écologique de l’économie hydrogène

Si l’on veut limiter la casse engendrée par la crise écologique, la transition vers une économie hydrogène doit donc être menée de façon raisonnée d’une part, et surtout, en même temps qu’une transition de fond sur nos modes de production, de déplacements, notre façon de vivre.

Une transition raisonnée vers l’hydrogène, c’est d’abord se demander si l’hydrogène est réellement pertinent au regard des autres alternatives disponibles. Or, comme on l’a vu, dans certains secteurs, les données actuelles ne plaident pas vraiment en faveur de l’hydrogène. C’est le cas dans l’automobile : certes, l’hydrogène permet une mobilité sans limite d’autonomie ou presque, mais au regard de nos modes de vie, cet avantage paraît dérisoire comparé au surcoût environnemental qui lui est lié. La mobilité quotidienne ne pourra de toute façon pas rester ce qu’elle est aujourd’hui, une mobilité fondée sur l’usage constant et irréfléchi de la voiture. Cela est d’autant plus vrai que dans les prochaines décennies, des milliards d’individus sur Terre chercheront, eux aussi, à vivre et se déplacer et qu’il faudra bien un modèle permettant à tous de le faire. L’hydrogène n’est pas le meilleur allié pour fonder ce modèle d’une mobilité sobre et équitable : mobilités douces, transports en commun et transformations des espaces urbains sont bien plus prioritaires.

Pour chaque usage potentiel de l’hydrogène, il faut faire ce travail de comparaison : l’impact environnemental est-il meilleur que celui d’une technologie pré-existante, moins complexe peut-être ? Y’a-t-il de meilleurs outils pour réduire notre impact ? Par exemple, l’avion à hydrogène sera-t-il vraiment moins polluant que son équivalent au bio-carburant ? Pas sûr.

Dans les cas où l’hydrogène s’avèrerait l’alternative la plus intéressante, il faudra encore adapter nos usages à la réalité écologique. Même si l’avion à hydrogène sera peut-être, demain, moins polluant que l’avion au kérosène d’aujourd’hui ou que l’avion aux bio-carburants (et ce n’est pas garanti), il ne le sera de toute façon pas suffisamment pour nous permettre de soutenir une aviation généralisée, massive et en croissance. L’avion, même à hydrogène, restera un mode de transport polluant et devra rester l’exception dans nos usages de mobilité. Cela implique dès aujourd’hui de se demander comment repenser notre rapport aux longues distances, entre sobriété et alternatives.

Les mêmes questions se posent pour l’industrie, ou les consommations énergétiques domestiques.

Mettre l’hydrogène au service d’un nouveau modèle

En résumé, l’hydrogène a des avantages certains : il est abondant, permet de remplacer avantageusement certains usages des énergies fossiles, il peut être complémentaire à la transition vers des sources de production d’électricité renouvelable. Mais l’hydrogène n’est pas une solution miracle du point de vue écologique. Il génère des pollutions, et son faible rendement le rend peu avantageux pour les usages où l’électricité peut déjà remplacer les énergies fossiles.

Si l’hydrogène est perçu et utilisé comme un moyen de perpétuer un modèle de société non-soutenable, fondé sur une croissance infinie des consommations et des productions, il produira des destructions écologiques majeures. Il ne sera alors pas un outil de la transition écologique, mais un palliatif limité, ne faisant que déplacer nos impacts environnementaux. Mettre un modèle économique écocide sous perfusion d’hydrogène ne le rendra pas durable pour autant.

Si en revanche, l’hydrogène est conçu comme un outil complémentaire à la transition vers un nouveau modèle de société, fondé sur la sobriété, alors il peut avoir un rôle majeur pour se substituer aux énergies fossiles là où les solutions n’existent pas encore. Mais il doit alors être encadré, régulé.

Tout l’enjeu est là : mettre l’hydrogène au service d’un vrai changement de paradigme.
Et c’est précisément l’inverse de ce que nous sommes en train de faire.
un futur marché commun de

Paquet hydrogène et gaz : les fondations d’un futur marché commun de l’hydrogène en Europe

le 15 décembre 2021

Dévoilé le 15 décembre par la Commission européenne, le Paquet sur le marché de l’hydrogène et du gaz décarboné propose de nouvelles règles pour un marché commun de l’hydrogène. Il constitue la première étape d’un long processus visant à faire de l’hydrogène une marchandise comme les autres échangeable à l’échelle de l’Union.

Le Paquet sur le marché de l’hydrogène et du gaz décarboné est une réforme globale incluant une proposition de révision du règlement 715/2009 et une proposition de révision de la directive 2009/73 concernant les règles communes pour les marchés intérieurs des gaz renouvelables et naturels et l’hydrogène, qui vient en complément du Paquet Fit for 55 présenté en juillet dernier. Avec ce dernier, l’accent était mis sur l’efficacité énergétique, l’électrification et le développement des énergies renouvelables.

La Commission européenne fait cependant le constat que l’électrification directe ne pourra seule assurer la décarbonation de l’économie européenne. Les gaz décarbonés, dont l’hydrogène, ont un rôle à jouer pour décarboner des secteurs comme l’industrie et les transports lourds. C’est dans cette optique que le Paquet hydrogène et gaz vient introduire de nouvelles règles pour encadrer un futur marché commun de l’hydrogène, l’hydrogène ayant vocation aux yeux de l’exécutif européen à devenir une marchandise comme les autres au sein de l’Union à horizon 2030.

Pour développer l’hydrogène, la Commission propose avec ce nouveau Paquet d’introduire une certification de l’hydrogène bas-carbone (I), d’adopter une approche souple et progressive autour de l’échéance clef de 2030 pour réguler un marché de l’hydrogène encore en phase d’amorçage (II), d’instaurer une gouvernance et une planification du réseau européen d’hydrogène (III), de légiférer sur le cas de l’injection d’hydrogène dans le réseau de gaz naturel (IV), et enfin d’accorder des droits aux consommateurs d’hydrogène (V).

I. La définition et la certification de l’hydrogène bas-carbone

Avec ce Paquet, la Commission reconnait le rôle que doit jouer l’hydrogène bas-carbone dans la transition énergétique, notamment « à court et moyen terme pour réduire rapidement les émissions des carburants existants et soutenir l’essor des carburants renouvelables tels que l’hydrogène renouvelable » (considérant 9 de la directive).

Il n’est prévu en revanche aucune mesure de soutien à l’hydrogène bas-carbone, ni du côté de la demande (de type cibles dans l’industrie ou les transports), ni côté offre via des mécanismes de financement direct.

1. Une définition en devenir de l’hydrogène bas-carbone

La directive introduit une définition pour l’hydrogène bas-carbone – exclu du Paquet Fit for 55 cet été – entendue comme « un hydrogène dont le contenu énergétique est dérivé de sources non-renouvelables et respecte un seuil de réduction des émissions de gaz à effet de serre de 70 % » (art. 2 de la directive). Cette définition appelle à deux commentaires particuliers :

  • Elle respecte un principe de neutralité technologique, en ce qu’elle couvre à la fois l’hydrogène produit à partir de gaz naturel avec abattement des émissions de GES grâce à des techniques de capture, séquestration ou utilisation du carbone (« hydrogène bleu »), mais aussi l’hydrogène produit par électrolyse à partir d’électricité nucléaire ou d’électricité bas-carbone soutirée d’un mix électrique décarboné (« hydrogène rose » ou « hydrogène jaune »).

  • Elle reste toutefois incomplète en l’absence d’un comparateur à partir duquel calculer l’abattement requis de 70 %, et d’une méthodologie de calcul des réductions des émissions de GES en analyse de cycle de vie. A l’inverse, l’hydrogène renouvelable est, lui, défini dans la proposition de révision de la directive sur les énergies renouvelables (RED III) comme un « carburant renouvelable d’origine non-biologique » (RFNBO) respectant un critère de réduction des émissions de GES de 70 % par rapport à un comparateur de 94 gCO2eq/MJ (gazole), correspondant à un seuil à 3,38 kgCO2eq/kgH2. Pour rappel enfin, l’annexe I du règlement délégué 2021/2139 sur la taxonomie des investissements durables définit un seuil à 3,0 kgCO2eq/kgH2 pour rendre la fabrication d’hydrogène compatible avec la transition écologique.

Un acte délégué de la Commission européenne est attendu d’ici le 31 décembre 2024 pour préciser ces aspects centraux de méthodologie carbone (art. 8 de la directive). La méthodologie devra notamment éviter le double comptage de crédits pour les émissions de CO2 évitées. Des évolutions sont à attendre, la Commission européenne indique d’emblée que le critère d’abattement de 70 % « devrait devenir plus strict pour l’hydrogène produit dans les installations qui commencent à fonctionner à partir du 1er janvier 2031, afin de tenir compte des évolutions technologiques et de mieux stimuler les progrès dynamiques vers la réduction des émissions de gaz à effet de serre provenant de la production d’hydrogène » (considérant 9 de la directive).

La directive introduit également au passage une terminologie pour les gaz bas-carbone, entendus comme l’hydrogène bas-carbone, la part gazeuse des carburants à carbone recyclé, et les carburants synthétiques gazeux dérivés de l’hydrogène bas-carbone, ainsi que pour les carburants bas-carbone, définis comme des gaz bas-carbone auxquels s’ajoutent les carburants à carbone recyclé et les carburants de synthèse sous forme liquide.

2. Un système européen de certification des carburants et gaz bas-carbone

Pour s’assurer de la conformité des produits fabriqués dans l’UE et des produits importés à ces définitions, un système de certification des carburants et gaz renouvelables et bas-carbone sera mis en place à l’échelle de l’UE, selon un fonctionnement en bilan massique (art. 8 de la directive). Des schémas volontaires nationaux ou internationaux pourront définir les normes de réduction des GES pour la production d’hydrogène bas-carbone à partir desquelles les opérateurs économiques seront tenus de prouver la conformité de leurs produits aux exigences de réduction des émissions.

Les États membres veilleront à ce que les opérateurs économiques soumettent des informations fiables sur le respect du seuil de 70 % et à ce qu’ils mettent en place une norme adéquate d’audit indépendant des informations soumises. L’audit doit vérifier que les systèmes utilisés par les opérateurs économiques sont exacts, fiables et protégés contre la fraude. Les informations devront comprendre l’origine géographique et le type de matière première utilisées, être mises à disposition des consommateurs sur les sites web des opérateurs, des fournisseurs ou des autorités compétentes concernées, et mises à jour sur une base annuelle.

II. Un cadre flexible pour un marché commun de l’hydrogène et les infrastructures d’hydrogène

Le règlement et la directive établissent des règles communes pour un futur marché intérieur de l’hydrogène, et notamment pour les infrastructures de transport, de distribution et de stockage d’hydrogène. Ces règles concernent l’accès au marché ou les diverses procédures auxquelles doivent se soumettre les opérateurs.

Sur le modèle du marché du gaz et du marché de l’électricité, des opérateurs de réseaux d’hydrogène seront responsables de l’opération, de la maintenance et du développement d’un réseau de transport d’hydrogène, en lien avec les autres gestionnaires de réseaux d’électricité et de gaz (art. 46 de la directive).

Ce réseau d’hydrogène s’appuiera sur le réseau de gaz existant. Des clauses du grand-père doivent faciliter l’octroi de permis, d’autorisations de concessions pour la reconversion d’infrastructures gazières existantes vers des infrastructures dédiées à l’hydrogène (art. 7 de la directive).

1. Des règles de dégroupage assouplies

Des règles de dégroupage doivent s’appliquer aux opérateurs de réseaux d’hydrogène pour éviter tout risque de conflits d’intérêt par les gestionnaires de réseaux. Ces règles sont de deux ordres :

  • Un principe de séparation verticale, entre les activités de production/fourniture d’hydrogène et de transport/stockage/distribution d’hydrogène (art. 62 de la directive).

  • Un principe de séparation horizontale entre les activités gaz, électricité et hydrogène, les subventions croisées entre actifs étant incompatible avec un principe de tarifs d’accès au réseau reflétant les coûts (art. 4 du règlement, art. 63 de la directive).

Toutefois, une période transitoire jusqu’en 2030 doit permettre certaines souplesses dans l’application de ces principes, afin d’accompagner la phase de montée en puissance du marché de l’hydrogène :

Des modèles d’opérateurs de réseaux d’hydrogène intégrés peuvent être autorisés temporairement par les États membres jusqu’en 2030 (art. 62 de la directive). Une dissociation des comptes doit être requise (art. 69 de la directive). Passée cette échéance, afin d’assurer un accès non-discriminatoire, ces derniers pourront préserver la propriété de leur réseau si sa gestion est confiée à un opérateur de réseau indépendant.

Des subventions croisées entre bases d’actifs régulés peuvent être décidées par des États membres, dans des conditions strictes et encadrées (art. 4 du règlement). Dans les premières phases de développement des infrastructures, elles doivent contribuer à définir des tarifs prévisibles pour les premiers utilisateurs du réseau et réduire les risques d’investissement pour les opérateurs de réseau, dans une situation où la capacité disponible est faible et où règne une incertitude sur les perspectives de la demande. Elles devront toutefois être proportionnelles, transparentes, limitées dans le temps et fixées sous contrôle réglementaire. Enfin, ces subventions croisées ne devront pas être payées par les consommateurs d’autres États membres. Les activités d’exploitation des réseaux d’hydrogène doivent en revanche être séparées – au moins sur le plan de la forme juridique et comptable – des autres activités d’exploitation de réseaux gaz ou électricité (art. 63 de la directive).

2. L’accès des tiers au réseau et les tarifs d’accès

L’accès des tiers au réseau devra par ailleurs être garanti pour l’accès aux infrastructures de transport et de stockage d’hydrogène et aux terminaux d’import (art. 6 du règlement, art, 31, 32, 33 de la directive). Les gestionnaires de réseaux d’hydrogène devront se conformer aux exigences imposées aux gestionnaires de réseaux de transport de gaz, telles que l’accès non-discriminatoire au réseau, l’attribution des capacités, la gestion de la congestion, l’équilibrage, et la publication des tarifs pour chaque point du réseau sur une plateforme en ligne exploitée par un Réseau européen des gestionnaires de réseaux d’hydrogène.

Afin d’assurer la sécurité d’approvisionnement, les opérateurs de réseaux d’hydrogène devront évaluer régulièrement la demande du marché pour déterminer de nouveaux investissements (art. 6 et 8 du règlement). La capacité maximale du réseau devra être communiquée aux acteurs du marché, et la durée maximale des contrats d’accès au réseau sera de 20 puis 15 ans, les régulateurs ayant la possibilité d’imposer des durées plus courtes.  

L’accès des tiers sur la base de tarifs d’accès réglementés devrait être la règle par défaut à horizon 2030 pour les installations de transport et de stockage d’hydrogène (art. 31 et 33 de la directive). Afin de garantir la souplesse nécessaire aux opérateurs et de réduire les coûts administratifs pendant la phase de montée en puissance du marché de l’hydrogène, les États membres auront la possibilité d’autoriser le recours à l’accès négocié des tiers jusqu’en 2030. Les terminaux d’hydrogène, où transiteront des importations d’hydrogène ou d’ammoniac liquides, resteront soumis à des tarifs négociés (art. 32 de la directive).

Pour faciliter l’intégration des gaz renouvelables et bas-carbone, le règlement introduit des réductions de tarifs d’accès au réseau jusqu’à 75 %, à la fois au niveau de l’injection par une installation de production et au niveau de l’entrée et de la sortie d’une installation de stockage (art. 16 du règlement). Les tarifs d’accès au réseau d’hydrogène sont, eux, totalement exemptés au niveau des interconnexions transfrontalières (art. 6 du règlement). Pour en bénéficier, les utilisateurs du réseau devront justifier de la consommation de gaz renouvelables ou bas-carbone grâce aux certificats émis via une base de données de l’UE.

3. Les dérogations accordées aux réseaux privés

Les réseaux privés d’hydrogène peuvent se voir octroyer des dérogations et exemptions au régime régulé jusqu’en 2030, notamment en termes d’accès des tiers au réseau et de séparations verticales et horizontales (art. 47 et 48 de la directive).

Il existe aujourd’hui plus de 1 600 km de canalisations en opération en Europe appartenant à Air Liquide, Air Products ou Linde, qui relient directement des producteurs d’hydrogène à des consommateurs industriels, dont 303 km en France.

Avec ces mesures, la Commission européenne reconnait ici le rôle des hubs hydrogène locaux, géographiquement limités, dans le développement par étapes de la filière hydrogène. Néanmoins, ces dérogations devront prendre fin si l’opérateur en fait la demande au régulateur, si le réseau concerné est relié à un autre réseau d’hydrogène, ou si le réseau ou ses capacités sont étendues. Ces exemptions prennent fin après 2030.

4. Le contrôle de la qualité de l’hydrogène et des fuites d’hydrogène

Les opérateurs de réseau d’hydrogène seront responsables du contrôle de la qualité de l’hydrogène, en conformité avec des standards de qualité définissant une pureté de l’hydrogène (art. 49 de la directive). Une approche harmonisée au niveau de l’UE sur le contrôle de la qualité de l’hydrogène aux interconnexions transfrontalières doit faciliter l’intégration du marché (art. 39 du règlement).

Ils auront également à leur charge la prévention des fuites d’hydrogène (art. 49 de la directive). Les opérateurs de réseaux de transport, de stockage et de terminaux d’import devront mener régulièrement des opérations de détection des fuites et de réparation des équipements.

5. Vers un réseau européen d’envergure internationale

Chaque opérateur de réseau hydrogène devra construire des capacités transfrontalières suffisantes pour l’intégration d’une infrastructure européenne de l’hydrogène (art. 46 de la directive). La directive couvre également le cas des interconnexions hydrogène avec des pays tiers (art. 49 de la directive). Des accords internationaux entre l’UE et un pays tiers devront spécifier les attentes en termes d’accès des tiers au réseau, de séparations, et de certification de l’hydrogène renouvelable et bas-carbone. Une façon pour la Commission européenne de reconnaitre l’importance des importations d’hydrogène.

Enfin, les projets d’interconnexion d’hydrogène pourront désormais faire l’objet d’une demande de financement s’ils entrent dans le champ d’application des plans décennaux de développement du réseau à l’échelle de l’UE, à condition qu’ils ne soient pas déjà couverts par les projets importants d’intérêt européen commun (article 53 de la directive gaz).

III. Une gouvernance et une planification pour les réseaux européens d’hydrogène

Un Réseau européen des gestionnaires de réseaux d’hydrogène (European Network of Network Operators for Hydrogen – ENNOH) sera créé à partir du 1er septembre 2024, pour assurer la bonne gestion du réseau et des échanges transfrontaliers (art. 40 du règlement). Le ENNOH préparera des codes de réseaux, qui ne remplaceront toutefois par les codes de réseaux nationaux pour les affaires domestiques, et assurera la planification des infrastructures d’hydrogène (art. 42 du règlement).

D’ici sa création, une plateforme temporaire sera mise sur pieds par la Commission en mobilisant l’ACER, l’ENTSOG, l’ENTSO-E, la nouvelle association pour les gestionnaires de réseaux de distribution européens et les acteurs de marché (art. 41 du règlement). Elle s’occupera des travaux préparatoires et des enjeux de développement d’un réseau d’hydrogène, tandis que l’ENTSOG sera responsable du développement des plans de développement des réseaux d’hydrogène jusqu’à la mise en place de l’ENNOH.

Tous les deux ans, l’ENNOH devra soumettre un Plan de développement du réseau d’hydrogène à dix ans (TYNDP) non-contraignant, évaluant notamment l’offre européenne d’hydrogène (art. 43 du règlement). La planification des réseaux d’hydrogène suivra un objectif de couplage sectoriel et s’inscrira en lien avec les planifications des réseaux de gaz et d’électricité. Tous les deux ans à partir du 15 mai 2026, l’ENNOH devra publier un rapport sur la qualité de l’hydrogène du réseau.

IV. Le cas de l’injection d’hydrogène dans le réseau de gaz naturel

Si la Commission européenne ne souhaite pas l’encourager outre mesure, les États membres peuvent choisir d’accepter des taux de mélange d’hydrogène dans leurs réseaux de gaz naturel. Pour limiter les risques de fragmentation du marché, la Commission européenne propose une approche harmonisée au niveau européen sous la forme d’un plafond de 5 % en volume d’hydrogène en mélange avec le gaz, que les gestionnaires de réseaux de transport de gaz seront tenus d’accepter aux interconnexions gazières à partir du 1er octobre 2025 partout dans l’UE (article 20 du règlement). Des GRT de pays voisins sont libres d’accepter des taux en mélange plus élevés au niveau de leurs interconnexions transfrontalières.

V. Les droits des consommateurs

Le Paquet applique également un droit des consommateurs allégé à l’hydrogène, en raison de la nature des consommateurs de type entreprises ou collectivités territoriales. Tous les clients doivent être libres d’acheter de l’hydrogène au fournisseur de leur choix et avoir accès à plus d’un fournisseur d’hydrogène en même temps (art. 3 et 4 du règlement).

Le délai nécessaire pour changer un client de fournisseur ne doit pas dépasser trois semaines et être inférieur à 24 heures d’ici 2026 (art. 11 de la directive). Pas de frais de changement de fournisseur pour les petites entreprises et les ménages.

Des factures au moins tous les six mois et des stipulations sur les informations requises, y compris les émissions, les comparaisons de coûts et les informations visant à faciliter le changement de fournisseur (art. 15 de la directive).

Enfin, des compteurs intelligents d’hydrogène doivent être déployés pour permettre de mesurer avec précision la consommation, de fournir des informations sur le temps réel d’utilisation et de transmettre et recevoir des données à des fins d’information, de suivi et de contrôle, par voie électronique. (art. 17 de la directive).

La recherche française se fédère pour répondre aux défis de l’hydrogène

09 mars 2021

CNRS

La Fédération Hydrogène du CNRS, créée le 1er janvier 2020 et regroupant plus de 270 chercheurs et 28 laboratoires CNRS, en partenariat avec des universités, organismes de recherche et écoles d’ingénieurs officialise son lancement le 9 mars lors d’un événement digital.

L’hydrogène est l’élément le plus simple, le plus léger et le plus répandu sur la planète. Mieux encore, il peut être exploité sous forme d’énergie propre en l’associant avec de l’oxygène pour produire de l’électricité dans une pile à combustible. Le tout ne dégageant que de l’eau et pas un seul gramme de carbone. Si l’invention de la pile à combustible date de 1839, le marché de l’hydrogène peine toujours à décoller, atteignant aujourd’hui une production de 60 millions de tonnes par an. Hormis la concurrence du prix faible des énergies fossiles et la complexité et mise en place des technologies de piles à combustible, le stockage et transport de l’hydrogène freine aussi son adoption par de nombreux secteurs industriels.

De plus, il reste un enjeu de taille : si l’hydrogène est un consommable « propre », il ne l’est pas forcément dans sa phase de production. Loin de là. Aujourd’hui, 95 % de sa production mondiale se fait à partir d’énergies fossiles (gaz naturel, pétrole)1. Pour un hydrogène décarboné2 – dit « vert », il faut le produire par électrolyse3, qui avec les technologies existantes le rend 4 fois plus cher que ses concurrents fossiles. Ce sont ces nombreux défis que la Fédération Hydrogène du CNRS (FRH2), lancée officiellement cette semaine, compte bien relever pour permettre à cette « énergie du futur » de devenir un élément clé de la transition énergétique.

Scientifique tenant un flacon qui contient du nitrate de Nickel (liquide sans danger) servant dans la fabrication de cellule d’électrolyseur. © Jean-Claude MOSCHETTI/IMN/CNRS Photothèque

« Prévoir le système du régime énergétique de l’hydrogène d’ici 20 ans » 

Créée il y a un an le 1er janvier 2020, la Fédération rassemble plus de 270 chercheurs, enseignants chercheurs et ingénieurs du CNRS au sein de 28 laboratoires engagés dans le domaine de l’hydrogène4« Il s’agit d’affirmer la place du CNRS comme acteur incontournable de la R&D sur l’hydrogène au niveau international », explique son directeur Olivier Joubert, directeur de la Fédération Hydrogène et chercheur à l’Institut de matériaux Jean Rouxel5. Objectif principal :  coordonner les efforts de recherche de ces nombreuses équipes sur les grands enjeux de l’hydrogène décarboné, allant de sa production, à sa purification, à son stockage, en passant par la production de systèmes pour son utilisation comme les piles à combustible. « Il faut faciliter la diffusion des connaissances sur la recherche actuelle à travers les échanges et les collaborations aussi bien en interne, qu’avec nos partenaires industriels et historiques – par exemple le CEA. L’objectif est d’améliorer les systèmes actuels pour qu’ils soient plus durables, robustes et moins couteux, mais aussi de de prévoir le système sur lequel se basera le régime énergétique de l’hydrogène d’ici 15 à 20 ans ! », il rajoute.

Un plan national sur l’hydrogène décarboné

Si la communauté de la recherche sur l’hydrogène a commencé à se fédérer il y a plus de vingt ans sous la forme de Groupements de recherche (GdR) successifs6, la naissance de FRH2 est due à « l’alignement des planètes », notamment avec des poids lourds de l’industrie tels que Michelin, Air Liquide, EDF souhaitant s’engager pleinement sur l’hydrogène. « C’est important », souligne Olivier Joubert, car « si nous ne montons pas dans le train hydrogène maintenant, nous allons le perdre et d’autres pays en prendrons la tête. »

C’est pour accompagner cet intérêt mondial sur l’hydrogène que le gouvernement français a imaginé le Plan national sur l’Hydrogène financé à hauteur de 7,2 milliards d’euros et présenté le 9 septembre dernier par la ministre de la Transition écologique, Barbara Pompili et le ministre de l’Économie, des Finances et de la Relance, Bruno Le Maire. Un plan dessiné en trois volets : le premier pour décarboner l’industrie en faisant émerger une filière française de l’électrolyse; le second pour développer une mobilité lourde à hydrogène décarboné et le troisième pour soutenir la recherche, l’innovation et le développement de compétences afin de favoriser les usages de demain. « Ce troisième volet se décline sous la forme d’un Programme et équipements prioritaires de recherche (PEPR) sur l’hydrogène », explique Abdelilah Slaoui, pilote scientifique pour le CNRS du PEPR (voir encadré) et Responsable de le cellule énergie du CNRS7.

 Cette station de ravitaillement en hydrogène à Nantes est ouverte aux particuliers utilisant des voitures à hydrogène, mais également aux utilitaires et aux bus. L’avantage de l’hydrogène par rapport aux véhicules électriques à batterie réside d’une part dans l’augmentation drastique de l’autonomie : un véhicule familial peut parcourir environ 100 km avec 1 seul kilogramme d’hydrogène. Et d’autre part dans la réduction tout aussi importante des temps de recharge puisqu’il est possible de faire le plein en quelques minutes seulement.© Jean-Claude MOSCHETTI/IMN/CNRS Photothèque

Les enjeux de l’hydrogène

Car il faut décarboner l’industrie de l’hydrogène, « mais également la développer », souligne Olivier Joubert. En ce qui concerne par exemple la production d’hydrogène vert : elle peut être « accélérée par le développement de nouvelles technologies d’électrolyseurs plus performants » ou « en faisant davantage appel aux sources d’énergies renouvelables type éoliens/solaires/hydrauliques ou encore au nucléaire », dont la France est équipée.

Un avis que partage Abdelilah Slaoui : « Les technologies d’électrolyseurs actuelles ne sont pas assez développées pour produire de l’hydrogène vert. » S’il indique que « leurs rendements doivent être améliorés », il pointe également l’ensemble de la chaîne hydrogène à développer. Les constituants doivent également être « efficaces, accessibles, durables et encore mieux bio-sourcés. » Car aujourd’hui, la production d’hydrogène vert coûte 4 fois plus cher que celui produit avec des énergies fossiles—appelé hydrogène « gris ».  Il faut donc « améliorer le coût, la durée et la robustesse » des technologies de l’hydrogène vert, mais assurer aussi que la filière industrielle soit « prête à produire en grande quantité ces nouvelles technologies pour favoriser leur déploiement dans l’industrie », indique Olivier Joubert soulignant que la Fédération accompagnera la filière industrielle dans les domaines de la mobilité par l’énergie électrique des batteries et de l’énergie décarbonée, dans le cadre du Plan national sur l’hydrogène du gouvernement.

Production, stockage, mobilité

Le spectre très large des expertises des chercheurs de la Fédération permettra d’aborder des enjeux de recherche sur l’hydrogène allant de la synthèse et la caractérisation de matériaux au diagnostic système en passant par de la modélisation multi-échelle. La Fédération a délimité quatre axes principaux de recherche. Le premier concerne la production de l’hydrogène et s’intéresse par exemple aux électrolyseurs haute température permettant « d’obtenir des rendements très élevés et de diminuer le coût énergétique », explique Olivier Joubert. « Cela permettrait alors d’obtenir un coût d’hydrogène vert équivalent à ceux de l’hydrogène gris. » Le deuxième concerne le stockage, « séparé en deux grands types » : sous forme gazeuse avec un réservoir au sein duquel « le carbone reste énormément présent et qu’il faut diminuer » et sous forme solide « avec un hydrogène beaucoup plus stable ». Les troisièmes et quatrièmes axes concernent les usages en mobilité et les usages stationnaires. « La voiture à hydrogène de Toyota a une pile à combustible contenant 40g de platine – ce qui explique entre autre son prix actuel. » Pour obtenir un coût raisonnable, « il faudrait diviser par 3 ou par 4 cette teneur en platine ! Mais ce faisant, il faut réussir à préserver les performances de la voiture », pointe Olivier Joubert.

Scientifique dans la salle des fours de l’Institut des matériaux Jean Rouxel (IMN) à Nantes. Après avoir déposé un échantillon à l’intérieur du tube métallique, le tube est refermé. Un gaz sera injecté dans ce tube pour « traiter thermiquement » l’échantillon et transformer l’oxyde de nickel en nickel métallique – un matériau utilisé dans une cellule d’électrolyseur ou de pile à combustible. © Jean-Claude MOSCHETTI/IMN/CNRS Photothèque

Vers un Groupement d’intérêt scientifique

Par la création de la Fédération Hydrogène, le CNRS a souhaité se recentrer sur le noyau actif des laboratoires du CNRS. Pour autant, les anciens collaborateurs de l’ancien GdR « HySPàC » – les laboratoires du CEA et les laboratoires industriels – ont toutes leurs places. « A l’époque, le GdR regroupait 73 laboratoires. Cela donnait lieu à de grandes réunions composées de centaines de participants, et nous souhaitons préserver cette dynamique », conclut Olivier Joubert. C’est dans cet intérêt que le CNRS via la Cellule Energie prépare actuellement le montage d’un Groupement d’intérêt scientifique (GIS) intitulé « Initiative Française sur l’hydrogène, IFHy », rassemblant à ce stade ses anciens partenaires, le CEA et un club d’industriels.

PEPR Hydrogène

Ce Programme et équipements prioritaires de recherche (PEPR) s’inscrit dans le cadre du quatrième programme d’investissements d’avenir (PIA4) du gouvernement français. Confié au CNRS et au CEA pour son pilotage scientifique car grands acteurs de recherche sur la thématique de l’hydrogène en France, il dispose d’un budget de 80 millions d’euros sur une durée de 7 à 8 ans. « Nous sommes actuellement en train de finaliser les grands axes de travail pour des projets ciblés à maturité élevé, des appels à projet sur des thématiques fortement émergentes et des appels à manifestation d’intérêt pour structurer la communauté sur des thématiques transverses » explique Abdelilah Slaoui. « Le PEPR portera sur toute la chaîne de valeur : production, stockage, utilisation et conversion, ainsi que les aspects transverses socio-technico-économiques, incluant les impacts et les risques. » Un travail préparatoire auquel la Fédération Hydrogène du CNRS a fortement contribué, en parallèle avec les conférences et associations d’universités ou d’écoles et des EPIC travaillant dans le domaine de l’hydrogène.

Le lexique utile de l’hydrogène

AFHYPAC

Association Française pour l’Hydrogène et les Piles à combustible. Elle fédère les acteurs de l’hydrogène et des piles à combustible en France : entreprises, laboratoires et instituts de recherche, pôles de compétitivité, collectivités territoriales et associations régionales. Avec le soutien de l’ADEME (Agence de Maîtrise de l’Energie), l’AFHYPAC assure l’animation de cette filière industrielle d’avenir.

Alcaline

Rien à voir avec une marque de piles. C’est en fait le nom du procédé d’électrolyse le plus employé dans l’industrie, utilisant une solution aqueuse à base de potasse. Les autres techniques sont l’électrolyse acide de type PEM (avec un électrolyte solide à membrane polymère conductrice de protons) et l’électrolyse à haute température.

Bleu (hydrogène bleu)

L’hydrogène bleu se situe entre le gris (issu des hydrocarbures et émettant beaucoup de CO2) et le vert (plus vertueux car obtenu à partir d’énergies renouvelables). Il s’agit en fait d’un produit un peu plus écologique. A la base, cet hydrogène est produit à partir de gaz, mais le captage de CO2 permet de réduire son impact environnemental. La technique consiste à “capturer” le dioxyde de carbone, puis de le stocker dans le sous-sol terrestre (ou le valoriser d’une manière ou d’une autre) pour éviter son rejet dans l’atmosphère. L’hydrogène bleu sera un mode intermédiaire, avant de pouvoir faire de la production en masse d’hydrogène vert.

Brun (hydrogène brun)

Il s’agit d’un hydrogène obtenu par gazéification du lignite, une roche sédimentaire intermédiaire entre la tourbe et la houille. Le lignite est un charbon composé de 65 à 75 % de carbone.

Catalyseur

Cet équipement est utilisé dans l’électrolyse de l’eau pour produire de l’hydrogène vert. C’est un élément déterminant qui permet d’accélérer la dissociation des molécules d’eau. Il utilise essentiellement du platine, mais des recherches sont engagées pour utiliser des matériaux moins chers, comme par exemple du cuivre dopé avec de l’oxyde de chrome et du nickel.

Conversion

L’hydrogène est un vecteur énergétique quasiment inexistant dans la nature à l’état moléculaire. Il faut donc le produire avant de l’utiliser ou éventuellement le stocker. On y parvient par divers procédés : le reformage ou gazéification d’hydrocarbures, l’électrolyse de l’eau ou la dissociation thermochimique de l’eau ou de la biomasse. La conversion en hydrogène par électrolyse de l’eau, consiste à “casser” des molécules d’eau en hydrogène et en oxygène, en utilisant le courant produit par des énergies renouvelables.

Dihydrogène

C’est en fait le vrai nom de l’hydrogène, tel qu’il existe à l’état gazeux aux conditions normales de température et de pression. La molécule H2 (pour dihydrogène) est constituée de deux atomes d’hydrogène.

DMFC

La Direct Methanol Fuel Cell (DMFC) est une pile à méthanol. Ce carburant est directement transformé par la pile sans étape préalable de reformage. Contrairement à l’hydrogène, qui est difficile à stocker et qui doit être utilisé sous forme de gaz sous pression, l’éthanol se stocke très facilement à température ambiante sous forme liquide.

Electrolyse

L’électrolyse est un procédé qui décompose l’eau (H2O) en dioxygène (O2) et dihydrogène gazeux (H2) grâce à un courant électrique. La cellule électrolytique est constituée de deux électrodes immergées dans un électrolyte (l’eau elle-même) et connectées aux pôles opposés de la source de courant continu. Ce procédé est connu depuis 1800. L’électrolyse représente moins de 1 % de la capacité totale de production de l’hydrogène. Toutefois, en raison de la baisse des prix, le recours croissant aux sources renouvelables conduit à son développement. L’Europe pousse par exemple en faveur de l’hydrogène vert, ce qui va permettre de développer l’électrolyse et de réduire le bilan carbone.

European Clean Hydrogen Alliance

Créée par l’Union Européenne, la structure a pour vocation de rassembler des acteurs de premier plan du secteur, mais aussi la société civile, des ministres nationaux et régionaux et la Banque européenne d’investissement. Cette alliance constituera une réserve de projets d’investissement destinée à accroître la production et soutiendra la demande d’hydrogène propre dans l’UE.

Fatal (hydrogène fatal)

De l’hydrogène est produit lors de la fabrication du chlore ou de l’ammoniac. On appelle cela de l’hydrogène fatal. C’est un sous-produit qui n’est généralement pas utilisé, alors qu’il pourrait être valorisé. Selon l’ADEME, 50 000 tonnes d’hydrogène fatal seraient rejetées annuellement en France, soit environ 5 % de la production nationale. Si on pouvait récupérer ce type d’hydrogène, il y aurait moyen de faire rouler 330 000 véhicules en France et 2 millions de véhicules au niveau européen.

FCH-JU

Le Fuel Cells and Hydrogen Joint Undertaking (FCH JU) est un partenariat public privé qui réunit la Commission européenne, les industriels et les chercheurs dans le domaine de l’hydrogène. Il vise à mettre en œuvre un programme de recherche et d’innovation pour que ces technologies soient commercialisées le plus rapidement possible.

Gaz d’hydrogène

L’hydrogène est le gaz le plus léger de tout l’Univers : un litre de ce gaz ne pèse que 90 mg à pression atmosphérique, il est donc environ 11 fois plus léger que l’air que nous respirons.

Gazéification

Procédé permettant de transformer un composé solide en gaz riche en hydrogène. Les sources sont principalement le charbon et la biomasse.

Gris

C’est la forme la plus « sale » de production de l’hydrogène. On utilise ce terme quand il est produit à partir de pétrole ou de gaz naturel par vaporeformage. La tendance est de réduire les émissions de CO2 par captage, afin de faire passer cet hydrogène du gris au bleu.

H2

Ce symbole est celui du dihydrogène, que l’on appelle aussi hydrogène moléculaire ou, à l’état gazeux, gaz d’hydrogène.

Hydrogen Council

Le Conseil de l’hydrogène est une initiative mondiale impliquant les PDG de plus de 80 grandes sociétés de l’énergie, des transports et de l’industrie avec une vision partagée et à long terme pour développer l’économie de l’hydrogène.

Hydrogen Europe

Association qui regroupe les acteurs de l’industrie, les organismes de recherche et les associations nationales en Europe. Elle compte 160 membres. Son rôle est de promouvoir l’hydrogène, en lien avec le FCH-JU (Fuel Cells and Hydrogen Joint Undertaking).

Hydrogène 

Il s’agit de l’élément chimique de numéro atomique 1, de symbole H. Sur Terre, il est surtout présent à l’état d’eau liquide, solide (glace) ou gazeuse (vapeur d’eau). Mais, il se trouve aussi dans les émanations de certains volcans sous la forme H2 (dihydrogène) et de méthane CH4. Le chimiste français Antoine Lavoisier a désigné ce gaz par le nom hydrogène, composé du préfixe « hydro- », signifiant « eau », et du suffixe « -gène », signifiant, « engendrer ». Il s’agit du gaz de formule chimique H2 dont le nom scientifique est désormais « dihydrogène ».

Inflammable

Eh oui, l’hydrogène ça brûle et ça peut exploser. Ce gaz a été mis en évidence par le chimiste britannique Henry Cavendish en 1766, qui l’a appelé « air inflammable » parce qu’il brûle ou explose en présence de l’oxygène, où il forme de la vapeur d’eau. L’hydrogène peut faire peur, car il a été utilisé dans les ballons dirigeables de type Zeppelin (comme celui qui a pris feu en 1937 aux Etats-Unis, le LZ 129 Hindenburg) avant d’être remplacé par l’hélium moins dangereux car non combustible. Aujourd’hui, le risque est maîtrisé.

Liquide (hydrogène liquide)

L’hydrogène se liquéfie lorsqu’on le refroidit à une température inférieure de -252,87°C. Dès lors, à une pression de 1,013 bar, on peut stocker 5 kg d’hydrogène dans un réservoir de 75 litres. Toutefois, afin de pouvoir conserver l’hydrogène liquide à cette température, les réservoirs doivent être parfaitement isolés.

Naturel (hydrogène naturel)

La production de dihydrogène naturel au niveau de dorsales (chaînes de montagnes sous-marines) est connue depuis les années 1970. Elle fait l’objet aujourd’hui d’études plus poussées. Il s’agit de réactions entre l’eau et les roches magmatiques affleurantes du manteau terrestre. Des sources ont été identifiées en Russie, aux États-Unis, au Brésil, ou encore à Oman. Le Mali est depuis 2015 le seul pays où l’on exploite l’hydrogène naturel, dans le village de Bourakébougou, à 60 km au nord de Bamako.

Blanc (hydrogène blanc)

Il s’agit d’une appellation donnée à l’hydrogène obtenu à partir de source d’hydrogène géologique, dit natif ou naturel

Noir (hydrogène noir)

Il s’agit d’un hydrogène obtenu par gazéification du charbon.

PAC

C’est le diminutif de la pile à combustible. Le principe est de produire simultanément de l’électricité et de la chaleur en recombinant de l’oxygène et de l’hydrogène, en rejetant simplement de la vapeur d’eau. La réaction d’oxydation de l’hydrogène est accélérée par un catalyseur qui est généralement du platine. On trouve deux types de piles, les PEM et les SOFC (voir les définitions).

PEM

Les piles à membranes échangeuses de protons (PEMFC, pour Proton exchange membrane fuel cell) fonctionnent à basse température et sont privilégiées pour les applications liées au transport en raison de leur compacité.

Photosynthèse

Il sera sans doute possible demain de produire de l’hydrogène, uniquement à partir de lumière et d’eau. Plusieurs micro-organismes produisent en effet naturellement de l’hydrogène, lors de la photosynthèse. C’est le cas par exemple de certaines algues vertes unicellulaires ou de certaines cyanobactéries, qui possèdent l’avantage de produire de l’hydrogène à partir de l’énergie solaire en utilisant juste de l’eau. Cette méthode de production d’hydrogène évite tout dégagement direct de gaz à effet de serre. Aujourd’hui, elle en est au stade du laboratoire.

Platine

Les piles à combustible de type PEM (Proton Exchange Membrane) capables de générer de l’électricité à partir d’hydrogène, recourent à du platine – un catalyseur très performant – qui permet d’améliorer les rendements et un fonctionnement à basse température, généralement à 70°C. A l’instar du lithium pour le déploiement des véhicules électriques à batterie, l’emploi du platine est souvent présenté comme un problème majeur. Mais, on en utilise de moins en moins. Ainsi, pour une pile de 100 kW, comme sur une Toyota Mirai, il faut un peu moins de 30 grammes de platine.

Power to gas

Ce procédé consiste à intégrer et à valoriser des énergies renouvelables par l’intermédiaire de l’électricité verte, en produisant de l’hydrogène qui est ensuite transporté par le réseau existant de gaz. Par exemple, à Dunkerque, ENGIE expérimente ce concept à la fois pour chauffer 200 logements d’un nouveau quartier d’habitation et pour alimenter en carburant Hythane (mélange d’hydrogène et de gaz naturel) la flotte de bus qui roule aujourd’hui au GNV. Le Power to gas est aussi expérimenté à Fos-sur-Mer à travers la plateforme Jupiter 1000.

Pression

Pour stocker 1 kg d’hydrogène, Il faut un volume d’environ 11 m3, c’est-à-dire le volume du coffre d’un grand utilitaire. C’est la raison pour laquelle la majeure partie des constructeurs automobiles a retenu la solution du stockage sous forme gazeuse à haute pression. A 700 bar, on peut stocker 5 kg d’hydrogène dans un réservoir de 125 litres. Mais on trouve également des pressions inférieures, par exemple 350 bar pour les utilitaires et les bus, ou 200 bar pour les vélos à hydrogène.

Prolongateur d’autonomie

Ce système permet d’utiliser une pile à combustible afin d’augmenter l’autonomie d’un véhicule électrique. Ce « range extender » permet de doubler le rayon d’action. C’est la technologie qui a permis à Symbio d’introduire l’hydrogène chez Renault, à bord du Kangoo Z.E, puis sur le Master Z.E. La combinaison des deux énergies (batteries + pile) permet aux flottes captives d’utiliser leur véhicule plus longtemps avant de refaire le plein.

Reformage

Technologie qui consiste à faire réagir du méthane avec de l’eau pour obtenir un gaz de synthèse contenant de l’hydrogène. C’est la technologie majoritairement utilisée dans la production industrielle. Les sources sont le gaz naturel ou le biogaz. Une fois purifié, le méthane réagit avec de la vapeur d’eau pour former un gaz de synthèse contenant du monoxyde de carbone (CO) et de l’hydrogène (H2). Ensuite, la vapeur d’eau réagit avec le monoxyde de carbone du gaz de synthèse pour former du dioxyde de carbone (CO2) et plus d’hydrogène. Ce mélange, riche en CO2 et en H2, est ensuite purifié pour obtenir de l’hydrogène à environ 99,9%.

SOFC

Les piles à oxydes solides (SOFC, pour Solid oxide fuel cell) sont privilégiées pour les applications stationnaires de cogénération.

Stack

C’est le cœur de la pile à combustible. Il est constitué d’un empilement de cellules qui forment un stack. Dans cet ensemble, on retrouve des membranes, des plaques bipolaires, un collecteur de courant, une couche de diffusion de gaz et des plaques de compression.

Stockage

L’hydrogène permet le stockage massif et intersaisonnier des excédents de la production électrique issue des énergies renouvelables (éolienne et photovoltaïque). Quand la production est plus importante que sa consommation, l’excédent pourrait être utilisé pour produire de l’hydrogène par électrolyse de l’eau. Cet hydrogène renouvelable peut ensuite être reconverti en courant électrique ou valorisé dans le réseau gazier. On peut stocker l’hydrogène sous forme gazeuse, liquide et même solide (dans des hydrures métalliques associant du nickel, du titane et du magnésium).

Vaporeformage

Ce procédé consiste à produire de l’hydrogène à partir d’un gaz, essentiellement du méthane, en réaction avec de la vapeur d’eau (utilisée comme oxydant pour opérer une conversion catalytique). C’est le procédé le moins coûteux mais il émet du CO2. Il représente 80 % de la production française d’hydrogène.

Vert (hydrogène vert)

C’est sous cette forme que l’hydrogène se montre le plus vertueux. Grâce à une électricité verte, issue d’énergies renouvelables), il est possible de réaliser une électrolyse et d’obtenir un hydrogène totalement décarboné. Ce type d’hydrogène est soutenu par l’Europe, qui vise en 2024 un objectif de production d’un million de tonnes d’hydrogène renouvelable et en 2030 de dix millions de tonnes dans l’UE.

Zéro émission

Un véhicule à hydrogène est avant tout un véhicule électrique. Il partage d’ailleurs la plupart des composants des véhicules à batterie, dont le moteur électrique. A ce titre, il est considéré comme un véhicule zéro émission (de CO2). Le véhicule à hydrogène bénéficie des mêmes avantages qu’un véhicule électrique classique au niveau des bonus et de la vignette Crit’Air.

Photo station hydrogène / Christian Chasseau

Feuilleton du printemps 4e épisode : Le compostage

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Close up Farmer hand giving plant organic humus fertilizer to plant

PETIT GUIDE DU COMPOSTAGE

Tout être vivant (animal ou végétal ou champignon), après sa mort, est condamné à se décomposer et à devenir matière minérale. Si l’ être défunt n’est pas dévoré par des insectes, des vers ou d’autres animaux , il devient la proie de microbes qui décomposent les énormes molécules organiques en petites molécules minérales.

Bien distinguer 2 types de fermentation

La décomposition des organismes morts (dite aussi « fermentation ») peut se faire en présence ou en absence d’oxygène.

La fermentation sans oxygène (dans les intestins ou sous terre ou au fond d’un marais ou dans un cadavre d’animal à l’intérieur duquel l’air ne circule plus) est effectuée par des microbes anaérobies (non consommateurs d’oxygène). La fermentation anaérobie produit un gaz complexe, toxique, combustible et explosif appelé « biogaz ». Sa puanteur à la fois excrémentielle et cadavérique est caractéristique. La fermentation anaérobie est souvent appelée fermentation méthanique ou méthanisation parce que le biogaz est riche en méthane (CH4).

Si au contraire la fermentation se fait en présence d’oxygène, elle est effectuée par des microbes aérobies. Cette fermentation ne produit aucun biogaz. Les déchets organiques, en se combinant à l’oxygène (oxydation) noircissent. Ils perdent beaucoup de poids et de volume par évaporation, l’eau étant le principal composant de la matière vivante. Ils deviennent progressivement de l’humus noir, friable et de parfum agréable. L’humus, à la longue, se minéralise complètement.

Cette fermentation aérobie, quand elle est organisée et conduite par l’homme, s’appelle compostage et l’humus obtenu s’appelle compost.

Durée du compostage

Elle varie beaucoup avec la nature des déchets.

La viande et le poisson, très humides et très riches en azote, se décomposent très vite. Le bois, sec et pauvre en azote, se décompose beaucoup plus lentement. Les os, les coquilles d’œufs, de moules, d’huîtres et les carapaces de crustacés ne fermentent pas vu qu’ils sont déjà minéralisés. Mais ils peuvent être mêlés au compost ( de préférence après avoir été concassés) car ils constituent pour les végétaux un aliment très riche. Rappelons que les végétaux se nourrissent uniquement de matière minérale.

Les agrumes, malgré leur acidité, sont tout à fait compostables. Les seuls déchets organiques non compostables sont :

a- le papier sulfurisé. Rendu imperméable par sulfurisation il est utilisé comme emballage par les bouchers et fromagers. Etant imperméable, il ne peut être recyclé et il n’est pas compostable. Evitez donc d’en consommer.

b- le caoutchouc et les objets en cuir (ces derniers sont traités pour devenir imputrescibles) se décomposent si lentement qu’on ne peut les composter.

Nous avons énuméré dans le 3e épisode du feuilleton les très nombreux bienfaits du compostage. Ce qu’on peut faire de mieux avec les déchets fermentescibles, c’est de les composter. Quelle technique choisir ?

Une technique à déconseiller : l’usine de tri-compostage

dite aussi TMB (tri mécanobiologique)

Dans de nombreuses collectivités une usine est chargée de trier les ordures ménagères et d’en extraire tout ce qui est putrescible pour en faire du compost . Mission impossible malgré les millions d’euros que les élus investissent souvent dans cette usine avec l’espoir toujours déçu d’en améliorer le fonctionnement et les performances..

En effet dans la poubelle ménagère les ordures putrescibles (épluchures, végétaux pourris, marcs de thé et de café, restes de sauces et de repas, entrailles de poulets et de poissons, couches-culottes, excréments de chiens et de chats) sont bien trop mêlées aux balayures , aux molécules toxiques et aux emballages pour qu’il soit possible de les séparer. Le mélange qui se fait dans chaque poubelle familiale est encore aggravé par le brassage qui s’opère dans les camions-bennes d’ébouage puis à l’entrée de l’usine dans la grande fosse de réception où des dizaines de camions-bennes déversent et mélangent leur chargement. Ensuite au début de la chaîne de tri, les ordures sont souvent broyées ce qui achève de rendre inextricable le mélange de tous les déchets.

C’est en vain que la chaîne de tri automatique (aimants, tamis, automates divers) s’efforce de faire un tri dans cette pagaille.

Quand on casse des œufs, on peut aussitôt séparer le blanc du jaune mais une fois qu’ils sont battus en omelette aucune usine, si sophistiquée qu’elle soit, ne peut plus séparer le jaune et le blanc. Ce que même un enfant comprendrait beaucoup d’ élus, eux, ne le comprennent pas et ils continuent d’investir des millions dans de nouveaux automates avec le vain espoir de séparer enfin blanc et jaune dans l’omelette des déchets. En 2014, à Béziers, les élus ont même à grands frais entièrement démoli puis reconstruit l’usine. La chambre régionale des comptes, dans son rapport 2019, constate que le rendement de la nouvelle usine est encore pire qu’avant la démolition/reconstruction. Le prétendu « compost » de l’usine neuve contient trop de débris indésirables, trop d’impuretés pour être vendable et finit dans une décharge. Double gaspillage d’argent public : coût élevé d’une usine inutile et coût lui aussi élevé de l’enfouissement en décharge.

Pour obtenir un compost digne de ce nom et vendable, il faut composter uniquement des résidus putrescibles. C’est pourquoi l’ADEME (service public de l’environnement) depuis des années, puis 2 lois successives demandent que les ménages soient dotés d’une poubelle particulière recevant tous les fermentescibles et seulement les fermentescibles.

Quand les ménages sont dotés d’une telle poubelle, l’usine de tri devient inutile. Quelle économie ! Depuis de nombreuses années l’ADEME conseille de ne plus construire d’usines de tri-compostage.

Le meilleur compost est celui que vous ferez vous-même

Si votre commune dispose d’une plate-forme de compostage ne recevant que les fermentescibles triés à la source, vous pouvez livrer à la collecte municipale vos déchets putrescibles. Mais vous pouvez aussi les garder pour faire vous-même, à domicile, votre propre compost. Rien n’est plus facile.

Les techniques de compostage domestique sont assez diverses :

Le paillage consiste à épandre les déchets frais (de préférence hachés) en couche fine ou épaisse sur le sol cultivé et à les laisser fermenter exactement comme fermentent en forêt les feuilles mortes tombées des arbres. C’est la technique la plus simple, celle qui imite le mieux la nature. L’intervention humaine se réduit à presque rien.

Le compostage peut se faire en tas. C’est ainsi qu’était compostée autrefois dans les cours de ferme, la litière (mélange de paille, d’urine et d’excréments) sortie de l’écurie et de l’étable. De temps à autre ce mélange, s’il était trop compact, était retourné à la fourche pour assurer son oxygénation.

Le tas de compost peut être entouré d’un grillage à poule ou d’une palissade en bois.

Le compostage peut se pratiquer aussi dans un récipient quelconque : caisse, grand seau, baril, grand pot de fleurs, etc. Dans ce cas il faut percer des trous dans le récipient pour faciliter, dans la masse en fermentation, la circulation de l’air porteur d’oxygène.

On trouve dans les jardineries des composteurs de diverses sortes plus ou moins fermés pour éviter que s’y introduisent des animaux parasites attirés par les débris alimentaires contenus dans le compost.

La méthode la plus sophistiquée est le lombricompostage. Elle fait appel aux vers de terre (lombrics) qui, en mangeant les déchets, assurent une première et rapide décomposition. Après quoi leurs excréments fermentent à leur tour rapidement. On trouve dans le commerce des lombricomposteurs vendus avec un lot de vers.

Les 2 écueils du compostage

Si vous faites du compost, vous n’avez que 2 écueils à éviter : sécheresse et manque d’oxygène.

Les microbes ne s’attaquent pas à de la matière organique très sèche. C’est pourquoi, pour conserver des aliments, on peut les déshydrater (légumes secs, fruits secs, charcuterie sèche, etc). En été il faut donc de temps à autre arroser un peu le compost si on ne veut pas qu’il devienne trop sec.

Si votre compost est trop humide, trop tassé, trop compact, si l’air n’y circule donc plus, la fermentation change de nature et d’aérobie qu’elle était, devient anaérobie. Elle produira du biogaz dont la puanteur sera pour vous un signal d’alerte. Il faudra alors aérer le compost en le retournant et/ou en y mêlant des matières qui éviteront le tassement : rafles de raisin, brindilles et autres déchets organiques qui ne se tassent pas.

Conclusion

Source de difficultés et de nuisances, les déchets putrescibles deviennent, quand ils sont compostés, source d’innombrables bienfaits. Si vous faites vous-même, à domicile, votre propre compost, vous valorisez sans frais et sans nuisance environ la moitié de votre poubelle ménagère. Trop peu de ménages pratiquent le compostage domestique. Il faut développer et encourager cette pratique vertueuse.

Pour le comité biterrois du MNLE Robert CLAVIJO

Coopératives, coopérations ?

Les coopératives sont à nouveau en plein développement dans la France d’aujourd’hui. Mais connaît-on vraiment ce que sont les coopératives ? Coopératives d’entreprises, d’usagers, ou de salariés. Nous nous intéresserons plus particulièrement au SCOP, SCIC et CAE. Quelles sont-elles ? A travers l’exemple de la coopérative SCOPTI-1336 née d’un conflit contre la multinationale Unilever, nous expliquerons ce qui est différent au sein de celle-ci.

Sorti d’un modèle de domination par les détenteurs d’un capital, les salariés deviennent sociétaires, coopèrent dans le travail et interviennent sur le choix des produits, sur les orientations et priorités liées à l’activité.  

  • Les coopératives ne seraient-elles pas un modèle alternatif pour produire, consommer autrement dans le cadre d’une transition… pour sortir du système ?

« On nous dit qu’on serait de mauvais capitalistes mais ça tombe bien car nous n’avons pas l’intention de devenir de bons capitalistes » (Olivier Leberquier, président de Scop-ti)

  • Un espace nouveau de travail avec un sens commun et partagé pour répondre aux besoins n’est-il souvent l’apanage de ces nouvelles coopératives ?

  • Les entreprises ne peuvent-elles être prioritairement reprises par leurs salariés sous forme coopérative avec un droit de préemption ?

Nous évoquerons aussi les difficultés, les écueils et les dérives possibles.